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Économie de Mayotte : Le Cyclone Chido Laisse des Traces

Trois mois après le cyclone Chido, l’économie de Mayotte s’effondre. Des entreprises au bord du gouffre, des aides qui tardent : jusqu’où ira la crise ?

Imaginez-vous sur une plage déserte, face à un lagon autrefois grouillant de vie. Aujourd’hui, une simple bouée jaune flotte à la surface, vestige d’un passé prospère balayé par une force implacable. À Mayotte, trois mois après le passage dévastateur du cyclone Chido, le 14 décembre 2024, l’économie vacille, et les habitants, comme ce prestataire nautique privé de son bateau, oscillent entre désespoir et espoir fragile. Ce n’est pas juste une histoire de vent et de vagues : c’est celle d’un archipel français qui lutte pour se relever.

Un Cyclone qui Change Tout

Le cyclone Chido n’a pas seulement emporté des toits et des vies – au moins 40 morts selon les chiffres officiels. Il a aussi fracassé une économie déjà chancelante, marquée par des années de crises successives. À Mayotte, 101e département français, les stigmates de ce désastre, le pire en 90 ans, se lisent dans chaque coin de rue, sur chaque embarcation retournée.

Une Économie à Genoux

Sur la plage nord de l’île, un entrepreneur fixe l’horizon, là où son bateau de travail a sombré. Privé de son outil principal, il a dû suspendre son activité nautique, une petite entreprise qui vivait des sorties en mer. Les réparations ? 10 500 euros, une somme colossale quand l’assurance refuse de couvrir les dégâts. Il n’est pas seul : 80 % des entreprises mahoraises sont dans le rouge, leurs outils de production détruits ou endommagés.

« De nombreuses sociétés peinent à garder la tête hors de l’eau. La reprise est bien plus lente qu’espéré. »

– Une représentante de la chambre de commerce locale

Ce n’est pas une surprise. Avant Chido, Mayotte ployait déjà sous le poids du Covid-19, de sécheresses prolongées et de tensions sociales marquées par des barrages routiers en 2024. Le cyclone n’a fait qu’amplifier cette accumulation de crises, comme le souligne une conseillère départementale interrogée par une source proche.

Le Port, Cœur Battant à l’Arrêt

Au nord de la Grande-Terre, le port de Longoni, poumon logistique de l’île, est à l’agonie. Touché de plein fouet par le cyclone, il peine à assurer l’approvisionnement en matériel et marchandises. Une vendeuse d’un magasin de meubles à Mamoudzou raconte : la marchandise est restée bloquée des semaines, tandis que l’eau s’infiltrait par le plafond éventré de sa boutique. Résultat ? Une activité commerciale au ralenti, des pertes en cascade.

  • Ralentissement logistique : Les délais d’approvisionnement s’allongent.
  • Pertes directes : Les stocks endommagés aggravent la situation.
  • Effet domino : Les retards freinent toute la chaîne économique.

Des Entreprises au Bord du Gouffre

Dans une rue commerçante de Mamoudzou, les façades retrouvent peu à peu leurs couleurs, mais les toits éventrés trahissent la fragilité persistante. Une agence de communication locale a tout perdu : ordinateurs, caméras, studio d’enregistrement. 120 000 euros de dégâts, mais seulement 30 000 euros proposés par l’assurance. Avec cinq mois de travaux estimés, le cofondateur confie, désabusé : « On a un mois devant nous, pas plus. »

Le tableau est sombre. Les entreprises, déjà en difficulté avant la tempête à cause de paiements différés, voient leurs trésoreries s’effondrer. Le chômage technique touche des dizaines de salariés, et la peur de la faillite plane sur l’archipel.

Des Aides qui Se Font Attendre

L’État a réagi avec des mesures d’urgence : une aide financière équivalant à 20 % du chiffre d’affaires mensuel de 2022, ou encore le chômage partiel. Mais la réalité est cruelle : ces fonds tardent à arriver. « La plupart des entreprises n’ont encore rien reçu », déplore une voix autorisée de la chambre de commerce. Une petite structure nautique, par exemple, n’a touché que 1 500 euros, une goutte d’eau face à ses besoins.

MesureMontantStatut
Aide exceptionnelle20 % du CA 2022En attente
Chômage partielVariableNon remboursé
Réparations10 500 € (exemple)Non couvert

Pour certains, ces dispositifs sont carrément inadaptés. Une entreprise endettée avant le cyclone se voit même exclue de l’aide exceptionnelle, faute d’être à jour dans ses cotisations. « Les solutions ne sont pas à la hauteur », lâche son dirigeant, amer.

Un Souffle d’Espoir ?

Face à ce marasme, le département tente de réagir. L’aide à l’investissement, habituellement fixée à 3 millions d’euros, passe cette année à 10 millions. Objectif : injecter rapidement des fonds pour relancer l’activité. « Il faut investir vite pour repartir », insiste une élue locale. Mais ce coup de pouce suffira-t-il à inverser la tendance ?

Sur la plage, l’entrepreneur nautique scrute toujours sa bouée jaune. Il rêve d’un retour en mer d’ici fin avril, mais sans aide concrète, ce n’est qu’un vœu pieux. À Mayotte, le cyclone Chido a révélé une vérité brutale : la résilience a ses limites quand les crises s’enchaînent sans répit.

Et après ? La question taraude les Mahorais. Entre reconstruction et désillusion, l’avenir économique de l’archipel reste suspendu à des aides incertaines et à une volonté de fer.

Ce qui se joue à Mayotte dépasse les frontières de l’île. C’est une leçon sur la fragilité des économies insulaires face aux catastrophes naturelles, amplifiée par des années de négligence et de défis structurels. Le cyclone Chido n’est pas qu’un souvenir : il est un signal d’alarme.

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