En cette froide journée de novembre en Ukraine, l’ingénieur Dmytro et son équipe s’activent fébrilement dans leur centrale électrique, fraîchement endommagée par un énième bombardement russe. Malgré le danger et les conditions extrêmes, une mission cruciale les anime : rétablir au plus vite le chauffage pour les localités voisines menacées par le gel.
Car en cette période hivernale, la privation d’électricité et de chauffage fait plus que jamais office d’arme pour la Russie, déterminée à saper le moral des Ukrainiens. Kiev accuse ainsi Moscou d’avoir intensifié ces dernières semaines ses attaques contre les infrastructures énergétiques du pays, plongeant des centaines de milliers de civils dans le noir et le froid mordant.
Le fardeau des « réparateurs de l’ombre »
Face à cette guerre de l’énergie, des travailleurs de l’ombre comme Dmytro et ses collègues se démènent sans relâche pour remettre en état les centrales endommagées et restaurer l’approvisionnement. Un véritable combat contre la montre sous haute pression, dans des conditions souvent précaires et périlleuses.
Selon l’opérateur national Ukrenergo, la Russie aurait mené depuis janvier dernier pas moins de 11 attaques massives contre le réseau électrique civil ukrainien. DTEK, le fournisseur d’énergie qui a ouvert les portes d’une de ses centrales touchées à des journalistes de l’AFP, déplore quant à lui près de 200 attaques contre ses installations depuis le début de l’invasion. Des frappes qui auraient endommagé 90% de ses capacités de production.
Des « héros ordinaires » au péril de leur vie
Au fil des attaques incessantes, le bilan humain s’alourdit également pour DTEK. En près de trois ans d’offensive russe, trois employés de la compagnie ont perdu la vie et 56 autres ont été blessés dans l’exercice périlleux de leur fonction. Des « héros ordinaires » conscients de l’importance vitale de leur mission, qui n’hésitent pas à risquer leur vie pour maintenir l’approvisionnement en électricité et en chaleur.
Vous ne pouvez pas laisser l’équipement seul. Tout le monde veut avoir de la lumière et de la chaleur chez soi.
Evgen, employé d’une centrale ukrainienne
Evgen en sait quelque chose. Lors de la dernière attaque contre sa centrale à l’aide d’armes à sous-munitions, il est resté à son poste dans la salle de contrôle pendant que ses collègues se mettaient à l’abri. Un choix courageux motivé par la volonté de maintenir coûte que coûte le fonctionnement des installations.
Garder espoir malgré la guerre de l’énergie
Dmytro, de son côté, n’a pas hésité à affronter seul un incendie sur le toit de son usine, sous la menace d’un effondrement. Un réflexe quasi « automatique » pour cet ingénieur de 41 ans qui a consacré toute sa vie à son métier. Un dévouement animé par la conscience aiguë de l’importance de son travail pour ses concitoyens.
Malgré les conditions extrêmes, le froid, la fatigue et l’angoisse permanente des bombardements, les « réparateurs de l’ombre » ukrainiens puisent leur force dans la solidarité et l’abnégation. Unis face à l’adversité, portés par le soutien de la population, ils s’accrochent à l’espoir que leur combat acharne portera ses fruits.
Une résistance héroïque face aux ténèbres et au froid imposés par la guerre de l’énergie russe. Car en redonnant lumière et chaleur à leurs compatriotes, ces travailleurs de l’ombre ne maintiennent pas seulement les infrastructures vitales du pays. Ils protègent aussi, à leur manière, la flamme indomptable de la résilience ukrainienne.