C’est dans une étonnante discrétion que se déroule actuellement la campagne pour la désignation du prochain bâtonnier de Paris. Un scrutin essentiel puisqu’il s’agit de choisir celui ou celle qui dirigera, pour 2026 et 2027, l’un des barreaux les plus importants et influents au monde, au même titre que ceux de Londres ou New York.
Quatre binômes en compétition
Pour prendre en main le destin des quelque 34 000 avocats parisiens, ils sont cette année quatre duos à se présenter devant les urnes. Car désormais, la règle est claire : plus aucun candidat ne se lance seul dans la course au bâtonnat. Chaque « ticket » se compose ainsi d’un aspirant bâtonnier et d’un vice-bâtonnier, avec pour objectif affiché une stricte parité homme-femme. Un impératif à l’heure où 70% des nouvelles recrues de la profession sont des avocates.
Deux favoris se détachent
Si le scrutin reste ouvert, deux équipes semblent partir favorites selon des sources proches du dossier. La première représenterait davantage la tradition du barreau français, quand la seconde serait davantage issue de la sphère des grands cabinets d’affaires anglo-saxons, de plus en plus présents et puissants à Paris.
Mais dans les coulisses du Palais de Justice, d’autres enjeux se dessinent : quelle place pour les jeunes avocats ? Comment accompagner la transformation numérique de la profession ? Quelle position adopter face à des réformes de la justice parfois controversées ?
Un premier tour le 10 décembre
Si les candidats restent discrets sur leurs programmes, le calendrier lui est connu. Le premier tour de ce scrutin déterminant aura lieu le 10 décembre prochain. Si aucun binôme ne l’emporte avec une majorité absolue, un second tour aura lieu deux jours plus tard. De quoi assurer, avant les fêtes et la nouvelle année, une transition en douceur à la tête de ce barreau atypique et emblématique.
Le bâtonnier, une fonction prestigieuse
Car le rôle du bâtonnier de Paris n’est pas une sinécure. Au-delà de la gestion quotidienne de son Ordre et de la représentation de ses milliers de membres, il incarne aussi une certaine idée de la défense des libertés et des droits. Une mission quasi politique, en ces temps troublés.
Le bâtonnier de Paris, c’est un peu le porte-parole de la profession, de ses combats, de ses espoirs aussi. Une lourde responsabilité.
– Un avocat parisien souhaitant rester anonyme
Des enjeux multiples qui expliquent sans doute la plus grande professionnalisation des campagnes, calquées désormais sur celles des politiques. Tracts, réunions publiques, utilisation des réseaux sociaux… Tous les moyens sont bons pour convaincre les électeurs.
Le barreau de Paris, une institution en mutation
Au-delà des personnalités, c’est aussi l’avenir d’une institution multiséculaire qui se joue. Confronté à une concurrence internationale exacerbée, à une perte de repères de la jeune génération, et à la nécessaire adaptation aux nouvelles technologies, le barreau de Paris est à la croisée des chemins.
Être bâtonnier aujourd’hui, c’est avoir une vision pour demain. Notre profession traverse une zone de turbulences, il faut un cap clair.
– Un candidat préférant conserver l’anonymat à ce stade
Des turbulences qui pourraient aussi expliquer la discrétion entourant cette campagne. Comme si, face aux défis à relever, une certaine unité de façade restait de mise. Jusqu’au soir du 10 décembre au moins, date à laquelle les urnes auront parlé. Avec à la clé, pour le duo vainqueur, un mandat aussi prestigieux qu’exigeant, sur fond de révolution permanente de la profession d’avocat. Tout un symbole.