Un samedi soir, dans une petite ville balnéaire d’Équateur, l’ambiance festive d’une salle de billard a viré au cauchemar. Des hommes armés ont fait irruption, semant la mort et la panique. Neuf personnes ont perdu la vie, leurs corps laissés au sol parmi les tables de jeu, dans une scène digne des pires drames. Ce fait divers tragique, survenu à General Villamil Playas, n’est pas un incident isolé, mais le reflet d’une crise sécuritaire qui ébranle l’Équateur, autrefois perçu comme un îlot de paix en Amérique du Sud.
Un Drame dans une Station Balnéaire
Le 19 juillet 2025, la petite ville touristique de General Villamil Playas, située à 90 km de Guayaquil, s’est retrouvée sous le choc. Dans un bar animé, des individus armés ont ouvert le feu sur les clients, tuant au moins neuf personnes et en blessant deux autres. Selon les autorités, les assaillants ont utilisé des fusils automatiques, transformant un lieu de détente en théâtre d’horreur. Les images diffusées sur les réseaux sociaux montrent des corps ensanglantés, gisant entre les tables de billard, tandis que des proches, en pleurs, veillaient déjà les défunts sur place.
Ce drame n’est pas qu’un simple fait divers. Il s’inscrit dans une vague de violence sans précédent qui touche l’Équateur, où le taux d’homicides a explosé ces dernières années. En seulement cinq mois, en 2025, le pays a recensé 4.051 meurtres, un record historique pour cette nation autrefois paisible.
Une Ville Touristique sous Tension
General Villamil Playas est une destination prisée des Équatoriens, attirés par ses plages et son ambiance détendue. Pourtant, ce cadre idyllique cache une réalité sombre. La proximité de Guayaquil, un hub portuaire stratégique, en fait une cible pour les gangs criminels. Ces derniers exploitent les ports pour le trafic de drogue, notamment la cocaïne, dont plus de 73 % de la production mondiale transiterait par l’Équateur, selon des sources officielles.
Le colonel de police Jhanon Varela, présent sur les lieux, a évoqué un bilan potentiellement plus lourd, car de nombreuses victimes ont été emmenées par leurs proches avant l’arrivée des autorités. Cette pratique, courante dans les zones en proie à la violence, complique le recensement précis des pertes humaines.
“Malheureusement, quand la police arrive, beaucoup de gens affectés par l’événement ont déjà été enlevés par des habitants ou des membres de leurs familles.”
Colonel Jhanon Varela
Une Violence Alimentée par le Narcotrafic
Le drame de General Villamil Playas n’est qu’un épisode d’une guerre plus large, menée par des bandes de narcotrafiquants. L’Équateur, coincé entre la Colombie et le Pérou, deux géants de la production de cocaïne, est devenu un carrefour du trafic international. Les ports équatoriens, comme celui de Guayaquil, sont des points stratégiques pour l’exportation de drogue vers l’Europe et l’Amérique du Nord. Cette position géographique, combinée à une économie dollarisée et à une corruption endémique, attire les organisations criminelles.
Le gang Los Choneros, dirigé par le baron de la drogue Adolfo Macias, alias Fito, est l’un des principaux acteurs de cette violence. En juin 2025, Fito a été capturé à Manta, après s’être évadé d’une prison de haute sécurité l’année précédente. Mais son arrestation, suivie de son extradition vers les États-Unis pour trafic de cocaïne et d’armes, n’a pas freiné l’escalade de la violence. Dans la province de Manabi, bastion des Choneros, au moins 20 personnes ont été tuées la même semaine dans des attaques similaires.
L’Équateur, autrefois un havre de paix, est aujourd’hui un champ de bataille où les gangs imposent leur loi.
Une Crise Sécuritaire Inédite
Le taux d’homicides en Équateur a grimpé en flèche, passant de 6 pour 100.000 habitants en 2018 à 38 pour 100.000 en 2024. Ce chiffre, déjà alarmant, semble encore s’aggraver en 2025. La montée de la violence est directement liée à l’influence croissante des gangs, qui s’affrontent pour le contrôle des routes de la drogue. Les autorités peinent à reprendre le contrôle, malgré des mesures drastiques.
À Manta, un port clé de la province de Manabi, le ministre de l’Intérieur, John Reimberg, a annoncé le déploiement de 2.500 policiers pour renforcer la sécurité. Cette réponse musclée intervient après une série d’attaques meurtrières dans la région, où les gangs continuent de semer la terreur.
Les Répercussions sur la Population
Parmi les victimes de l’attaque de General Villamil, un entraîneur d’une école locale de football a perdu la vie, laissant une communauté en deuil. Ce drame illustre l’impact dévastateur de la violence sur les civils, qui se retrouvent pris au piège d’une guerre qu’ils n’ont pas choisie. La préfète, Marcela Aguinaga, a dénoncé cette situation dans une déclaration poignante.
“La violence cherche à nous mettre à genoux, à nous faire taire et à nous habituer à l’horreur. Mais nous ne nous tairons pas. Nous ne nous rendrons pas non plus.”
Marcela Aguinaga, préfète
Les habitants de General Villamil, comme ceux de nombreuses autres villes équatoriennes, vivent désormais dans la peur. Les lieux de vie quotidienne, comme les bars ou les écoles, ne sont plus des refuges sûrs. Cette insécurité croissante pousse certains à fuir, tandis que d’autres s’organisent pour résister.
Que Faire Face à l’Escalade ?
Face à cette crise, les autorités équatoriennes tentent de réagir. Le déploiement policier à Manta et l’extradition de figures comme Fito sont des signaux forts, mais leur impact reste limité. Les causes profondes de la violence – corruption, pauvreté, et position stratégique de l’Équateur – nécessitent des solutions à long terme.
Pour mieux comprendre l’ampleur de la situation, voici quelques chiffres clés :
- 4.051 homicides recensés en Équateur entre janvier et mai 2025.
- 73 % de la cocaïne mondiale transite par les ports équatoriens.
- Taux d’homicides passé de 6 à 38 pour 100.000 habitants entre 2018 et 2024.
La lutte contre le narcotrafic exige une coopération internationale, notamment avec les États-Unis, qui accueillent désormais Fito pour jugement. Mais sur le terrain, les Équatoriens attendent des mesures concrètes pour ramener la paix.
Un Avenir Incertain
Le massacre de General Villamil Playas est un rappel brutal que l’Équateur est en proie à une crise sans précédent. Les gangs, armés et organisés, continuent de défier l’État, tandis que les citoyens payent le prix fort. Si des efforts sont en cours, la route vers la stabilité semble encore longue.
Ce drame soulève une question essentielle : comment un pays peut-il retrouver la paix lorsque la violence devient la norme ? Les réponses ne sont pas simples, mais une chose est sûre : l’Équateur ne peut se permettre de baisser les bras face à cette tempête.