Imaginez un instant : avant d’entrer en classe, vous murmurez une prière pour que les bombes ne tombent pas. En Birmanie, c’est la réalité de milliers d’élèves qui étudient dans des écoles souterraines, construites pour échapper aux frappes aériennes. Depuis le coup d’État de 2021, la guerre civile a transformé l’éducation en un acte de courage. Dans cet article, plongez dans le quotidien de ces jeunes qui, malgré la peur, refusent d’abandonner leur avenir.
Une Éducation sous la Menace
Dans une région rebelle au nord de Mandalay, une étudiante de 18 ans, que nous appellerons Phyo Phyo pour sa sécurité, entre dans un bunker en béton. Ce n’est pas un abri ordinaire, mais sa salle de classe. Depuis juin, cette école souterraine accueille une poignée d’élèves, créée après qu’une frappe aérienne a détruit une école voisine, tuant 20 élèves et deux enseignants. Ce drame a marqué un tournant, transformant l’apprentissage en un défi quotidien.
Phyo Phyo se souvient d’une époque où l’école rimait avec rires et liberté. Aujourd’hui, le silence domine. Les élèves, traumatisés par le grondement des avions, se concentrent difficilement. Pourtant, leur détermination reste intacte. Comme le dit Phyo Phyo : “Nous voulons étudier, quels que soient les obstacles.”
Le Contexte d’un Conflit Meurtrier
Depuis le coup d’État militaire de 2021, la Birmanie est plongée dans une guerre civile dévastatrice. La junte, qui a renversé le gouvernement démocratique d’Aung San Suu Kyi, intensifie ses frappes aériennes pour reprendre le contrôle des territoires rebelles. Ces attaques visent souvent des cibles civiles, comme les écoles ou les monastères, dans une stratégie visant à semer la terreur.
“L’armée cible intentionnellement la population parce qu’elle veut semer la terreur.”
Su Mon Thant, analyste de l’ONG Acled
Les rebelles, composés de militants prodémocratie et de groupes ethniques luttant pour leur autonomie, ont lancé une offensive majeure en 2023. Cette action a pris l’armée par surprise, qui a répondu par des bombardements aériens massifs. Faute de moyens aériens, les rebelles sont démunis face à ces attaques, laissant les civils vulnérables.
Des Écoles Souterraines comme Rempart
Face à cette menace constante, des écoles souterraines ont vu le jour. Ces bunkers, souvent creusés dans la jungle, offrent une protection relative contre les bombes. Les salles, humides et sombres, sont équipées du strict minimum : des bancs, un tableau, et parfois un portrait d’Aung San Suu Kyi, symbole de la résistance. Malgré les conditions difficiles, ces lieux incarnent un espoir tenace.
Les élèves, comme Phyo Phyo, y étudient des matières comme la littérature birmane, cherchant à préserver leur culture et leur identité. Mais l’ambiance est lourde. La peur est omniprésente, et chaque bruit d’avion interrompt les cours. Pourtant, ces jeunes refusent de céder. Leur persévérance est un acte de défi face à l’oppression.
Faits clés sur les écoles souterraines :
- Construites dans des zones rebelles pour protéger des frappes aériennes.
- Conditions : humides, sombres, mais sécurisées.
- Symboles : portraits d’Aung San Suu Kyi dans certaines classes.
- Objectif : permettre l’éducation malgré la guerre.
La Stratégie de la Terreur
L’armée birmane, incapable de reprendre le contrôle au sol, mise sur des frappes aériennes pour affaiblir la résistance. Selon les observateurs, ces attaques visent à briser le moral des civils. En ciblant des lieux comme les écoles, la junte cherche à couper les communautés de leurs espoirs d’avenir. Plus de 85 000 personnes auraient été tuées depuis le début du conflit, dont environ 3 400 civils dans des bombardements.
Les écoles, en particulier, sont devenues des cibles fréquentes. Ces attaques ne sont pas des erreurs, mais une tactique calculée. Comme l’explique Su Mon Thant, “lorsque les gens craignent de ne pas survivre, ils perdent l’envie de soutenir la résistance.” Cette stratégie a des conséquences dévastatrices, tant physiques que psychologiques.
La Résilience des Communautés
Dans ce climat de peur, la résilience des communautés birmanes est remarquable. Les écoles souterraines ne sont pas seulement des abris, mais des symboles de résistance. Les enseignants, souvent bénévoles, risquent leur vie pour instruire les jeunes. Les familles, malgré la menace, envoient leurs enfants apprendre, convaincues que l’éducation est la clé d’un avenir meilleur.
“Parfois, je me dis qu’il vaudrait mieux mourir sur le coup dans une frappe plutôt que de vivre dans la peur au quotidien.”
Une femme au foyer de 55 ans, anonyme
Cette phrase, prononcée par une mère de famille, reflète la tension constante dans laquelle vivent les Birmans. Pourtant, même face à cette peur, les communautés continuent de s’organiser. Des écoles sont construites, des cours sont dispensés, et des rêves persistent.
Les Enjeux Politiques à Venir
La junte prépare des élections pour décembre 2025, perçues par beaucoup comme une tentative de légitimer son pouvoir. Les rebelles, eux, s’opposent à ce scrutin, particulièrement dans les zones qu’ils contrôlent. Ce bras de fer politique intensifie les violences, les frappes aériennes servant à affaiblir les bastions rebelles avant le vote.
Pour les élèves comme Phyo Phyo, ces enjeux semblent lointains. Leur priorité est de survivre et d’apprendre. Mais leur combat pour l’éducation est intrinsèquement lié à la lutte pour la démocratie. En continuant à étudier, ils défient la junte et incarnent l’espoir d’un avenir libre.
Aspect | Détails |
---|---|
Conflit | Guerre civile depuis 2021, opposant junte militaire et rebelles. |
Frappes aériennes | Visent civils, écoles, monastères pour semer la terreur. |
Écoles souterraines | Bunkers dans la jungle pour protéger les élèves. |
Victimes | Plus de 85 000 morts, dont 3 400 civils dans des bombardements. |
Un Avenir Incertain
Dans ces écoles souterraines, chaque leçon est une victoire. Mais le coût humain reste immense. La peur, les pertes et l’incertitude pèsent sur les élèves et leurs familles. Pourtant, leur détermination à poursuivre l’éducation, malgré les bombes, est un puissant message d’espoir. Ces jeunes ne se contentent pas de survivre : ils construisent l’avenir de la Birmanie, une leçon à la fois.
Leur histoire nous rappelle que l’éducation, même dans les pires circonstances, reste un pilier de résilience. En Birmanie, les écoles souterraines ne sont pas seulement des abris : elles sont des bastions de résistance, des lieux où l’espoir refuse de s’éteindre. Alors que le conflit se prolonge, une question demeure : combien de temps ces jeunes pourront-ils tenir face à la violence ?