L’affaire Boualem Sansal continue de faire des vagues. Cet écrivain franco-algérien, connu pour ses critiques envers le pouvoir algérien, est détenu dans son pays natal depuis la mi-novembre. Son avocat, Maître François Zimeray, monte au créneau et dénonce de multiples atteintes aux droits de la défense dans ce dossier brûlant.
Une procédure judiciaire opaque
Selon les informations communiquées lors d’une conférence de presse, l’accusation n’aurait pas détaillé les charges pesant sur Boualem Sansal. Son avocat n’a par ailleurs pas pu obtenir de visa pour se rendre en Algérie afin d’assurer sa défense. Cerise sur le gâteau, l’écrivain aurait été transféré dans un autre lieu de détention sans que ses conseils ni sa famille n’en soient informés au préalable. Autant de zones d’ombre qui font dire à Maître Zimeray que les droits élémentaires de son client sont bafoués.
Faire respecter le droit international
Face à cette situation, l’avocat compte bien se battre avec les armes du droit. Il rappelle que l’Algérie a ratifié de nombreux traités internationaux, dont le Pacte international relatif aux droits civils et politiques. Des textes qui consacrent le droit à un procès équitable et qui doivent primer sur le droit national.
« Nous appliquerons le droit algérien. Le droit algérien c’est aussi les traités internationaux ratifiés par l’Algérie », martèle François Zimeray.
Vers une saisine des instances onusiennes ?
Si les entraves persistent, l’avocat n’exclut pas de saisir le Haut-Commissariat aux droits de l’homme des Nations unies, l’Unesco ou encore la Commission africaine des droits de l’homme et des peuples. Une menace qu’il entend mettre à exécution « dans quelques jours » si les « formalités » permettant d’assurer les droits de la défense ne sont pas résolues d’ici là.
Derrière cette détention, se cache peut-être un différend diplomatique entre l’Algérie et le Maroc. Boualem Sansal aurait en effet repris à son compte la position marocaine selon laquelle le territoire algérien aurait été « tronqué » sous la colonisation française au profit de l’Algérie. Des propos qui auraient fortement déplu aux autorités algériennes.
La liberté d’expression en question
Au-delà du cas individuel de Boualem Sansal, cette affaire pose la question du respect de la liberté d’expression en Algérie. L’auteur de « 2084 : La Fin du monde » est connu pour son regard critique sur le pouvoir en place. Sa détention apparaît aux yeux de beaucoup comme une tentative de museler une voix dissonante.
Les prochaines semaines s’annoncent décisives. L’avocat de Boualem Sansal jouera son va-tout sur la scène internationale si la justice algérienne continue de faire la sourde oreille. Une stratégie offensive qui vise à faire plier Alger et à obtenir la libération de l’écrivain. Mais le pouvoir algérien est-il prêt à entendre raison ? Rien n’est moins sûr tant les relations entre les deux pays restent tendues sur fond de conflit mémoriel et territorial.
Une chose est sûre, cette affaire embarrasse le régime algérien à l’international. La mobilisation d’organisations de défense des droits humains et d’intellectuels du monde entier met une pression supplémentaire sur les autorités. Reste à savoir si cela suffira à infléchir leur position dans ce bras de fer qui les oppose à Boualem Sansal et ses soutiens.
En attendant, l’écrivain reste derrière les barreaux, privé de sa liberté pour avoir osé exprimer ses opinions. Un combat pour la liberté d’expression qui en rappelle malheureusement tant d’autres à travers le monde. Et qui montre que la route est encore longue pour que ce droit fondamental soit partout respecté.