Imaginez une grande salle remplie de militants écologistes passionnés, tous vêtus de vert, discutant avec ferveur du réchauffement climatique et de la biodiversité. Et puis, d’un seul coup, quelqu’un prend la parole et déclare qu’il y a un problème beaucoup plus urgent : il y a trop de Blancs dans la pièce.
Cette scène, qui pourrait sembler sortie d’une parodie, est pourtant devenue réalité dans une partie du mouvement écologiste français. Un média très lu dans les milieux verts vient de publier un guide pratique intitulé « Sortir de l’entre-soi blanc » contenant neuf mesures concrètes pour réduire la proportion de personnes blanches au sein des structures écologistes.
Quand l’écologie devient une affaire de couleur de peau
Le constat de départ est assumé sans détour : l’écologie française serait trop blanche. Selon les auteurs, les personnes racisées et leurs combats seraient « trop souvent écartés » du mouvement majoritaire. Il ne s’agit donc plus seulement de sauver la planète, mais d’abord de sauver l’écologie… d’elle-même et de sa prétendue blanchité excessive.
Ce qui frappe immédiatement, c’est la radicalité du diagnostic. On ne parle plus de simples questions d’accessibilité sociale ou économique, mais d’une « centralité blanche » présentée comme une forme de domination structurelle qu’il faudrait activement combattre.
Les neuf mesures qui veulent changer la couleur de l’écologie
Le texte propose neuf outils concrets. Voici, décryptés, les principaux axes qui ont suscité le plus de réactions.
Première étape : reconnaître le problème. Il s’agit d’organiser des formations internes pour que chaque militant prenne conscience de sa propre « blanchité » et des privilèges qui y seraient associés. Des sessions où l’on apprend à se flageller collectivement pour sa couleur de peau, en somme.
Deuxième étape : changer le recrutement. Les associations sont invitées à mettre en place des politiques préférentielles pour embaucher ou accueillir prioritairement des personnes racisées. On passe ainsi d’une écologie universelle à une écologie qui trie ses membres à l’entrée selon des critères ethniques.
Troisième étape : décoloniser les imaginaires. Exit les références classiques de l’écologie européenne (Thoreau, Arnaud de l’Estoile, etc.). Place à des penseurs issus des minorités ou des pays du Sud, même quand leurs travaux n’ont parfois aucun lien avec l’écologie.
« Il faut cesser de centrer nos références sur des auteurs blancs morts »
Cette phrase, tirée du guide, résume parfaitement l’esprit : l’écologie ne doit plus être pensée par des Blancs, même s’ils ont posé les bases théoriques du mouvement il y a plus d’un siècle.
Des quotas implicites qui ne disent pas leur nom
Parmi les recommandations les plus explosives figure l’idée de « rééquilibrer » la composition des instances dirigeantes. Traduction : si votre bureau associatif est trop blanc, il faut volontairement écarter des candidats compétents au profit de personnes racisées, même moins expérimentées.
On nous parle de « safe spaces » réservés aux personnes racisées lors des assemblées générales, de « cercles non-mixtes » où les Blancs sont exclus des discussions. L’écologie inclusive se construit donc… en excluant une partie de la population.
Exemple concret proposé dans le guide :
- Créer des postes de « référent diversité » rémunérés dans chaque association
- Instaurer des quotas de prise de parole selon l’origine lors des débats
- Former les animateurs à repérer leurs « micro-agressions racistes »
- Mettre en place des « caisses de solidarité racisées » financées par les cotisations
L’écologie sacrifiée sur l’autel de l’intersectionnalité
Ce qui est fascinant, c’est de voir comment la cause écologique passe au second plan. Le réchauffement climatique ? La sixième extinction ? La pollution des océans ? Tout cela semble soudain accessoire face à l’urgence absolue de faire baisser le pourcentage de Blancs dans les manifs climat.
Les auteurs vont jusqu’à affirmer que tant que l’écologie restera « blanche », elle sera illégitime. Autrement dit, même si vos actions permettent de sauver des hectares de forêt ou de faire fermer une centrale à charbon, elles ne vaudront rien tant que votre collectif ne sera pas assez « divers ».
On atteint des sommets de perversité logique quand on lit qu’il faudrait « décentrer » l’écologie des préoccupations européennes (pollution de l’air, pesticides, etc.) pour se focaliser sur les combats des minorités, même quand bien même ces combats n’auraient aucun lien avec l’environnement.
Une fracture générationnelle et idéologique béante
Ce genre de discours crée une fracture terrible au sein même du mouvement écologiste. D’un côté, les historiques – souvent des sexagénaires qui ont commencé à militer dans les années 70 – qui découvrent avec stupeur que leur engagement de cinquante ans ne vaut plus rien parce qu’ils ont le tort d’être nés blancs.
De l’autre, une nouvelle génération ultra-radicalisée, nourrie aux théories décoloniales et à l’intersectionnalité, qui considère que l’écologie « classique » est une forme de colonialisme vert qu’il faut détruire pour mieux la reconstruire sur des bases racialement correctes.
Résultat : des associations se déchirent, des collectifs explosent, des anciens claquent la porte en traitant les jeunes de « fous furieux racialistes », tandis que ces derniers accusent les anciens de « racisme structurel ».
Et la classe ouvrière dans tout ça ?
Il y a une ironie cruelle à voir ces recommandations venir de milieux souvent très bourgeois. Car qui compose majoritairement ces collectifs écolos alternatifs ? Des enfants de cadres supérieurs, des étudiants en sciences humaines, des habitants des centres-villes gentrifiés.
La classe ouvrière blanche, elle, brille par son absence – non pas parce qu’elle serait raciste, mais parce qu’elle n’a tout simplement pas le temps ni les moyens de passer ses week-ends en assemblée non-mixte à débattre de sa blanchité.
Quant aux classes populaires issues de l’immigration, elles sont tout aussi absentes, souvent parce qu’elles considèrent (à tort ou à raison) que l’écologie est une préoccupation de riches.
Au final, cette obsession de la diversité raciale risque surtout de renforcer l’entre-soi… social et culturel des milieux écolos bobos.
Vers une écologie totalitaire ?
Le plus inquiétant reste la méthode. On nous explique qu’il faut « sortir de l’entre-soi blanc » en créant… de nouveaux entre-sois, cette fois racialement purs. On combat l’exclusion par l’exclusion. On promeut la diversité en imposant l’uniformité idéologique.
On voit poindre une écologie totalitaire où votre légitimité à parler de la planète dépendra avant tout de votre mélanine. Où l’on vous demandera vos origines avant de vous laisser prendre la parole dans une assemblée. Où l’on créera des fichiers ethniques pour s’assurer que les quotas sont respectés.
George Orwell n’aurait pas rêvé mieux : un mouvement qui se prétend universel et qui finit par classer les êtres humains selon leur race pour mieux les séparer.
Une stratégie perdant-perdant
Sur le plan stratégique, c’est une catastrophe annoncée. En racialisant ainsi le débat écologique, on offre sur un plateau les thèmes environnementaux à la droite et à l’extrême droite, qui n’auront plus qu’à se présenter comme les défenseurs d’une écologie « normale », universelle et non raciale.
Pendant ce temps, les vrais problèmes – la destruction des écosystèmes, l’explosion des inégalités face au réchauffement, la dépendance aux énergies fossiles – continuent d’avancer à toute vitesse.
Et la planète, elle, se fiche bien de la couleur de peau de ceux qui prétendent la sauver.
En définitive, ce plan en neuf points nous dit une chose terrifiante :
L’écologie politique est en train de se suicider intellectuellement en remplaçant la défense de la nature par la guerre des races.
Et pendant ce temps, la nature, elle, continue de mourir.
La question reste entière : veut-on vraiment sauver la planète, ou simplement se donner bonne conscience en triant les militants selon leur pigmentation ?
Face à l’urgence climatique, l’écologie française semble avoir trouvé sa priorité absolue : compter les Blancs.
On en rit. On en pleurerait presque.









