Après plusieurs années de baisse continue, le chômage est brutalement reparti à la hausse en France au cours des derniers mois. Un coup de froid inattendu sur le marché de l’emploi, qui suscite de vives inquiétudes sur les perspectives économiques du pays. Décryptage de ce retournement de tendance préoccupant.
Le chômage au plus bas, un lointain souvenir
Il y a encore quelques mois, le marché du travail français se portait au mieux. Le taux de chômage avait atteint son plus bas niveau depuis 40 ans, à 7,3% au quatrième trimestre 2022 selon l’INSEE. Les créations d’emplois s’enchaînaient à un rythme soutenu, avec 88 000 postes supplémentaires rien qu’au 3ème trimestre.
Mais ce tableau idyllique s’est brutalement assombri. Les derniers chiffres publiés par Pôle Emploi font état d’une augmentation de 3,9% du nombre de chômeurs sur un mois. Au total, 3 140 000 personnes sont désormais sans aucune activité en France. Un chiffre en très forte hausse, qui témoigne d’un net ralentissement du marché de l’emploi.
Les entreprises freinent les recrutements
Premier signe tangible de ce retournement : les entreprises ralentissent fortement leurs recrutements. Selon les dernières statistiques officielles, le nombre de contrats de plus d’un mois a diminué ces derniers mois. Les employeurs, inquiets de la conjoncture économique et des incertitudes politiques, préfèrent la prudence.
Beaucoup de nos adhérents ont gelé leurs embauches. Ils attendent d’y voir plus clair avant de se lancer dans de nouveaux recrutements
Un responsable d’organisation patronale
Ce coup de frein est d’autant plus préoccupant qu’il survient après une longue période favorable à l’emploi. Dopées par la reprise économique post-Covid et les mesures de soutien gouvernementales, les entreprises avaient fortement accru leurs effectifs ces deux dernières années. Un mouvement aujourd’hui grippé.
Perspectives moroses pour l’emploi
Et l’horizon semble plutôt bouché pour le marché du travail français. Selon la dernière note de conjoncture de l’INSEE, le chômage devrait encore progresser au cours des prochains mois. Les économistes tablent sur une hausse continue du nombre de demandeurs d’emploi en 2024, pour atteindre le chiffre de 3,5 millions en fin d’année.
Plusieurs facteurs expliquent ce retournement :
- Un contexte macroéconomique défavorable, avec une croissance atone et des tensions inflationnistes persistantes
- Des incertitudes politiques liées aux difficultés de l’exécutif à faire passer ses réformes, notamment celle des retraites
- Un ralentissement de l’activité dans plusieurs secteurs clés, comme l’automobile ou l’aéronautique
- Une frilosité des consommateurs, qui pèse sur la demande et donc sur les besoins en main d’œuvre
Autant d’éléments qui incitent les entreprises à la prudence et les poussent à geler leurs projets d’embauches. Un sérieux coup de froid sur un marché de l’emploi qui semblait pourtant avoir retrouvé des couleurs après la crise du Covid.
Le gouvernement en première ligne
Face à cette brusque dégradation, le gouvernement tente de réagir. Le ministre du Travail Olivier Dussopt a annoncé plusieurs mesures pour tenter d’enrayer la hausse du chômage :
- Renforcement des dispositifs d’accompagnement et de formation des demandeurs d’emploi
- Aides aux entreprises qui embauchent des chômeurs de longue durée
- Soutien aux secteurs les plus touchés par les difficultés, comme l’hôtellerie-restauration
Mais ces mesures seront-elles suffisantes pour inverser la tendance ? Rien n’est moins sûr, tant les vents contraires semblent puissants. Pour beaucoup d’économistes, seul un franc rebond de l’activité pourrait relancer durablement l’emploi. Un scénario qui semble hélas peu probable à court terme.
Quel avenir pour les chômeurs ?
Dans ce contexte morose, c’est un véritable coup dur pour les millions de chômeurs français qui voient leurs perspectives d’emploi s’assombrir. Après la parenthèse enchantée de 2021-2022, marquée par de nombreuses créations de postes, le marché du travail se referme comme une huître.
Pour les demandeurs d’emploi, c’est le retour à la case départ et à la galère des recherches infructueuses. Les secteurs qui recrutaient à tour de bras, comme la restauration ou le bâtiment, ont brutalement mis le holà. Trouver un poste relève à nouveau du parcours du combattant.
J’ai postulé à des dizaines d’offres ces dernières semaines, sans aucun retour positif. C’est vraiment décourageant. J’ai l’impression de revenir trois ans en arrière, quand décrocher un entretien était déjà une victoire en soi.
Julien, au chômage depuis 6 mois
Un sentiment d’impuissance et de fatalisme qui gagne de nombreux chômeurs, à mesure que leurs efforts restent vains. Beaucoup en sont réduits à accepter des petits boulots précaires, faute de mieux. D’autres sombrent dans le découragement et renoncent même à chercher du travail.
Un avenir incertain
Le brutal coup de froid sur l’emploi sonne comme un cruel rappel à la réalité pour le marché du travail français. Après une embellie inespérée post-Covid, le chômage repart nettement à la hausse, plombé par un contexte économique et politique défavorable.
Les entreprises ont stoppé net leurs velléités d’embauches face aux incertitudes, au risque de casser la fragile dynamique de créations d’emplois. Et les perspectives restent sombres, avec une activité atone et une confiance en berne.
Pour les millions de chômeurs, c’est un véritable coup dur qui obscurcit encore davantage leur horizon professionnel. Après une brève embellie, les voilà replongés dans la précarité et les affres de la recherche d’emploi.
Le gouvernement a beau tenter de colmater les brèches, le navire « emploi » prend dangereusement l’eau. Sans sursaut économique rapide, le chômage risque de continuer sa course folle dans les mois à venir et de plomber durablement le bilan du second quinquennat Macron. Une menace de plus pour un exécutif déjà empêtré dans de multiples crises.
