À quelques semaines des élections législatives au Kosovo, la Commission électorale de ce pays a pris une décision qui fait grand bruit. Lors d’une réunion ce lundi, elle a en effet rejeté la candidature de la Liste serbe, le principal parti politique représentant la minorité serbe. Cette formation qui détient actuellement les 10 sièges réservés à la communauté serbe au Parlement kosovar, se voit ainsi interdite de participer au scrutin de février.
Des accusations de liens trop étroits avec Belgrade
Selon certains membres de la Commission électorale, le rejet de la candidature de la Liste serbe est motivé par la proximité jugée excessive de ce parti avec les autorités de Belgrade. Sami Kurteshi, un des commissaires ayant voté contre, a expliqué :
Les représentants de cette liste entretiennent un contact permanent avec le gouvernement du président serbe Aleksandar Vucic. Je ne peux pas lever la main et voter pour un parti qui ouvertement ne reconnaît pas l’État du Kosovo.
La décision de la CEC n’est toutefois pas définitive, la Liste serbe ayant la possibilité de faire appel. Mais elle illustre les vives tensions persistantes entre Pristina et la minorité serbe, 15 ans après la proclamation d’indépendance du Kosovo, non reconnue par la Serbie.
Des réactions internationales contrastées
Sans surprise, la Serbie a immédiatement dénoncé le rejet de la candidature du parti serbe. Le président Aleksandar Vucic a accusé son homologue kosovar Albin Kurti de vouloir « éliminer l’unique opposant politique » et « nettoyer le peuple serbe » du Kosovo.
Mais cette décision a aussi suscité l’inquiétude des partenaires occidentaux du Kosovo. L’ambassade américaine à Pristina, un des principaux alliés de l’ancienne province serbe, a exprimé sa « profonde inquiétude », estimant qu’une telle action « sape les principes démocratiques fondamentaux pour des élections libres et équitables ».
De son côté, l’Union européenne, qui chapeaute le dialogue entre Belgrade et Pristina, a aussi critiqué ce rejet de candidature. Une porte-parole de la diplomatie européenne a appelé les autorités kosovares à « créer les conditions pour la participation de tous les partis aux élections ».
Vers une nouvelle crise politique ?
Cette controverse autour de la Liste serbe intervient dans un contexte déjà tendu entre le gouvernement kosovar d’Albin Kurti et la minorité serbe, qui se plaint régulièrement de discriminations. En novembre dernier, les maires serbes du nord du Kosovo avaient démissionné en bloc pour protester contre une décision de Pristina jugée hostile.
Nombre d’observateurs craignent qu’en l’absence du principal parti serbe, perçu comme modéré malgré sa proximité avec Belgrade, les élections de février ne renforcent les franges les plus radicales de la communauté et n’exacerbent les tensions interethniques. Une perspective inquiétante pour la stabilité du Kosovo et de la région.
Sauf rebondissement, les élections législatives anticipées devraient bien se tenir le 14 février prochain au Kosovo. Mais le rejet de la Liste serbe risque de compliquer un peu plus le processus de normalisation entre Pristina et Belgrade, pourtant crucial pour leurs aspirations européennes communes.