Imaginez consulter un psychiatre pour des troubles graves, lui confier vos pensées les plus intimes, et découvrir des années plus tard qu’il n’était qu’un imposteur. C’est l’histoire glaçante qui a secoué un hôpital psychiatrique à Évreux, où un homme originaire du Congo a exercé illégalement pendant près de deux ans, mettant en danger la vie de 521 patients. Cette affaire, mêlant fraude, manipulation et évasion judiciaire, soulève des questions brûlantes sur la sécurité du système de santé.
Un Scandale Médical à Évreux : L’Imposture d’un Faux Psychiatre
Entre novembre 2015 et mai 2017, un individu a réussi à se faire embaucher comme psychiatre dans un établissement spécialisé à Évreux. Armé d’un faux diplôme roumain, il a pris en charge des patients vulnérables, posant des diagnostics et prescrivant des psychotropes. Ce n’est qu’après une enquête minutieuse qu’il a été démasqué, révélant un parcours semé de mensonges et d’escroqueries.
Un Passé Trouble : De Faux Infirmier à Faux Psychiatre
L’homme, d’origine congolaise, n’en était pas à son premier coup. Avant de s’installer à Évreux, il avait déjà été condamné pour s’être fait passer pour un infirmier dans le Jura, escroquant 129 000 euros. Cette première fraude avait alerté les autorités, mais il a réussi à passer entre les mailles du filet pour récidiver dans un rôle encore plus sensible : celui de psychiatre.
« Ses mensonges ont porté préjudice à des personnes meurtries. »
Comment un individu sans qualifications a-t-il pu accéder à un poste aussi crucial ? La réponse réside dans une faille du système. Grâce à une circulaire ministérielle, les médecins détenteurs de diplômes européens peuvent exercer en France comme praticiens associés. L’imposteur a exploité cette règle en fabriquant un diplôme signé par des responsables fictifs d’une université roumaine, accompagné d’un cachet falsifié.
Une Supercherie Méticuleuse
La fraude était orchestrée avec une précision diabolique. Lors des perquisitions, les autorités ont découvert des tampons encreurs imitant des administrations françaises et étrangères, ainsi que de multiples faux documents. L’homme percevait même le RSA tout en touchant un salaire de psychiatre, ajoutant une escroquerie financière à son palmarès.
- Faux diplôme : Document prétendument délivré par une université roumaine.
- Tampons falsifiés : Imitation de cachets administratifs pour authentifier ses fraudes.
- Double revenu : Salaire de psychiatre et RSA perçu illégalement.
Son audace était telle qu’il assurait des gardes de 24 heures dans un service d’urgences psychiatriques, posant des diagnostics et orientant les patients vers des traitements ou des hospitalisations. Pendant près de deux ans, personne n’a suspecté l’imposture.
Les Patients : Victimes Silencieuses
Les 521 patients pris en charge par cet imposteur étaient particulièrement vulnérables. Dans un hôpital psychiatrique, les consultations impliquent des confidences intimes et des diagnostics complexes. Quels ont été les impacts de ses interventions ? Aucun patient n’a, à ce jour, porté plainte pour des soins inappropriés, mais l’absence de qualifications médicales soulève des inquiétudes légitimes.
Les psychotropes, prescrits par un homme sans formation, pouvaient avoir des conséquences graves. Une mauvaise posologie ou un diagnostic erroné peut aggraver des troubles mentaux, voire mettre des vies en danger. Pourtant, l’hôpital n’a signalé aucun incident majeur, ce qui interroge sur la supervision des praticiens.
Un Parcours Judiciaire Chaotique
En mai 2017, l’imposteur est démasqué grâce à une enquête de la Caisse primaire d’assurance maladie du Rhône, qui le traquait pour sa fraude précédente. Placé en garde à vue, il nie les accusations et prétend être victime d’une usurpation d’identité par un cousin. Une excuse peu crédible, vu les preuves accablantes.
« Toute sa vie n’est que mensonges et fuite en avant. »
Après une incarcération, il est libéré sous contrôle judiciaire, avec l’obligation de pointer à la gendarmerie et l’interdiction d’approcher l’hôpital. Mais en octobre 2024, il ne se présente pas à son procès, où il est condamné à quatre ans et demi de prison ferme. En appel, en octobre 2025, la peine est alourdie à six ans, mais l’homme reste introuvable.
| Étape Judiciaire | Date | Résultat |
|---|---|---|
| Mise en examen | Mai 2017 | Incarceration |
| Première condamnation | Octobre 2024 | 4,5 ans ferme |
| Appel | Octobre 2025 | 6 ans ferme |
Les Failles du Système de Santé
Ce scandale met en lumière des lacunes criantes dans le recrutement des professionnels de santé. Comment un faux diplôme a-t-il pu passer inaperçu pendant deux ans ? Les vérifications des qualifications semblent insuffisantes, surtout pour des postes aussi sensibles que celui de psychiatre.
Les hôpitaux, souvent en manque de personnel, peuvent être tentés de contourner certaines vérifications pour combler les postes vacants. Cette affaire souligne l’urgence de renforcer les contrôles, notamment pour les diplômes étrangers. Une simple vérification auprès de l’université roumaine aurait suffi à démasquer l’imposteur dès son embauche.
- Vérifications insuffisantes : Absence de contrôle approfondi des diplômes étrangers.
- Pénurie de personnel : Pression pour embaucher rapidement dans les hôpitaux.
- Conséquences potentielles : Risques pour la sécurité des patients.
Un Fugitif Toujours en Liberté
Condamné à six ans de prison ferme, l’imposteur reste introuvable. Sa disparition avant le procès en appel soulève des questions sur l’efficacité du contrôle judiciaire. Comment un individu sous surveillance a-t-il pu s’évanouir dans la nature ? Les autorités semblent dépassées, et l’homme pourrait continuer à sévir sous une nouvelle identité.
Ce cas rappelle d’autres affaires d’escrocs ayant exploité les failles du système. Les faux documents, faciles à produire avec les technologies modernes, compliquent la tâche des institutions. Renforcer les bases de données internationales sur les diplômes et les identités pourrait empêcher de telles fraudes à l’avenir.
Quelles Leçons pour l’Avenir ?
Cette affaire est un signal d’alarme pour le système de santé français. Elle révèle non seulement les vulnérabilités dans le recrutement médical, mais aussi les risques pour les patients les plus fragiles. Voici quelques pistes pour éviter que de tels scandales ne se reproduisent :
- Renforcer les contrôles : Vérifier systématiquement les diplômes auprès des institutions émettrices.
- Centraliser les données : Créer une base de données européenne des qualifications médicales.
- Former les recruteurs : Sensibiliser les hôpitaux aux risques de fraude documentaire.
Les patients méritent de pouvoir faire confiance à leurs soignants. Cette affaire, bien que choquante, doit servir de catalyseur pour des réformes urgentes. La santé mentale, domaine déjà sous pression, ne peut se permettre de telles dérives.
Un Appel à la Vigilance
L’histoire de cet imposteur congolais est plus qu’une anecdote judiciaire : elle interroge notre rapport à la confiance dans les institutions. Comment garantir que ceux qui nous soignent sont bien ceux qu’ils prétendent être ? La réponse passe par une vigilance accrue et des réformes structurelles.
En attendant, les 521 patients d’Évreux vivent avec le poids d’avoir été soignés par un homme sans scrupules. Si aucun préjudice direct n’a été signalé, le doute persiste. Et dans un domaine aussi sensible que la psychiatrie, le doute est déjà une blessure.









