Un nouveau rebondissement vient de marquer la vie politique togolaise. Selon un décret présidentiel publié vendredi soir, les premières élections sénatoriales, initialement prévues pour le 2 février 2025, ont été reportées au 15 février. Une décision justifiée par la volonté de « permettre aux acteurs politiques de mieux s’organiser » mais qui soulève de nombreuses questions sur l’avenir politique du pays.
Le Sénat, une institution clé de la nouvelle Constitution
L’élection des sénateurs constitue en effet l’une des dernières étapes vers la mise en place de la nouvelle Constitution togolaise. Un texte fondamental qui fait l’objet de vives critiques de la part de l’opposition et de la société civile, qui y voient un moyen pour le président Faure Gnassingbé de renforcer et de pérenniser son pouvoir.
Institué par une révision constitutionnelle en 2002 mais jamais mis en place jusqu’à présent, le Sénat togolais doit compter 61 membres. 41 d’entre eux seront élus par les conseillers régionaux et municipaux, tandis que les 20 autres seront désignés directement par le président du Conseil des ministres.
L’opposition dénonce un « coup d’État constitutionnel »
Sans surprise, ce report des élections sénatoriales a été vivement critiqué par les principaux partis d’opposition. Des « poids lourds » comme l’Alliance Nationale pour le Changement (ANC) ont ainsi annoncé leur intention de boycotter ce scrutin, qu’ils considèrent comme une étape supplémentaire dans « un processus de coup d’État constitutionnel en cours ».
Car au-delà de l’élection des sénateurs, c’est bien la nouvelle Constitution dans son ensemble qui cristallise les tensions. En abolissant l’élection du président au suffrage universel au profit d’un régime parlementaire, ce nouveau texte est vu par ses détracteurs comme un moyen pour Faure Gnassingbé, au pouvoir depuis 2005 après avoir succédé à son père, de se maintenir indéfiniment à la tête du pays.
Le parti présidentiel largement majoritaire
Dans ce contexte, le report des élections sénatoriales apparaît comme une manœuvre supplémentaire pour consolider le pouvoir en place. D’autant que le parti présidentiel UNIR dispose d’une écrasante majorité à l’Assemblée nationale depuis les dernières législatives d’avril 2024, avec 108 sièges sur 113.
Reste à savoir si ce délai supplémentaire permettra réellement à « tous les acteurs politiques de mieux s’organiser », comme l’affirme le décret présidentiel, ou s’il ne fera que renforcer un peu plus les clivages et les tensions qui minent la vie politique togolaise depuis de nombreuses années.
Aperçu des prochaines étapes
- 30 janvier 2025 : Ouverture de la campagne électorale
- 13 février 2025 (23h59) : Clôture de la campagne
- 15 février 2025 : Élections sénatoriales (41 sénateurs élus, 20 désignés par le président)
- Mise en place des institutions prévues par la nouvelle Constitution
Au-delà de l’enjeu des élections sénatoriales, c’est donc l’avenir même de la démocratie togolaise qui se joue dans les semaines et mois à venir. Un avenir qui s’annonce d’ores et déjà sous haute tension, entre un pouvoir qui semble déterminé à verrouiller le jeu politique et une opposition qui dénonce un processus antidémocratique et appelle à la mobilisation populaire.