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Élection Cameroun : Biya Favori, Tchiroma Surprend

Le Cameroun vote : Paul Biya, favori après 43 ans de pouvoir, face à un Issa Tchiroma qui galvanise les foules. Un scrutin sous tension, mais que réserve le vote ?

Dans un pays où un seul homme domine la scène politique depuis plus de quatre décennies, le Cameroun s’apprête à vivre une élection présidentielle qui pourrait réserver des surprises. Dimanche, huit millions d’électeurs se rendront aux urnes pour choisir leur président dans un scrutin à un tour, où Paul Biya, âgé de 92 ans, part une fois de plus favori. Pourtant, un vent nouveau semble souffler avec l’émergence d’un rival inattendu, Issa Tchiroma Bakary, qui suscite un engouement populaire surprenant. Alors, ce scrutin marquera-t-il un tournant ou confirmera-t-il l’emprise d’un système bien rodé ?

Un scrutin sous haute tension au Cameroun

Le Cameroun, pays d’Afrique centrale riche en diversité mais confronté à des défis majeurs, se prépare pour une élection cruciale. Avec une population jeune – la moitié a moins de 20 ans – et des enjeux comme la pauvreté, le chômage et les tensions régionales, ce scrutin est scruté de près, tant au niveau local qu’international. Les bureaux de vote ouvriront de 8h à 18h, et les résultats définitifs, attendus d’ici le 26 octobre, pourraient dessiner l’avenir d’un pays où le pouvoir semble immuable.

Paul Biya : l’éternel favori

Depuis 1982, Paul Biya règne sans partage sur le Cameroun, faisant de lui le plus ancien chef d’État en exercice au monde. À 92 ans, il brigue un huitième mandat, fort d’un système politique qui a toujours assuré ses victoires, avec des scores dépassant les 70 % lors des dernières élections. Pourtant, sa campagne reste discrète.

Il ne faut pas être naïf, le système gouvernant dispose de nombreux moyens pour garantir des résultats en sa faveur.

Stéphane Akoa, politologue camerounais

Biya a fait une apparition publique rare à Maroua, dans l’Extrême-Nord, une région stratégique comptant 1,2 million d’électeurs. Mais son meeting, annoncé pour 25 000 personnes, n’a rassemblé qu’une foule clairsemée, un contraste frappant avec l’énergie de ses rivaux.

Issa Tchiroma : l’outsider qui électrise

Face à Biya, onze candidats tentent de défier l’ordre établi, mais l’un d’eux se démarque : Issa Tchiroma Bakary. Âgé de 79 ans, cet ancien ministre, qui a quitté le gouvernement en juin pour rejoindre l’opposition, a créé la surprise. Originaire de l’Extrême-Nord, il a galvanisé les foules lors d’un meeting à Maroua, où des milliers de partisans l’ont acclamé, brandissant des pancartes le qualifiant de « sauveur ».

Ce regain d’enthousiasme autour de Tchiroma reflète un désir de changement dans un pays où la jeunesse aspire à une nouvelle dynamique politique.

Sa campagne, marquée par des apparitions publiques dynamiques, contraste avec la discrétion de Biya. Tchiroma promet de rompre avec le statu quo, s’appuyant sur son expérience au sein du pouvoir pour séduire ceux qui doutent du système actuel.

Un contexte social et économique tendu

Le Cameroun fait face à des défis majeurs. Selon la Banque mondiale, 40 % de la population vivait sous le seuil de pauvreté en 2024, et le chômage touche 35 % des habitants des grandes villes. Les frustrations s’expriment sur les réseaux sociaux, où les Camerounais dénoncent le coût de la vie, le manque d’accès à l’eau potable, à la santé et à l’éducation.

Pourtant, les observateurs notent une mobilisation croissante des jeunes. « Beaucoup se sont inscrits pour voter et ont récupéré leur carte d’électeur », souligne Stéphane Akoa. Cette participation pourrait-elle bousculer l’ordre établi ? Rien n’est moins sûr, dans un pays où les manifestations d’ampleur restent rares.

Un processus électoral sous surveillance

Le scrutin est encadré par 55 000 observateurs, locaux et internationaux, dont des représentants de l’Union africaine. Des plateformes indépendantes prévoient de compiler les résultats pour garantir la transparence, une initiative critiquée par le gouvernement, qui y voit une tentative de manipulation.

Aspect Détails
Observateurs 55 000, incluant l’Union africaine
Date des résultats Au plus tard le 26 octobre
Électeurs 8 millions

Des organisations comme Human Rights Watch ont exprimé des doutes sur la crédibilité du processus, notamment après le rejet de la candidature de Maurice Kamto, principal opposant en 2018. Ce climat de méfiance alimente les tensions autour du scrutin.

Les régions anglophones : un scrutin sous l’ombre du conflit

Le vote se déroule dans un contexte marqué par le conflit dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest, où des groupes séparatistes s’opposent aux forces gouvernementales. En 2018, l’abstention y était massive, et la situation sécuritaire reste préoccupante, limitant l’accès aux urnes pour de nombreux habitants.

Ce conflit, qui a fait des milliers de victimes, illustre les fractures profondes du pays. Les électeurs de ces régions pourraient, une fois encore, être marginalisés, renforçant le sentiment d’exclusion.

Les jeunes : un espoir de changement ?

Avec une population majoritairement jeune, le Cameroun pourrait voir émerger une nouvelle dynamique. Les réseaux sociaux sont devenus un espace d’expression pour une génération qui rêve d’un avenir meilleur. Pourtant, comme le note Stéphane Akoa, cette mobilisation pourrait ne pas suffire à provoquer un soulèvement comparable à ceux observés ailleurs en Afrique.

  • Mobilisation accrue : Les jeunes récupèrent leurs cartes d’électeur.
  • Frustrations sociales : Cherté de la vie, manque d’accès aux services de base.
  • Expression en ligne : Les réseaux sociaux comme espace de contestation.

Cette élection, bien que dominée par la figure de Biya, pourrait donc être un test pour la jeunesse camerounaise. Leur participation, même limitée, envoie un signal : le désir de changement est là, tapi dans l’ombre.

Et après le vote ?

Les résultats, attendus dans les semaines à venir, seront cruciaux. Si Paul Biya l’emporte, comme le prédisent la plupart des observateurs, le statu quo risque de perdurer. Mais l’émergence d’Issa Tchiroma et la mobilisation des jeunes pourraient poser les bases d’une opposition plus structurée à l’avenir.

Dans un pays où les défis sont nombreux – pauvreté, chômage, conflit anglophone –, cette élection est bien plus qu’un simple scrutin. Elle est le reflet d’un Cameroun en quête d’identité, entre un passé immuable et un avenir incertain. Le vote de dimanche pourrait-il marquer le début d’un renouveau ? Seule l’histoire nous le dira.

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