C’est une scène inhabituelle qui se déroule depuis maintenant trois jours devant la mairie du 18ème arrondissement de Paris. Plusieurs centaines de personnes, principalement des familles migrantes avec de jeunes enfants, ont installé un campement de fortune sur le parvis, réclamant une mise à l’abri d’urgence. Une situation tendue à la veille de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques.
Des familles à la rue en quête d’un toit
Venus principalement d’Afrique subsaharienne et accompagnés par l’association Utopia 56, ces hommes, ces femmes et ces nombreux enfants en bas âge se sont réfugiés devant la mairie faute de solution d’hébergement. Sur place, le spectacle est saisissant : des couvertures de survie recouvrent le sol tandis que des tentes de fortune s’alignent sur le parvis. Beaucoup témoignent de leur épuisement après des mois voire des années d’errance dans la capitale, ballotés de squat en squat au gré des évacuations.
Moi, j’ai 5 enfants qui sont Français, et qui sont dehors.
– Une mère de famille sénégalaise présente sur place
Parmi eux, cette mère de 39 ans originaire du Sénégal, présente avec ses cinq enfants dont le plus jeune n’a que 11 mois. Malgré un travail, impossible pour elle de trouver un logement. Une situation intenable partagée par de nombreuses autres familles sur place, exténuées par des années de galère. Leur revendication est simple : obtenir un hébergement digne et pérenne pour tous, hommes, femmes et enfants.
La mairie sous pression à la veille des JO
Face à cette situation, la mairie se retrouve sous le feu des critiques à quelques jours du coup d’envoi des Jeux Olympiques. Selon l’association Utopia 56, des propositions de mise à l’abri auraient été faites pour seulement 40 personnes dans un premier temps, puis uniquement pour les femmes et les enfants dans un second temps. Des offres jugées insuffisantes par les familles et l’association, qui réclament une prise en charge de l’ensemble des personnes présentes, hommes inclus.
Du côté de la mairie de Paris, on assure que la situation n’a rien d’exceptionnelle mais se reproduit chaque été, arguant d’une plus faible disponibilité des bénévoles et citoyens engagés pour trouver des solutions d’hébergement. Léa Filoche, adjointe en charge des solidarités, appelle néanmoins à une prise en charge totale des familles sans distinction.
Un “nettoyage social” dénoncé avant les Jeux
Au-delà du sort de ces familles, c’est la politique de la ville en matière de migrants qui est pointée du doigt par plusieurs associations et collectifs. Ces derniers dénoncent une accélération des évacuations de campements ces derniers mois, en amont des Jeux Olympiques, afin de donner une image plus lisse de la capitale. Un “nettoyage social” qui se ferait au détriment des plus vulnérables selon eux.
Les expulsions de campements de rue de personnes exilées ont été nettement accélérées depuis septembre 2023.
– Le collectif Le Revers de la médaille
Une accusation réfutée par la mairie, qui assure appliquer les mêmes procédures que le reste de l’année. Il n’empêche, à quelques jours de la grand-messe olympique, la pression s’accentue pour trouver rapidement une solution pérenne pour ces centaines de familles à la rue. Un défi de taille pour les autorités, prises en étau entre impératifs sécuritaires et devoir d’accueil inconditionnel.
Un campement emblématique des défis à relever
Au-delà de son aspect spectaculaire de par sa localisation et son ampleur, ce campement devant la mairie du 18ème arrondissement cristallise en réalité les nombreux défis auxquels est confrontée la ville en matière de prise en charge des personnes exilées. Manque de places d’hébergement, manque de solution pérennes, familles et enfants à la rue… Autant de problématiques de longue date mises en lumière par l’installation de ces centaines de personnes aux portes de la mairie.
Si une solution d’urgence semble indispensable dans les prochains jours, c’est bien une réponse globale et structurelle qui est attendue par les associations sur le long terme. Avec en ligne de mire la nécessité de conjuguer dignité et inconditionnalité de l’accueil. Un immense chantier, qui ne pourra rester plus longtemps invisible dans la “Ville lumière”.
