Alors que la Syrie entre dans une nouvelle ère sous la direction de forces islamistes après la chute de Bachar al-Assad, le président turc Recep Tayyip Erdogan a tenu à envoyer un message fort. Lors d’une rencontre à Ankara avec le Premier ministre kurde irakien Masrour Barzani, il a martelé qu’il n’y avait pas de place pour les « organisations terroristes » dans l’avenir du pays.
Cette mise en garde vise principalement les forces kurdes syriennes, en particulier les Unités de protection du peuple (YPG). La Turquie accuse ce groupe, épine dorsale des Forces démocratiques syriennes (FDS) soutenues par les États-Unis, d’avoir des liens étroits avec le Parti des travailleurs du Kurdistan (PKK), considéré comme une organisation terroriste par Ankara et ses alliés occidentaux.
La Turquie prête à intervenir pour éviter l’instabilité
Face aux bouleversements en Syrie, Erdogan a assuré que son pays s’efforçait d’empêcher qu’un vide sécuritaire ne provoque une nouvelle période d’instabilité dans la région. Il s’est même dit prêt, en cas de « risque », à prendre « les mesures nécessaires ». Une déclaration qui fait écho aux propos du ministre turc des Affaires étrangères Hakan Fidan, affirmant que « l’élimination » des combattants du PKK en Syrie n’était qu’une « question de temps ».
La Turquie a d’ailleurs déjà agi en ce sens par le passé, lançant régulièrement des frappes contre les positions kurdes syriennes, qu’elle accuse de menacer sa sécurité nationale. Plus de 100 combattants ont encore été tués le week-end dernier dans des affrontements entre factions pro-turques et forces kurdes dans le nord de la Syrie, selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme (OSDH).
Quel avenir pour les Kurdes syriens ?
La question du sort des Kurdes syriens se pose donc avec acuité dans ce contexte de transition. Hakan Fidan a évoqué « la possibilité que le PKK et les YPG rejoignent le nouveau gouvernement en déposant les armes ». Mais au vu des tensions historiques et de la méfiance d’Ankara, un tel scénario semble pour l’heure peu probable.
Les Unités de protection du peuple, qui ont joué un rôle clé dans la lutte contre l’État islamique aux côtés de la coalition internationale, craignent de faire les frais des nouvelles dynamiques à l’œuvre en Syrie. Leur avenir, et plus largement celui des Kurdes syriens, apparaît aujourd’hui plus que jamais incertain.
La Turquie, acteur incontournable
Une chose est sûre : avec sa frontière de plus de 900 km avec la Syrie, la Turquie entend peser de tout son poids dans la redéfinition du paysage syrien. Erdogan l’a rappelé, Ankara ne tolérera pas la présence à ses portes de groupes qu’elle considère comme une menace existentielle.
Cette position de fermeté place la Turquie en position de force dans le grand jeu syrien qui s’annonce. Reste à savoir si elle parviendra à concilier ses intérêts sécuritaires avec la nécessaire stabilisation d’un pays meurtri par plus d’une décennie de guerre. L’avenir de la Syrie, et des Kurdes en particulier, en dépendra largement.