Le spectre d’un embrasement généralisé plane à nouveau sur le Moyen-Orient. Dans la nuit du 30 au 31 juillet, l’aviation israélienne a mené des frappes d’une ampleur sans précédent au Liban et en Iran, faisant de nombreuses victimes civiles. Une escalade militaire qui fait craindre le pire dans une région déjà exsangue.
Le Liban sous les bombes
À Beyrouth, c’est le choc et la stupeur. En pleine nuit, des avions de combat israéliens ont pilonné le quartier de Haret Hreik, fief du Hezbollah dans la banlieue sud de la capitale libanaise. Le bilan est lourd : au moins 4 morts, dont 2 enfants, et plus de 80 blessés, principalement des civils. Des immeubles entiers se sont effondrés sous la violence des déflagrations.
“La population est traumatisée. C’est un choc énorme”,
témoigne Michel Helou, secrétaire général du parti centriste Bloc National.
Depuis 10 mois, le Sud-Liban est la cible de bombardements incessants de la part d’Israël. L’aviation, l’artillerie et les drones de Tsahal pilonnent sans relâche les villages frontaliers, causant d’immenses dégâts et de nombreuses victimes civiles. Une situation intenable pour la population, prise en étau entre les attaques israéliennes et la mainmise du Hezbollah.
L’Iran également ciblé
Mais le Liban n’est pas le seul pays visé par les frappes israéliennes. Simultanément, Tsahal a bombardé massivement plusieurs sites en Iran, accusé de soutenir et d’armer le Hezbollah. Selon l’armée israélienne, des dépôts d’armes et des centres d’entraînement des Gardiens de la Révolution ont été détruits à Téhéran et Qom.
Des frappes d’une rare violence qui marquent une escalade majeure dans le bras de fer qui oppose Israël à l’Iran. Téhéran a immédiatement condamné “l’agression sioniste” et promis des représailles “dévastatrices”. Une rhétorique guerrière qui fait peser le risque d’une confrontation directe entre les deux ennemis.
Le drame du Golan, élément déclencheur
À l’origine de cette brutale montée des tensions : l’attaque meurtrière au missile antichar contre un bus scolaire dans le Golan, le 23 juillet dernier. Une attaque attribuée au Hezbollah par Israël et qui a coûté la vie à 12 enfants israéliens. Un drame national qui a suscité une vive émotion en Israël et un désir de vengeance.
Depuis, le premier ministre israélien multiplie les déclarations martiales, promettant de “faire payer au centuple le prix du sang” au Hezbollah et à ses parrains iraniens. Des menaces mises à exécution avec les bombardements massifs de la nuit dernière sur Beyrouth et Téhéran.
Vers une escalade incontrôlable ?
En choisissant la voie de la confrontation militaire, Israël prend le risque d’une escalade potentiellement incontrôlable. Le Hezbollah a déjà promis une riposte “à la mesure de l’agression” et l’Iran ne manquera pas de soutenir son allié. Une escalade du conflit qui pourrait rapidement dégénérer en guerre ouverte.
De son côté, la communauté internationale semble impuissante à enrayer la spirale de violence. L’ONU a bien appelé “toutes les parties à la plus grande retenue”, mais sans grand effet sur le terrain. Faute d’un engagement fort des grandes puissances, le Moyen-Orient semble promis à sombrer un peu plus dans le chaos.
“Israël ne tolèrera pas que le Hezbollah mette en danger la vie de nos citoyens. Nous agirons par tous les moyens pour protéger notre peuple.”
Déclaration de Benny Gantz, ministre de la Défense israélien
Un conflit aux racines profondes
Au-delà de l’élément déclencheur du drame du Golan, le regain de tensions entre Israël et le Hezbollah s’inscrit dans le contexte plus large du conflit israélo-palestinien. Depuis sa création en 1982 en réaction à l’invasion israélienne du Liban, le Hezbollah s’est posé en fer de lance de la “résistance” face à “l’entité sioniste”.
Fort de son aura de “libérateur” acquise après le retrait israélien du Liban en 2000, le Parti de Dieu chiite n’a cessé depuis de croître en puissance, bénéficiant du soutien militaire et financier de l’Iran. Un rapport de force qui inquiète Israël qui voit dans le Hezbollah une menace existentielle à ses frontières nord.
“Le Hezbollah détient aujourd’hui un arsenal estimé à 150000 roquettes pointées sur Israël. C’est comme une épée de Damoclès au-dessus de nos têtes.”
Analyse d’un expert militaire israélien
Le Liban, victime collatérale
Dans ce face-à-face tendu, c’est le Liban qui fait les frais des velléités guerrières. Champ de bataille entre Israël et le Hezbollah, le pays du Cèdre voit sa souveraineté et son intégrité sans cesse bafouées. Une situation intenable pour la population civile, prise en étau entre deux feux.
Exsangue après des années de crise politique et économique, le Liban semble au bord du gouffre. Les affrontements à répétition entre Israël et le Hezbollah ont réduit à néant les efforts de reconstruction après la dévastatrice guerre de 2006. Les infrastructures sont détruites, l’économie exsangue et la pauvreté explosive.
“Le Liban est piégé dans un engrenage sur lequel il n’a aucune prise. Notre souveraineté est constamment niée et notre peuple souffre.”
Déplore un responsable libanais
Sortir de l’impasse ?
Face à cette escalade meurtrière aux conséquences potentiellement dévastatrices, les appels au dialogue et à la désescalade se multiplient. Mais dans un contexte de défiance extrême, les pourparlers de paix semblent plus que jamais compromis. Chaque camp campant sur ses positions maximalistes.
Pourtant, sans une solution politique globale prenant en compte les aspirations légitimes de chacun, le Moyen-Orient semble condamné à s’enfoncer dans un cycle sans fin de violence et de représailles. Un engrenage aux conséquences incalculables qui risque à tout moment d’embraser la région toute entière.
Il est plus que temps pour la communauté internationale de s’impliquer activement pour arracher une paix juste et durable. Il en va de la stabilité et de la sécurité de toute la région. Mais le temps presse. Et chaque nouvelle escalade rend un peu plus improbable le chemin de la raison. Le Moyen-Orient retient son souffle.