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Élection au Cameroun : Biya Réélu, Tensions à l’Horizon

Paul Biya réélu président du Cameroun avec 53,66% des voix, mais l’opposant Issa Tchiroma revendique la victoire et appelle à manifester. Que réserve l’avenir au pays ?

Le 12 octobre 2025, le Cameroun a vécu un moment décisif avec l’élection présidentielle, un scrutin qui a une fois de plus placé le pays sous les projecteurs internationaux. À 92 ans, Paul Biya, président depuis 1982, a été proclamé vainqueur pour un huitième mandat. Mais ce résultat, loin d’apaiser les tensions, a ravivé les passions et les contestations. Alors que les chiffres officiels attribuent 53,66% des suffrages à Biya, l’opposant Issa Tchiroma revendique une victoire écrasante et appelle à des manifestations. Que se passe-t-il au Cameroun, et quelles pourraient être les conséquences de ce scrutin controversé ?

Un scrutin sous haute tension

Le Cameroun, nation d’Afrique centrale riche en diversité culturelle, est dirigé par Paul Biya depuis plus de quatre décennies. Ce dernier, considéré comme le plus vieux chef d’État en exercice au monde, a remporté l’élection avec un score de 53,66%, selon le Conseil constitutionnel. Ce résultat, annoncé le 27 octobre 2025, n’a surpris personne dans un pays où le système politique est souvent critiqué pour son manque de transparence. Pourtant, le scrutin de cette année s’est révélé plus serré que prévu, avec une participation de 46,31% et une opposition qui a su mobiliser.

Issa Tchiroma Bakary, ancien ministre et figure de l’opposition, a créé la surprise en obtenant 35,19% des voix, selon les chiffres officiels. Ce score, bien que significatif, n’a pas suffi à détrôner Biya. Cependant, Tchiroma conteste ces résultats, affirmant avoir recueilli 54,8% des suffrages contre 31,3% pour le président sortant. Cette revendication a enflammé ses partisans, qui sont descendus dans les rues pour défendre ce qu’ils considèrent comme leur victoire.

Une opposition galvanisée

L’opposant Issa Tchiroma, figure charismatique et déterminée, a su fédérer une partie importante de la population. Son appel à des marches pacifiques pour contester les résultats a mobilisé des milliers de personnes, notamment dans la capitale économique, Douala. Ces manifestations, bien que présentées comme non violentes, ont rapidement dégénéré. À Douala, quatre personnes ont perdu la vie lors d’affrontements avec les forces de sécurité, qui ont utilisé des gaz lacrymogènes et, selon certains témoins, des tirs à balles réelles.

Nous ne pouvons pas accepter des résultats falsifiés. Le peuple camerounais mérite la vérité.

Issa Tchiroma, leader de l’opposition

Cette déclaration, prononcée lors d’un discours enflammé, reflète le sentiment d’une partie de la population qui se sent lésée par un système électoral perçu comme biaisé. Les accusations de fraude ne sont pas nouvelles au Cameroun, où les élections sont régulièrement entachées de soupçons d’irrégularités.

Une réponse sécuritaire musclée

Face à la montée des tensions, les autorités camerounaises ont adopté une posture sécuritaire stricte. À Yaoundé, la capitale politique, des patrouilles de police et de gendarmerie ont été déployées aux principaux carrefours. Des véhicules blindés stationnent dans les zones jugées sensibles, tandis que les rassemblements publics ont été interdits dans plusieurs grandes villes. Cette réponse musclée vise, selon les autorités, à garantir la sécurité et à éviter tout débordement.

Dans les quartiers populaires de Yaoundé, l’ambiance est tendue. De nombreuses boutiques et stations-service sont restées fermées, par crainte de violences. Les transports en commun fonctionnent au ralenti, et la circulation, habituellement chaotique, est devenue étrangement fluide. Cette atmosphère pesante illustre l’incertitude qui plane sur le pays.

Chiffres clés du scrutin :

  • Participation : 46,31%
  • Paul Biya : 53,66% des voix
  • Issa Tchiroma : 35,19% des voix
  • Cabral Libii : 3,41% des voix
  • Bello Bouba Maïgari : 2,45% des voix
  • Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya : 1,66% des voix

Un pays sous pression

Le Cameroun, indépendant depuis 1960, a connu seulement deux présidents depuis cette date. Paul Biya, qui a succédé à Ahmadou Ahidjo, a consolidé son pouvoir en réprimant toute opposition et en s’appuyant sur un système politique centralisé. Ce long règne a permis une certaine stabilité, mais au prix d’une répression systématique des voix dissidentes. Les critiques pointent du doigt un régime qui aurait verrouillé le système électoral pour garantir la pérennité de Biya au pouvoir.

En parallèle, le pays fait face à de multiples défis. Depuis 2016, un conflit séparatiste dans les régions anglophones du Nord-Ouest et du Sud-Ouest a fait des milliers de morts et déplacé des centaines de milliers de personnes. Ce conflit, combiné à des difficultés économiques et à une jeunesse de plus en plus frustrée, alimente un sentiment de désillusion face au pouvoir en place.

Les autres candidats : une opposition fragmentée

Outre Issa Tchiroma, d’autres figures de l’opposition ont tenté leur chance lors de ce scrutin. Cabral Libii, jeune leader populaire, a obtenu 3,41% des voix, tandis que Bello Bouba Maïgari a recueilli 2,45%. Hermine Patricia Tomaïno Ndam Njoya, unique femme candidate, a terminé avec 1,66% des suffrages. Ces résultats, bien que modestes, montrent une opposition diverse mais fragmentée, incapable pour l’instant de s’unir face au mastodonte politique qu’est Paul Biya.

La faible performance des autres candidats reflète également les défis structurels auxquels l’opposition est confrontée : manque de ressources, accès limité aux médias, et un système électoral perçu comme favorisant le parti au pouvoir. Pourtant, l’émergence de figures comme Tchiroma ou Libii montre une volonté croissante de changement au sein de la population.

Vers un avenir incertain

L’annonce des résultats a exacerbé les tensions, et les appels de Tchiroma à manifester pourraient encore faire monter la pression. Les quatre décès à Douala rappellent les risques de dérapage dans un pays où les manifestations sont souvent réprimées avec force. Alors que le Cameroun se trouve à un carrefour, plusieurs questions se posent : les manifestations resteront-elles pacifiques ? Le gouvernement optera-t-il pour le dialogue ou la répression ? Et surtout, quel avenir pour un pays dirigé par un homme de 92 ans ?

Pour beaucoup, ce scrutin n’est qu’un symptôme d’un problème plus profond : un système politique qui peine à se renouveler. La jeunesse camerounaise, confrontée au chômage et à l’insécurité, aspire à un changement radical. Mais face à un pouvoir solidement ancré, la route vers une transition démocratique semble semée d’embûches.

Pourquoi ce scrutin est-il crucial ?

  • Il met en lumière les tensions entre un pouvoir établi et une opposition renaissante.
  • Les violences à Douala soulignent les risques d’escalade.
  • La faible participation (46,31%) reflète une désaffection pour le processus électoral.
  • Le conflit anglophone et les défis économiques amplifient l’enjeu politique.

En conclusion, l’élection de 2025 au Cameroun, bien que marquée par la réélection de Paul Biya, a révélé une société profondément divisée. Les contestations d’Issa Tchiroma et les violences qui ont suivi montrent que le pays est à un tournant. Reste à savoir si cette élection sera le catalyseur d’un changement ou le prolongement d’un statu quo qui dure depuis des décennies. Une chose est sûre : les regards sont tournés vers le Cameroun, où chaque jour pourrait apporter son lot de surprises.

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