Dans une salle vibrante du Parc Chanot à Marseille, un homme se tient à la tribune, regard déterminé et ton affirmé. La foule, près de 2 000 personnes, l’écoute avec attention. Qui est-il ? Un ancien Premier ministre, un maire, mais surtout un stratège politique qui voit loin : jusqu’à 2027. Ce samedi 17 mai 2025, Édouard Philippe, président d’Horizons, n’est pas seulement venu parler. Il est venu poser les bases d’une droite nouvelle, un projet qui ambitionne de rassembler au-delà des clivages, tout en s’adressant directement à l’électorat conservateur. Mais comment un discours peut-il à la fois séduire les modérés et convaincre les plus fermes ? Plongée dans une journée qui pourrait redessiner la politique française.
Un Congrès Stratégique à Marseille
Le choix de Marseille n’est pas anodin. Ville de contrastes, carrefour méditerranéen, elle incarne à la fois les défis et les espoirs de la France. Pour Édouard Philippe, c’est le lieu idéal pour envoyer un message clair : il veut incarner une droite qui parle à tous, des grandes métropoles aux petites sous-préfectures. Ce troisième congrès d’Horizons, organisé au Parc Chanot, n’est pas un simple meeting. C’est une démonstration de force, orchestrée avec soin pour coïncider avec un moment clé : l’élection à la présidence des Républicains, prévue le lendemain.
Le timing est tout sauf fortuit. En avançant son événement de 24 heures, Philippe s’assure une visibilité maximale. Pendant que ses anciens camarades de LR s’affrontent pour le leadership, lui réunit, sur scène, des figures influentes de la droite régionale : Martine Vassal, présidente du département, Renaud Muselier, patron de la région, et Christian Estrosi, maire de Nice. Ces trois poids lourds, tous ex-LR, incarnent une droite pragmatique, éloignée des querelles partisanes. Leur présence envoie un signal : Édouard Philippe veut être le rassembleur d’une famille politique éclatée.
« On a besoin de travailler ensemble, mais il faut additionner, pas imposer une hégémonie ! »
Renaud Muselier, président de la région Provence-Alpes-Côte d’Azur
Un Discours Ancré à Droite
Si le casting impressionne, c’est le discours d’Édouard Philippe qui marque les esprits. Pendant une heure, l’ancien Premier ministre déroule une vision musclée, centrée sur deux thèmes phares : la justice et la sécurité. Il dénonce une justice « trop lente, parfois hypocrite », incapable de répondre aux attentes des Français. Ses mots sont choisis pour résonner avec un électorat de droite, celui qui applaudissait Nicolas Sarkozy en 2007 avec son slogan Travailler plus pour gagner plus. Philippe le reprend d’ailleurs sans détour, comme un clin d’œil à cette époque où la droite savait parler au peuple.
Mais il va plus loin. En liant une partie de la violence à l’immigration et en pointant du doigt le communautarisme, il s’aventure sur un terrain glissant, celui où les discours peuvent vite basculer dans la caricature. Pourtant, Philippe évite le piège. « Sa fermeté est concrète, pas populiste », souligne Christian Estrosi, vice-président d’Horizons. Pour illustrer cette nuance, il n’hésite pas à tacler ceux qui, selon lui, versent dans l’excès, à l’image de Laurent Wauquiez, accusé de « trumpisme aux petits pieds ».
« Les Français ne sont pas dupes de ceux qui rêvent de ressusciter le bagne du comte de Monte-Cristo à Saint-Pierre-et-Miquelon. »
– Édouard Philippe, lors de son discours à Marseille
Des Propositions pour la Justice
Édouard Philippe ne se contente pas de critiquer. Il propose. Ancien avocat, il connaît le système judiciaire et ses failles. Parmi ses idées : l’exécution systématique des courtes peines, le retour des peines planchers pour les infractions graves, et la suppression du juge d’application des peines. Ces mesures, applaudies par la salle, visent à restaurer la confiance dans une justice perçue comme laxiste. « La transformation sera massive », promet-il, laissant entrevoir un programme plus détaillé pour le printemps 2026.
Pourtant, ses propositions restent mesurées. Contrairement à certains concurrents, Philippe évite les surenchères. Il ne promet pas de tout révolutionner immédiatement, mais pose des jalons, préférant un discours de crédibilité à celui de l’outrance. Cette stratégie, selon ses proches, vise à séduire un électorat plus large, celui qui se méfie des promesses irréalistes.
Proposition | Objectif |
---|---|
Exécution des courtes peines | Renforcer l’effectivité des sanctions |
Peines planchers | Dissuader les infractions graves |
Suppression du juge d’application des peines | Simplifier le système judiciaire |
Un Rassemblement à Construire
Si Édouard Philippe séduit à Marseille, il sait que la route vers 2027 est semée d’embûches. La droite française est fracturée, entre les modérés de Renaissance, les conservateurs de LR, et les populistes du Rassemblement national. Son défi : fédérer sans aliéner. En s’entourant de figures comme Muselier, Vassal, ou encore Gérald Darmanin lors d’un précédent meeting à Lille, il construit un réseau. Mais ce réseau suffira-t-il face à des concurrents comme Bruno Retailleau, dont la « hype » auprès des militants LR est indéniable ?
Pour Marine Cazard, responsable du pôle Jeunes d’Horizons, Philippe a un atout : il dépasse les cercles militants. « Il parle à ceux qui ne sont pas encore convaincus », explique-t-elle. Cette ambition se reflète dans son discours, qui alterne entre constats lucides et propositions concrètes, sans jamais sombrer dans le populisme. Mais pour convaincre, il devra transformer l’essai. Ses meetings à Bordeaux, Lille, et maintenant Marseille, dressent un diagnostic des « maux français ». Reste à dévoiler un programme complet, attendu pour 2026.
Un Symbole pour 2027
À la fin du meeting, un moment symbolique cristallise l’ambition d’Édouard Philippe. Deux jeunes militants montent sur scène et lui offrent un maillot de l’Olympique de Marseille, floqué du numéro 27. Le message est clair : 2027, l’année de l’élection présidentielle, est dans toutes les têtes. La foule entonne La Marseillaise, et l’émotion est palpable. Ce maillot, c’est plus qu’un gadget. C’est une promesse, celle d’un homme qui ne vise qu’une seule place : la première.
Mais la route est encore longue. Entre ses tournées dans les sous-préfectures, un prochain meeting sur la jeunesse prévu fin août, et un livre annoncé pour septembre, Philippe avance à pas mesurés. Sa stratégie : construire, étape par étape, une droite qui soit à la fois ferme et moderne, crédible et fédératrice. Réussira-t-il à transformer ce moment marseillais en élan national ? L’avenir le dira.
Les chantiers d’Édouard Philippe pour 2027 :
- Rassembler la droite modérée et conservatrice
- Proposer un programme judiciaire crédible
- Séduire au-delà des militants convaincus
Pourquoi Marseille Compte
Marseille, avec ses défis sociaux et ses dynamiques culturelles, est un microcosme de la France. En choisissant cette ville, Édouard Philippe montre qu’il comprend les enjeux locaux tout en visant une portée nationale. La sécurité, la justice, l’immigration : ces thèmes, au cœur de son discours, sont aussi ceux qui préoccupent les Marseillais. En s’entourant de figures locales, il ancre son projet dans le réel, loin des débats parisiens.
Ce choix stratégique pourrait payer. Alors que LR s’enlise dans ses divisions, Philippe apparaît comme une alternative. Mais il devra maintenir cet équilibre délicat : parler à la droite sans perdre les modérés, proposer sans promettre l’impossible. Son discours à Marseille n’est qu’une étape, mais elle est décisive.
Vers un Programme pour 2026
Si 2027 est l’horizon, 2026 sera l’année de la concrétisation. Édouard Philippe promet un « programme massif » pour le printemps, un projet qui devrait détailler sa vision pour la France. En attendant, il multiplie les déplacements, de Bordeaux à Lille, des sous-préfectures aux grandes villes. Chaque meeting est une occasion de peaufiner son image, de tester ses idées, de fédérer ses soutiens.
Son prochain rendez-vous, fin août, portera sur la jeunesse. Un thème clé, dans un pays où les moins de 30 ans se sentent souvent délaissés par la politique. En septembre, un nouveau livre viendra enrichir son propos. Ces étapes, soigneusement planifiées, montrent un homme qui ne laisse rien au hasard. Mais dans une droite aussi divisée, la patience sera-t-elle payante ?
Pour l’heure, Marseille a vibré. Le maillot floqué du numéro 27 reste dans les esprits, comme un symbole d’une ambition qui ne fait que commencer. Édouard Philippe a posé ses pions. Reste à savoir s’il saura transformer ce coup d’éclat en victoire nationale.