La ville serbe de Novi Sad est en deuil et sous le choc. Vendredi dernier, un drame épouvantable s’est produit lorsqu’un auvent en béton de la gare s’est effondré, faisant 14 morts dont des enfants, et blessant grièvement 3 autres personnes âgées de 18 à 24 ans qui sont toujours hospitalisées. Depuis, une vague de colère et d’indignation déferle sur le pays, des milliers de citoyens descendant dans les rues pour crier leur ras-le-bol face à la corruption et la négligence des autorités.
La population exige des comptes au gouvernement
Mardi soir, ils étaient plusieurs milliers à manifester à Novi Sad aux cris de “Prison ! Prison !”, exprimant leur soif de justice pour les victimes. Sur les pancartes, on pouvait voir des empreintes de mains ensanglantées, symboles forts de cette tragédie qui n’aurait jamais dû arriver. L’opposition et de nombreux citoyens accusent directement le parti au pouvoir, le SNS, d’avoir fait preuve de graves manquements dans la surveillance des projets d’infrastructures publiques qui se multiplient à travers le pays.
Je suis ici parce qu’une petite fille de 6 ans ne pourra jamais souffler les bougies de son 7e anniversaire… C’est pour ça que c’est important, la corruption tue !
Maja Gledic, habitante de Novi Sad
Durant les rassemblements, un moment de silence poignant a été observé en hommage aux victimes. Puis depuis un podium de fortune, des manifestants ont crié leur colère au pouvoir en place : “Vous êtes coupables !”, “Arrêtez les criminels !”.
La démission du ministre, une première réponse insuffisante
Face à cette pression populaire, le ministre de la Construction Goran Vesic a fini par présenter sa démission mardi matin, comme le réclamaient les manifestants. Mais pour beaucoup, ce n’est qu’un premier pas, loin d’être suffisant. Selon une source proche du dossier, 48 personnes ont déjà été entendues dans le cadre de l’enquête ouverte, mais les Serbes attendent des actes forts de la part de leurs dirigeants.
Nous, le peuple, sommes insatisfaits depuis longtemps. Nous ne vivons pas bien. Et maintenant nous ne nous sentons même plus en sécurité.
Djordje Mitrovic, manifestant
Un drame qui cristallise des années de défiance
Au-delà de l’horreur de cet effondrement meurtrier, c’est bien un ras-le-bol général qui s’exprime aujourd’hui en Serbie. Ces manifestations massives font écho à des années de gronde contre la dégradation des conditions de vie, le manque de perspectives, et surtout la mainmise d’une classe politique perçue comme corrompue et déconnectée des réalités.
Déjà dimanche, plusieurs centaines de personnes avaient défilé à Belgrade devant le ministère de la Construction, jetant de la peinture rouge sur ses murs en signe de contestation. La mort tragique de ces 14 innocents apparaît comme la goutte d’eau qui fait déborder un vase de mécontentement et de défiance, rempli depuis trop longtemps.
Le gouvernement sous pression, le pays retient son souffle
Alors que le Premier ministre Ana Brnabic a promis de faire toute la lumière sur ce drame et de punir sévèrement les responsables, tout un pays retient son souffle. Les prochains jours seront décisifs pour savoir si le gouvernement parviendra à apaiser la colère populaire en apportant des réponses concrètes et en engageant un véritable changement de cap. La mémoire des victimes et la soif de justice des Serbes l’exigent.
Cette tragédie soulève des questions cruciales sur l’état des infrastructures en Serbie et la responsabilité des autorités en charge de leur surveillance. Elle met aussi en lumière une fracture profonde entre le peuple et ses dirigeants, minés par des soupçons de corruption et d’enrichissement personnel au détriment de l’intérêt général. Le chemin sera long pour reconstruire la confiance brisée, mais il commence par l’écoute des citoyens et la fin de l’impunité.
Le temps des larmes et du recueillement passé, l’heure est désormais à la transparence, à la vérité et à la justice. Les manifestants de Novi Sad et de tout le pays l’ont martelé : plus rien ne sera comme avant après ce 21 avril funeste. Le gouvernement serbe est prévenu : sans actions rapides et drastiques, la contestation ne faiblira pas et pourrait même franchir un nouveau cap. Car derrière chaque victime, ce sont des familles brisées et des rêves d’avenir partis en fumée. Un désastre humain qui restera comme une cicatrice dans l’histoire récente de la Serbie.