InternationalPolitique

Expulsion Ratée d’un Salvadorien : La Justice Défie Trump

Kilmar Abrego Garcia, expulsé par erreur vers le Salvador, ramené aux États-Unis après des mois de bataille judiciaire… et pourtant toujours pourchassé par l'administration Trump. Jeudi, une juge a ordonné sa libération immédiate. Mais jusqu’à quand tiendra-t-il ?

Imaginez-vous vivre tranquillement dans le Maryland, marié à une citoyenne américaine, père de famille… et du jour au lendemain être embarqué dans un avion direction le Salvador, votre pays d’origine, sans même pouvoir dire au revoir. C’est exactement ce qui est arrivé à Kilmar Abrego Garcia.

Une expulsion qui tourne au cauchemar judiciaire

Le 15 mars dernier, plus de 250 hommes, majoritairement soupçonnés d’appartenir à un gang vénézuélien, sont expulsés des États-Unis. Parmi eux se trouve Kilmar Abrego Garcia. Problème : son expulsion est illégale. Un tribunal avait pourtant interdit son renvoi.

Commence alors une véritable guérilla juridique. Ses avocats saisissent la justice fédérale. L’administration finit par reconnaître l’erreur et le fait revenir le 6 juin… mais pas pour le libérer.

Un retour sous de nouvelles accusations

À peine posé sur le sol américain, Kilmar Abrego Garcia est transféré dans le Tennessee. Motif ? Une nouvelle procédure pour « aide au séjour illégal de migrants ». Il passe l’été détenu, puis est libéré en août sous contrôle judiciaire strict : bracelet électronique, interdiction de quitter l’État, procès prévu en janvier 2026.

Il retrouve enfin sa famille dans le Maryland. Soulagement de courte durée.

L’acharnement de l’ICE : quatre pays africains refusés

Dès son retour dans le Maryland, l’ICE (police de l’immigration) le convoque à nouveau. Cette fois, l’administration veut l’expulser vers un pays tiers, puisque le Salvador est jugé trop dangereux. Les destinations proposées ? L’Ouganda, l’Eswatini, le Ghana, puis le Liberia.

Kilmar Abrego Garcia refuse les quatre. Il accepte en revanche le Costa Rica, qui a donné son accord pour l’accueillir. Le gouvernement américain conteste cette possibilité et maintient la pression.

« Depuis sa détention illicite au Salvador, M. Abrego Garcia a été de nouveau détenu, encore sans justification légale »

Juge fédérale Paula Xinis, décision du jeudi

La décision cinglante de la juge Paula Xinis

Jeudi, la juge fédérale Paula Xinis, siégeant dans le Maryland, a tranché sans ambiguïté. Elle constate qu’il n’existe aucun ordre d’expulsion légal en cours contre Kilmar Abrego Garcia. Elle ordonne donc sa libération immédiate et demande au gouvernement de justifier d’ici 17 heures qu’il a bien exécuté l’ordre.

Dans son jugement, elle n’hésite pas à fustiger l’attitude de l’administration qui, à plusieurs reprises, a bafoué les décisions du tribunal.

L’avocat de Kilmar Abrego Garcia, Simon Sandoval-Moshenberg, annonce simplement par courriel : « Il a été libéré ». Un soulagement immense après presque neuf mois de calvaire.

La réaction immédiate du gouvernement Trump

La réponse ne se fait pas attendre. Tricia McLaughlin, porte-parole du ministère de la Sécurité intérieure, publie sur X : « Cette décision n’a aucune base juridique et nous continuerons à nous battre bec et ongles contre ceci devant les tribunaux ». Elle accuse la juge de militantisme judiciaire.

Un vocabulaire qui reflète la tension extrême entre l’exécutif et une partie de la magistrature fédérale sur la question migratoire.

Un cas qui cristallise un conflit plus large

L’histoire de Kilmar Abrego Garcia n’est pas isolée. Elle illustre le bras de fer permanent entre l’administration Trump, qui a fait de la lutte contre l’immigration illégale sa priorité absolue, et les tribunaux fédéraux qui veillant au respect des droits.

Depuis 2017, des centaines de décisions de justice ont freiné ou annulé des expulsions massives, souvent au motif que les personnes concernées n’avaient pas pu faire valoir leurs droits ou que les procédures avaient été bâclées.

Le président Trump parle régulièrement d’« invasion » et de « criminels venus de l’étranger ». Ses équipes communiquent largement sur chaque vol d’expulsion. Mais chaque fois qu’un juge intervient, l’administration crie à l’obstruction.

Chronologie d’un calvaire en 7 dates

  • 15 mars – Expulsion illégale vers le Salvador
  • Avril-mai – Bataille juridique intense
  • 6 juin – Retour forcé aux États-Unis
  • Juin-août – Détention dans le Tennessee
  • Août – Libération sous bracelet électronique
  • Automne – Nouvelles tentatives d’expulsion vers pays africains
  • Jeudi – Libération définitive ordonnée par la justice

Et maintenant ?

Pour l’instant, Kilmar Abrego Garcia est libre. Il peut retrouver sa femme américaine et ses enfants dans le Maryland. Mais le gouvernement a déjà annoncé qu’il ferait appel. Le procès dans le Tennessee pour « aide au séjour illégal » est toujours prévu en janvier 2026.

Rien ne dit que l’administration ne tentera pas une nouvelle expulsion par un autre moyen. L’histoire n’est peut-être pas terminée.

Ce dossier montre à quel point la politique migratoire américaine reste un terrain miné, où les décisions politiques se heurtent violemment aux principes constitutionnels de due process et de respect des droits individuels.

Une chose est sûre : le nom de Kilmar Abrego Garcia restera comme l’un des symboles de cette lutte acharnée entre pouvoir exécutif et pouvoir judiciaire sur la question de l’immigration.

Passionné et dévoué, j'explore sans cesse les nouvelles frontières de l'information et de la technologie. Pour explorer les options de sponsoring, contactez-nous.