Chaque année en France, des centaines de milliers de patients sont victimes d’erreurs médicales aux conséquences parfois dramatiques. Derrière les chiffres se cachent des destins brisés, des familles endeuillées et des parcours du combattant pour obtenir réparation. Témoignages bouleversants.
Marion, 28 ans, emportée par une embolie pulmonaire après une chute à moto
Août 2015. Marion Garin, jeune restauratrice de tableaux, est hospitalisée suite à un accident de moto. Malgré les soins, son état se dégrade brutalement deux semaines plus tard. « Un matin, elle nous dit qu’elle a très mal dormi à cause de problèmes respiratoires », se souvient son père Didier. Quelques heures après, c’est le drame : Marion est emportée à 28 ans par une embolie pulmonaire foudroyante, consécutive à une phlébite non diagnostiquée.
Aucun médecin n’a voulu reconnaître une erreur. C’était toujours le collègue qui aurait dû faire un examen plus approfondi.
Didier, père de Marion
Sept ans de combat judiciaire auront été nécessaires pour qu’une infirmière et un médecin soient reconnus responsables. Et pour que les parents apprennent que la mort de leur fille aurait pu être évitée par une simple piqûre d’anticoagulant.
Hélène, prisonnière d’un corps qui ne répond plus après une opération
Ex-metteuse en scène, Hélène Duhamel a été victime en 2019 d’un accident vasculaire cérébral lors d’une intervention chirurgicale censée la soulager de douleurs chroniques au visage. Fait rarissime, qui la laisse aujourd’hui paralysée et tremblante en permanence. « Le chirurgien n’a pas trop parlé des risques, alors qu’il y en avait », confie-t-elle, amère.
Quand on est dépendant pour absolument tout, c’est horrible.
Xavier, compagnon d’Hélène
Cinq ans après le drame, le couple attend toujours les indemnisations prévues par la loi en cas d’aléa thérapeutique. Un véritable chemin de croix.
Un combat judiciaire long et coûteux
Selon Me Hervé Gerbi, avocat spécialisé, les trois quarts des procédures aboutissent à des condamnations, mais les démarches sont particulièrement lourdes pour les victimes:
- Nécessité d’être assisté par des médecins de recours pour comprendre le langage médical
- Procédures parmi les plus complexes, longues et coûteuses
- Prise en charge des frais d’expertise par les victimes
Reconnaître l’erreur pour apaiser les souffrances
Pour le docteur Sauveur Boukris, membre de l’association d’aide aux victimes Le Lien, beaucoup de procédures pourraient être évitées si le corps médical acceptait plus facilement de reconnaître ses erreurs :
On a le droit à l’erreur. Quand vous essayez d’expliquer, vous apaisez.
Docteur Sauveur Boukris
Un constat partagé par Xavier : « Il faut que les médecins comprennent qu’on n’est pas là pour les attaquer, mais juste pour comprendre ce qui s’est passé. Cette incompréhension rajoute à notre douleur. »
Mieux Former pour prévenir les drames
Au-delà de la reconnaissance des erreurs, c’est tout le système de santé qui doit évoluer pour mieux protéger les patients selon les associations de victimes. Parmi les pistes avancées :
- Renforcer la formation des soignants sur les risques et la gestion des aléas
- Systématiser la communication avec le patient et sa famille
- Dédier plus de moyens au traitement des événements indésirables graves
- Simplifier les procédures d’indemnisation des victimes
Des évolutions indispensables pour que le serment d’Hippocrate ne reste pas lettre morte et que plus jamais des vies ne soient brisées par des erreurs évitables. Car derrière chaque statistique se cache un drame humain, rappellent les familles endeuillées. Et aucune indemnisation ne pourra remplacer un être cher perdu à cause d’un défaut de prise en charge.
Une prise de conscience collective à mener
Si les pouvoirs publics ont pris la mesure du problème avec la mise en place récente d’un portail de signalement des événements sanitaires indésirables, le chemin est encore long. Il en va de la confiance des Français dans leur système de santé, mis à rude épreuve ces dernières années.
Une confiance qui passe aussi par une meilleure information des patients sur les risques inhérents à tout acte médical. « On ne peut pas réduire le risque zéro, mais on peut mieux accompagner et indemniser les victimes quand le pire arrive », insiste Didier. Pour que leur combat ne soit pas vain.
Des drames qui rappellent que derrière la technicité et les prouesses de la médecine moderne, l’humilité et l’humanité doivent rester au cœur du serment d’Hippocrate. Pour que plus jamais des destins ne soient brisés par des erreurs qui auraient pu être évitées.