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En Garde : Drame Fraternel Troublant en Escrime

Deux frères escrimeurs se retrouvent après des années de séparation. L'un sort de prison pour un accident mortel sur la piste, l'autre vise les sommets. Mais quand le passé resurgit, l'amour fraternel peut-il tout excuser ? "En Garde" bouleverse les certitudes...

Imaginez un instant : deux frères, unis par le sang et par une passion commune pour l’escrime, mais séparés par un drame implacable. L’un sort à peine de prison après avoir causé, accidentellement ou non, la mort d’un adversaire sur la piste. L’autre, un jeune talent prometteur, s’apprête à conquérir les championnats nationaux. Leur retrouvailles vont faire jaillir des étincelles, non seulement sur le terrain d’assaut, mais aussi au cœur de leur famille brisée. C’est là tout le pouvoir de séduction d’un film qui arrive en salles ce dernier jour de 2025.

En Garde : Quand l’Escrime Devient Métaphore d’un Drame Humain Profond

Ce long métrage, premier essai d’une réalisatrice singapourienne passionnée, transforme les salles d’armes en arènes psychologiques où chaque coup porté résonne bien au-delà du simple score. L’escrime au sabre, avec sa violence contenue et sa rapidité fulgurante, sert de fil conducteur à une histoire familiale complexe, pleine de non-dits et de secrets enfouis. Dès les premières minutes, on plonge dans un univers tendu, où les masques protecteurs cachent autant qu’ils révèlent les visages des protagonistes.

Le cadet, Zijie, incarné avec une sensibilité poignante par Liu Hsiu-fu, est un adolescent doué, concentré sur son entraînement et ses compétitions à venir. Il vit avec une mère veuve, qui tente de reconstruire sa vie loin des souvenirs douloureux. Puis arrive l’aîné, Zihan, joué par Tsao Yu-ning, dont la présence charismatique et inquiétante bouleverse tout. Libéré plus tôt que prévu après sept années derrière les barreaux, il propose secrètement d’entraîner son frère. Une aide précieuse ? Ou le début d’une emprise plus sombre ?

Ce qui frappe d’emblée, c’est la maîtrise avec laquelle le film alterne entre les séquences explosives sur la piste et les moments de calme oppressant dans la vie quotidienne. Les cris et les impacts métalliques des assauts contrastent avec les silences lourds des discussions familiales. Une dualité qui reflète parfaitement les dynamiques internes des personnages.

Une Réalisatrice Qui Maîtrise Son Sujet sur le Bout de la Lame

Derrière la caméra, une ancienne championne de sabre qui a représenté Singapour aux Jeux Asiatiques de 2010. Après avoir rangé son arme, elle s’est tournée vers des études de cinéma à New York, avant de réaliser plusieurs courts métrages remarqués. Pour son premier long, elle puise dans son expérience personnelle pour tisser un récit authentique.

Elle explique souvent que l’escrime est pour elle « comme jouer aux échecs avec des épées ». Une question permanente de stratégie, d’anticipation des mouvements de l’adversaire. Cette vision transparaît à l’écran : chaque assaut est chorégraphié avec précision, mais aussi chargé d’émotions. Les touches ne sont pas seulement physiques ; elles symbolisent les blessures invisibles que s’infligent les membres d’une famille.

Inspirée par des réalisateurs comme Ang Lee, elle admire particulièrement la façon dont il capture l’intensité des relations humaines. Ici, elle applique cette influence à un sport qu’elle connaît intimement, créant des scènes d’escrime d’un réalisme saisissant. Pas de ralentis hollywoodiens excessifs, mais une immersion totale dans le rythme effréné du sabre.

« L’escrime reflétait bien l’intensité des dynamiques familiales. Les scènes tendues étaient calmes, contrastant avec les assauts bruyants et pleins de cris. »

Cette citation illustre parfaitement l’approche choisie : utiliser le sport comme miroir des tourments intérieurs.

Le Sabre : Une Arme Parfaite pour Explorer la Violence Contenue

Parmi les trois armes de l’escrime – fleuret, épée et sabre –, c’est cette dernière qui domine le film. Et pour cause : le sabre est l’arme la plus « brutale ». On touche non seulement avec la pointe, mais aussi avec le tranchant de la lame. La surface valable couvre tout le haut du corps, y compris la tête et les bras. Historiquement liée à la cavalerie, elle autorise des coups plus directs, plus agressifs.

Les règles de priorité ajoutent une couche stratégique : l’attaquant a l’avantage, encourageant un jeu offensif. Une parade-riposte peut renverser la situation, mais tout se joue en fractions de seconde. Cette rapidité miroir les explosions émotionnelles dans la fratrie : un mot de trop, un geste ambigu, et tout bascule.

Dans le film, les entraînements secrets entre les frères deviennent des moments de complicité, mais aussi de tension croissante. Zihan pousse Zijie à ses limites, sous prétexte de le préparer aux compétitions. Mais est-ce vraiment pour son bien ? Le doute s’installe progressivement, rendant chaque séquence d’escrime haletante.

Les particularités du sabre en bref :

  • Touches avec pointe ou tranchant
  • Surface valable : tout au-dessus de la ceinture (tête, torse, bras)
  • Règle de priorité favorisant l’attaque
  • Interdiction du croisement de jambes pour plus de fluidité

Ces éléments font du sabre l’arme la plus spectaculaire et la plus imprévisible.

Un Thriller Psychologique Qui Joue avec Nos Certitudes

Au-delà du sport, le cœur du récit bat autour de la relation fraternelle. Zijie idéalise son grand frère, refusant de croire à sa culpabilité passée. Zihan, lui, oscille entre tendresse protectrice et comportements troublants. Le film maintient habilement l’ambiguïté : accident ou acte délibéré ? Amour inconditionnel ou manipulation ?

Les performances des deux acteurs principaux portent cette nuance. Liu Hsiu-fu, avec ses yeux expressifs, transmet la vulnérabilité et l’admiration du cadet. Tsao Yu-ning, quant à lui, incarne un charisme magnétique teinté d’ombre, rendant Zihan à la fois attachant et effrayant.

La mère, interprétée par une actrice expérimentée, ajoute une couche supplémentaire : elle tente d’effacer le passé, protégeant son fils cadet au prix du déni. Ces interactions familiales, filmées en plans serrés, accentuent le sentiment de claustrophobie.

Le scénario explore des thèmes profonds : la loyauté aveugle, les traumas non résolus, la frontière entre amour et toxicité. Inspiré en partie d’expériences personnelles de la réalisatrice autour des liens familiaux complexes, il touche une corde universelle.

Des Récompenses Qui Confirment un Talent Émergent

Présenté dans plusieurs festivals internationaux, le film a rapidement attiré l’attention. Grand Prix du jury dans un festival français prestigieux, prix de la mise en scène à Karlovy Vary : ces distinctions soulignent une réalisation aboutie pour un premier long métrage.

Les critiques saluent souvent la tension maintenue jusqu’à un final choc, qui laisse le spectateur troublé. Certains évoquent un thriller nébuleux, d’autres une fable douce-amère sur la fraternité. Quoi qu’il en soit, l’œuvre ne laisse pas indifférent.

L’Escrime au Cinéma : Une Tradition Richissime

L’escrime a toujours fasciné les cinéastes. Des classiques de cape et d’épée avec Errol Flynn aux duels mémorables dans « The Princess Bride » ou « Pirates des Caraïbes », elle symbolise l’honneur, la ruse et l’élégance. Plus récemment, des films comme « Le Maître d’escrime » ont exploré son aspect éducatif et résistant face à l’oppression.

Ici, l’approche est moderne et introspective. Pas de mousquetaires ni de pirates, mais des adolescents taïwanais confrontés à leurs démons. L’escrime n’est plus spectacle pur, mais outil narratif pour disséquer les relations humaines.

D’autres œuvres ont utilisé le sport comme métaphore : rivalités fraternelles dans des drames sportifs, ou pression psychologique dans des compétitions de haut niveau. Mais rarement avec une telle fusion entre authenticité technique et profondeur émotionnelle.

Film Année Thème principal avec escrime
Les Duellistes 1977 Obsession et honneur
Le Maître d’escrime 2015 Résistance et éducation
The Fencer 2015 Inspiration historique

Pourquoi Aller Voir Ce Film en Salle ?

En cette fin d’année, alors que les salles proposent souvent des blockbusters festifs, ce film offre une alternative introspective et intense. Parfait pour ceux qui aiment les récits qui grattent sous la surface, qui posent des questions sans imposer de réponses tranchées.

Les amateurs d’escrime y trouveront des scènes fidèles et excitantes. Les autres découvriront un sport méconnu, tout en étant emportés par un drame humain universel. La bande-son, alternant silences pesants et cliquetis des lames, renforce l’immersion.

Enfin, c’est l’occasion de soutenir un cinéma asiatique émergent, porté par une voix féminine forte. Une réalisatrice qui, par son parcours unique – du podium sportif à la caméra –, apporte une fraîcheur bienvenue.

En sortant de la salle, une question persiste : l’amour fraternel peut-il tout pardonner ? Ou existe-t-il des limites, même pour les liens les plus sacrés ? Ce film, par sa finesse et son audace, nous invite à y réfléchir longtemps après le générique.

Avec une durée contenue et un rythme maîtrisé, il captive du début à la fin. Une réussite qui promet un bel avenir à sa créatrice et laisse espérer d’autres explorations aussi pertinentes du sport comme miroir de l’âme humaine.

Si vous cherchez une expérience cinématographique qui allie adrenaline sportive et profondeur psychologique, ne manquez pas cette perle rare en cette fin 2025.

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