L’Irlande se prépare à vivre des élections législatives décisives le 29 novembre prochain. Après trois semaines d’une campagne éclair, les électeurs sont appelés à renouveler les 174 députés du Dail, la chambre basse du parlement irlandais. Des scrutins qui s’annoncent dominés par les questions économiques et sociales, en particulier la grave crise du logement qui frappe le pays.
Le centre droit en position de force malgré une poussée de la gauche
Selon les derniers sondages, le parti de centre droit Fine Gael, actuellement au pouvoir, est en bonne position pour décrocher un quatrième mandat consécutif. Le jeune premier ministre Simon Harris, 37 ans, a su redonner un nouveau souffle à sa formation politique. En 2020, le Fine Gael avait dû s’allier avec un autre parti centriste, le Fianna Fail, ainsi que les Verts, pour former un gouvernement de coalition.
Mais le Sinn Fein, le grand parti de gauche dirigé par Mary Lou McDonald, talonne désormais le Fine Gael dans les enquêtes d’opinion. Ancien bras politique de l’IRA, le Sinn Fein a fait campagne en se positionnant comme la seule véritable alternative au statu quo incarné par les deux partis modérés qui dominent la scène politique irlandaise depuis un siècle.
Pénurie de logements et inflation au cœur des préoccupations
Si l’économie irlandaise affiche une bonne santé, avec des excédents budgétaires et un faible taux de chômage, la crise du logement et la hausse du coût de la vie sont les principaux sujets de préoccupation des électeurs. Le pays fait face à une pénurie chronique de logements neufs alors que sa population augmente rapidement.
Les loyers ont explosé de près de 70% entre 2010 et 2021, plaçant Dublin parmi les capitales les plus chères de l’Union européenne. Deux tiers des jeunes de 25-29 ans vivent encore chez leurs parents, faute de pouvoir accéder à la propriété ou à la location. Les gouvernements successifs ont échoué à endiguer cette crise immobilière.
Il y a une pénurie massive de nouveaux logements en construction, alors que la population augmente rapidement.
Gail McElroy, professeure de sciences politiques à Trinity College Dublin
L’immigration, un nouveau thème de campagne
Pour la première fois, l’immigration s’est imposée comme un sujet majeur dans le débat électoral irlandais. L’an dernier, le solde migratoire a atteint un niveau record avec un gain net de population de 79 000 personnes, du jamais vu depuis 2007. Cette arrivée massive de nouveaux habitants est pointée du doigt comme un facteur aggravant de la pénurie de logements.
La question migratoire s’est invitée dans la campagne après des émeutes anti-immigrés survenues il y a un an, déclenchées par une agression au couteau devant une école. Un fait divers qui a cristallisé les tensions dans un pays jusqu’ici plutôt ouvert et tolérant.
Un scrutin à l’issue incertaine
À quelques jours du vote, l’issue du scrutin reste très incertaine. Le Fine Gael part favori pour arriver en tête mais aura probablement besoin de s’allier à nouveau avec le Fianna Fail, en raison du mode de scrutin à vote unique transférable particulièrement complexe. Les deux partis centristes ont déjà exclu de gouverner avec le Sinn Fein.
L’économie florissante de l’Irlande, portée par les investissements étrangers et les recettes fiscales des multinationales américaines de la tech et de la pharma, sera un autre enjeu clé du vote. De nombreux Irlandais s’inquiètent d’un retour de Donald Trump à la Maison Blanche qui pourrait fragiliser ce modèle de développement.
Les premiers résultats partiels seront connus au lendemain du scrutin mais il faudra sans doute patienter plusieurs jours avant de découvrir la composition définitive du prochain parlement irlandais. Une seule certitude : le suspense est entier pour savoir qui dirigera le prochain gouvernement.