L’année 2024 restera marquée par un nouveau record de l’épargne des Français. Selon les derniers chiffres publiés par la Caisse des Dépôts, les intérêts versés sur les Livrets A et les Livrets de Développement Durable et Solidaire (LDDS) ont atteint la somme colossale de 16,80 milliards d’euros. Un montant jamais égalé jusqu’ici, qui témoigne de l’engouement des épargnants pour ces placements réglementés dans un contexte économique et politique toujours incertain.
Une collecte record malgré un taux en baisse
Après une année 2023 déjà exceptionnelle, les livrets défiscalisés ont continué d’attirer massivement l’épargne des ménages en 2024. Au 31 décembre, l’encours total des Livrets A et LDDS s’élevait à 603,1 milliards d’euros, en progression de 6,8% sur un an. Une performance d’autant plus remarquable que le taux de ces livrets sera ramené de 3% à 2,4% au 1er février 2025.
Comment expliquer un tel succès ? D’après les experts, c’est l’incertitude ambiante qui incite les Français à se tourner vers ces placements sûrs et liquides. Les remous politiques, le flou sur les perspectives économiques et les tensions géopolitiques favorisent une épargne de précaution.
La persistance d’un contexte politique et économique incertain pourrait amener les ménages à maintenir leurs versements à un niveau élevé sur le Livret A ou le LDDS.
Philippe Crevel, président du Cercle de l’Épargne
Un rendement réel redevenu positif
Autre facteur de ce succès : le maintien d’un taux attractif de 3% tout au long de l’année 2024, combiné au reflux de l’inflation. Cette conjonction a permis aux livrets réglementés d’afficher à nouveau un rendement réel positif, une situation favorable que les épargnants n’avaient plus connue depuis longtemps.
Quelle concurrence pour 2025 ?
La baisse de taux prévue en février 2025 pourrait néanmoins rebattre les cartes. Certains observateurs estiment que les livrets réglementés pourraient souffrir de la concurrence des contrats d’assurance-vie, et notamment des fonds en euros qui offrent aussi une garantie du capital.
Pour autant, les livrets A et LDDS devraient rester attractifs, avec un rendement qui devrait se maintenir au-dessus de l’inflation, sauf surprise. Un niveau suffisant pour continuer de capter une épargne de précaution, surtout dans un environnement qui restera marqué par de nombreuses incertitudes.
Le LEP moins dynamique
Autre enseignement des chiffres 2024 : le Livret d’Épargne Populaire a connu une année moins faste que le Livret A. Réservé aux ménages modestes, le LEP a vu son encours progresser de 14,3% à 82,2 milliards d’euros, loin de la performance de 2023 (+50%). Un ralentissement qui s’explique par la capacité d’épargne limitée des ménages éligibles.
Mobiliser l’épargne pour financer l’économie ?
Face à ces volumes records, certaines voix s’élèvent pour appeler à une meilleure utilisation de cette manne. Le gouverneur de la Banque de France a ainsi plaidé pour que ces centaines de milliards d’euros soient davantage orientés vers le financement des entreprises et des grands projets, plutôt que de dormir sur les livrets.
Récupérons ces 300 milliards d’épargne pour construire l’économie européenne de demain, notamment pour dégager un avantage compétitif dans la transition climatique.
François Villeroy de Galhau, gouverneur de la Banque de France
Un vœu qui se heurte toutefois à la volonté des épargnants de privilégier la sécurité et la liquidité dans un monde perçu comme de plus en plus risqué et instable. Reste à inventer des solutions pour concilier cette légitime prudence et le besoin de financer les mutations de notre économie.
