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Enlèvement et Adoption Illégale : Une Mère Défie la Corée

En 1975, une fillette est enlevée à Séoul et adoptée illégalement aux États-Unis. Sa mère, brisée, poursuit aujourd’hui la Corée du Sud. Découvrez son combat pour la vérité...

Imaginez une mère, rentrant du marché, découvrant que sa fille de six ans a disparu. Cette scène, digne d’un cauchemar, est le point de départ d’une histoire bouleversante qui s’étend sur quatre décennies. En 1975, à Séoul, une petite fille est enlevée sous les yeux de ses amis, emmenée loin de sa famille, et adoptée illégalement à l’autre bout du monde. Aujourd’hui, sa mère, Tae-soon, brise le silence et poursuit le gouvernement sud-coréen pour obtenir justice. Ce récit, mêlant douleur, espoir et combat, révèle les zones sombres d’un système d’adoption internationale qui a séparé des milliers de familles.

Un Système d’Adoption Entaché par le Scandale

Dans les années 1970, la Corée du Sud, marquée par les stigmates de la guerre et de la pauvreté, devient un carrefour de l’adoption internationale. Ce qui semblait être une solution humanitaire pour des enfants orphelins cache une réalité bien plus sombre. Des agences privées, profitant d’un manque de régulation, orchestrent un véritable trafic d’enfants, souvent enlevés à leurs familles biologiques. Ce système, qui a envoyé au moins 140 000 enfants à l’étranger, repose sur des pratiques illicites : falsifications d’identité, enregistrements frauduleux d’orphelins, et un contrôle quasi inexistant des parents adoptifs.

Le cas de Kyung-ha, enlevée à l’âge de six ans, illustre cette tragédie. Alors qu’elle jouait près de chez elle, une femme l’a attirée avec des promesses trompeuses, l’éloignant de sa mère. Conduite dans un orphelinat, puis adoptée par un couple américain, Kyung-ha, devenue Laurie Bender, a grandi en croyant que sa mère l’avait abandonnée. Pendant ce temps, Tae-soon, sa mère biologique, a passé des décennies à la chercher, sans jamais abandonner.

« J’ai passé 44 ans à me ruiner corps et esprit. Mais personne ne s’est jamais excusé. »

Tae-soon, mère de Kyung-ha

Une Quête Inlassable pour la Vérité

Le combat de Tae-soon est celui d’une mère déchirée par la perte. Après la disparition de sa fille, elle a remué ciel et terre : commissariats, orphelinats, appels télévisés, distribution de tracts. Elle raconte avoir marché jusqu’à l’épuisement, au point de perdre ses ongles de pieds. Mais chaque piste semblait mener à une impasse. En 1990, une femme prétendant être Kyung-ha l’a contactée, ravivant l’espoir, avant que la vérité n’éclate : ce n’était pas sa fille. Ce revers aurait pu briser Tae-soon, mais elle a continué, portée par un amour indéfectible.

En 2019, un tournant décisif survient grâce à l’association 325 Kamra, spécialisée dans la réunion des familles séparées. Grâce à un test ADN, Tae-soon et Kyung-ha, désormais Laurie, se retrouvent enfin. Leur rencontre à l’aéroport de Séoul est un moment d’émotion brute : des larmes, des étreintes, et une reconnaissance instinctive lorsque Tae-soon touche les cheveux de sa fille. Ce moment, capturé en images, symbolise l’espoir au milieu du chaos.

Les chiffres clés du scandale :

  • Au moins 140 000 enfants adoptés à l’étranger depuis les années 1950.
  • 99 % des demandes d’adoption internationale approuvées en 24 heures en 1984.
  • 367 plaintes examinées par la Commission vérité et réconciliation.

Un Système aux Racines Profondes

Pour comprendre l’ampleur de ce scandale, il faut remonter aux années 1940 et 1950. Après l’occupation japonaise et la guerre de Corée, le pays est plongé dans une pauvreté extrême. Les enfants issus de relations entre militaires américains et femmes sud-coréennes, souvent stigmatisés pour leur métissage, deviennent des cibles privilégiées pour l’adoption. À cette époque, la société sud-coréenne valorise la pureté du sang, rejetant les enfants métis. Les agences d’adoption, voyant une opportunité lucrative, organisent l’exportation massive de ces enfants vers des couples occidentaux.

Le rapport de la Commission vérité et réconciliation, publié en mars 2025, met en lumière l’ampleur des dérives. Pendant quarante ans, des pratiques illégales ont prospéré : des enfants étaient déclarés orphelins sans vérification, des identités étaient falsifiées, et les parents adoptifs étaient rarement soumis à des contrôles rigoureux. Ce laxisme a permis à des milliers d’enfants d’être arrachés à leurs familles, souvent sans leur consentement.

La Première Poursuite d’une Mère

Tae-soon est la première mère biologique à porter plainte contre le gouvernement sud-coréen, réclamant des dommages et intérêts pour l’enlèvement de sa fille. Son action marque un tournant historique. Elle ne cherche pas seulement une compensation financière, mais aussi des excuses officielles pour les décennies de silence et de douleur. Son courage inspire d’autres familles, qui commencent à demander des comptes pour des drames similaires.

La Commission vérité et réconciliation a appelé le gouvernement à reconnaître sa responsabilité. Pourtant, les progrès restent lents. Les victimes, qu’il s’agisse des enfants adoptés ou de leurs parents biologiques, attendent toujours une reconnaissance pleine et entière des violations des droits humains commises.

« Les retrouvailles ont été un miracle, mais la douleur reste. Je veux que justice soit faite. »

Tae-soon, lors d’une interview télévisée

Les Retrouvailles : Un Miracle Teinté de Douleur

Les retrouvailles entre Tae-soon et Laurie sont un moment de joie, mais aussi de tristesse. Laurie, qui a grandi aux États-Unis, a dû faire face à une identité fracturée. Pendant des années, elle a cru que sa mère l’avait abandonnée. Découvrir la vérité – un enlèvement orchestré – a bouleversé sa vision du monde. Pour Tae-soon, revoir sa fille a ravivé des souvenirs douloureux, mais aussi une colère face à l’injustice subie.

Leur histoire illustre un défi plus large : comment réparer des décennies de séparation ? Les tests ADN, bien que révolutionnaires, ne suffisent pas à combler le vide émotionnel. Les familles doivent réapprendre à se connaître, surmonter les barrières culturelles et linguistiques, et faire face aux traumatismes du passé.

Année Événement clé
1975 Enlèvement de Kyung-ha à Séoul.
1990 Fausse piste : une femme prétend être Kyung-ha.
2019 Retrouvailles grâce à un test ADN.
2025 Tae-soon poursuit le gouvernement sud-coréen.

Un Appel à la Réparation

Le scandale des adoptions illégales en Corée du Sud soulève des questions éthiques et juridiques profondes. Comment un pays peut-il réparer les torts causés à des milliers de familles ? La Commission vérité et réconciliation recommande des excuses officielles et une réforme des pratiques d’adoption. Mais pour beaucoup, comme Tae-soon, la justice va au-delà des mots : elle exige une reconnaissance des souffrances et des mesures concrètes pour éviter que de tels drames ne se reproduisent.

Dans d’autres pays, des scandales similaires ont émergé. En France, par exemple, une enquête sur les pratiques illicites dans l’adoption internationale a révélé des dérives comparables. Ces histoires rappellent l’importance de réguler strictement les adoptions pour protéger les droits des enfants et de leurs familles biologiques.

Vers un Avenir Plus Juste ?

Le combat de Tae-soon est loin d’être terminé. Sa plainte contre le gouvernement sud-coréen pourrait ouvrir la voie à d’autres actions en justice. Elle donne aussi un visage humain à un scandale qui, pendant trop longtemps, est resté dans l’ombre. En poursuivant son pays, Tae-soon ne demande pas seulement justice pour elle-même, mais pour toutes les familles brisées par ce système.

Les avancées technologiques, comme les tests ADN, offrent de l’espoir pour réunir d’autres familles. Mais elles ne suffisent pas. Les gouvernements doivent assumer leur responsabilité, non seulement en s’excusant, mais en mettant en place des mécanismes pour soutenir les victimes et empêcher de nouvelles tragédies.

Que retenir de cette histoire ?

  • ➜ Un scandale d’adoption illégale qui a brisé des milliers de familles.
  • ➜ Une mère courageuse qui défie un système pour obtenir justice.
  • ➜ L’importance des tests ADN pour réunir les familles séparées.
  • ➜ Un appel urgent à des réformes pour protéger les droits humains.

L’histoire de Tae-soon et Kyung-ha est un rappel poignant de la résilience humaine face à l’injustice. Leur combat, à la fois personnel et universel, nous pousse à réfléchir : comment une société peut-elle réparer les erreurs du passé tout en construisant un avenir plus équitable ? La réponse, encore incertaine, repose sur le courage de ceux qui, comme Tae-soon, refusent de baisser les bras.

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