À quelques semaines des élections fédérales allemandes, la polémique enfle autour d’Elon Musk. Le milliardaire propriétaire du réseau social X (ex-Twitter) a publiquement affiché son soutien au parti d’extrême droite AfD (Alternative für Deutschland), suscitant l’indignation de nombreux responsables européens, au premier rang desquels Thierry Breton. L’ancien commissaire européen n’a pas mâché ses mots, qualifiant ce soutien d' »ingérence étrangère » dans le scrutin allemand.
Musk soutient l’AfD, Breton crie à l’ingérence
Vendredi matin, en réaction à une vidéo d’une jeune youtubeuse allemande proche de l’AfD, Elon Musk déclarait sur X : « Seule l’AfD peut sauver l’Allemagne ». Un message vu près de 50 millions de fois en l’espace de 3 jours. Immédiatement, Thierry Breton a interpellé les dirigeants des institutions européennes :
À quelques semaines des élections en Allemagne et au moment de l’odieux attentat de Magdebourg, Elon Musk, le plus grand influenceur mondial sur X et membre potentiel de l’administration américaine, soutient ouvertement le parti d’extrême droite AfD. Ce n’est pas la définition même de l’ingérence étrangère ?
Thierry Breton, ancien commissaire européen, sur X
L’ancien ministre français de l’Économie fait ici référence à l’attentat survenu au marché de Noël de Magdebourg le jour même, rappelant le contexte tendu dans lequel intervient cette prise de position de Musk. Il appelle à appliquer fermement le Digital Services Act européen (DSA) pour contrer ce type d’influence.
Vif échange entre les deux hommes
La réponse d’Elon Musk ne s’est pas fait attendre. Piqué au vif, le fantasque entrepreneur a répliqué avec ironie et provocation :
Mec, l’ingérence américaine est la seule raison pour laquelle vous ne parlez pas allemand ou russe aujourd’hui.
Elon Musk, en réponse à Thierry Breton sur X
Une allusion au rôle des États-Unis lors de la Seconde Guerre mondiale qui a ulcéré de nombreux internautes européens. Ces derniers mois, les passes d’armes entre Musk et Breton se sont multipliées, l’ancien commissaire européen s’inquiétant régulièrement du manque de modération sur X depuis son rachat par le milliardaire américain.
Inquiétudes sur l’algorithme de X
Au-delà de la polémique, ce sont surtout les soupçons de modification de l’algorithme de X qui inquiètent. Depuis le rachat par Musk, de nombreux observateurs soulignent que les messages publiés par le milliardaire bénéficieraient d’une visibilité artificiellement dopée. Si cela s’avérait exact, la moindre de ses prises de position, comme ce soutien à l’AfD, constituerait une véritable ingérence électorale compte tenu de sa position d’actionnaire majoritaire.
La Commission européenne a d’ailleurs ouvert en juillet une enquête sur X pour plusieurs infractions présumées au DSA. Mais aucune investigation sur la structure de l’algorithme n’est prévue à ce stade. La très grande proximité affichée entre Elon Musk et Donald Trump, qui s’apprête à retrouver la Maison Blanche, suscite une certaine gêne à Bruxelles.
L’Allemagne veut serrer la vis
Outre-Rhin, on semble vouloir prendre les devants. Le gouvernement fédéral envisage de durcir rapidement la législation pour empêcher ce type d’ingérences via les réseaux sociaux. Plusieurs responsables politiques de premier plan ont dénoncé l’attitude irresponsable d’Elon Musk :
Nous ne pouvons pas laisser les élections être influencées de l’étranger via des plateformes comme X. Il est grand temps de réguler fermement ces acteurs qui pèsent sur nos processus démocratiques sans la moindre légitimité.
Un ministre fédéral allemand qui a requis l’anonymat
L’enjeu est de taille à quelques semaines d’un scrutin qui s’annonce serré. L’AfD est créditée d’environ 20% d’intentions de vote dans les sondages et pourrait devenir la 3ème force politique au Bundestag. Un appui comme celui apporté publiquement par Musk pourrait faire pencher la balance en sa faveur.
Pression maximale sur Bruxelles
Face à ces inquiétudes, la pression monte sur les institutions européennes pour qu’elles agissent vite et fort. De nombreux eurodéputés réclament des mesures d’urgence pour empêcher toute ingérence extérieure massive dans les scrutins à venir, à commencer par les élections allemandes :
Le temps presse, nous devons envoyer un signal clair aux GAFAM et assimilés. Bruxelles doit se doter des moyens de faire respecter notre souveraineté démocratique face aux milliardaires qui se croient tout permis.
Une eurodéputée écologiste allemande
Certains vont jusqu’à demander la suspension pure et simple de X dans l’UE jusqu’aux élections si des garanties ne sont pas apportées par son propriétaire. Mais une telle décision semble peu probable à ce stade. La Commission assure suivre le dossier de près et promet d’agir « avec détermination » si des infractions au DSA étaient constatées.
Au cœur de la tourmente, Elon Musk semble pour l’instant décidé à camper sur ses positions, affirmant qu’il est dans son droit le plus strict d’exprimer ses opinions politiques. La polémique ne devrait pas retomber de sitôt et risque de pimenter encore un peu plus la fin de campagne en Allemagne. Au grand dam de Bruxelles qui aimerait que le scrutin se déroule dans un climat apaisé.