Lors de son audition au Sénat philippin ce lundi, l’ancien président Rodrigo Duterte a vigoureusement défendu sa guerre meurtrière contre la drogue, qui a fait des milliers de victimes durant son mandat de 2016 à 2022. Face aux sénateurs enquêtant sur ces meurtres à grande échelle, Duterte, âgé de 79 ans, s’est montré inflexible.
« Ne remettez pas en question mes politiques, car je n’ai pas d’excuses, pas de prétextes. J’ai fait ce que j’avais à faire et, que vous le croyiez ou non, je l’ai fait pour mon pays », a-t-il déclaré sans ambages. Il a ajouté avec fermeté : « Je déteste la drogue, ne vous y trompez pas. »
Une guerre sanglante qui soulève des questions
La guerre anti-drogue lancée par Duterte dès son arrivée au pouvoir en 2016 a fait des ravages, avec des milliers de morts. Ces violences ont attiré l’attention de la communauté internationale. La Cour pénale internationale (CPI) a même ouvert une enquête, estimant que cette campagne pourrait constituer un crime contre l’humanité.
En parallèle, le Sénat philippin mène ses propres auditions sur ces meurtres, qui ont continué sous la présidence de Ferdinand Marcos, fils et homonyme de l’ancien dictateur. Un rapport de l’ONU avait pointé du doigt en 2020 les encouragements donnés à la police, au plus haut niveau, pour abattre sans autre forme de procès les suspects.
Duterte maintient sa ligne dure
Devant les sénateurs, Duterte a affirmé que « les crimes liés à la drogue sont de nouveau en hausse », évoquant « des rapports quotidiens d’enfants violés, de personnes tuées » car « les pourvoyeurs de cette menace ont repris leurs activités ». Selon lui, « les Philippins sont anxieux et angoissés ».
Les chiffres officiels font état de plus de 6 000 morts lors des opérations anti-drogue sous Duterte. Mais les procureurs de la CPI avancent un bilan bien plus lourd, estimant le nombre de victimes entre 12 000 et 30 000.
Un dossier épineux pour le nouveau président
Ferdinand Marcos, qui a succédé à Duterte en 2022, se retrouve dans une position délicate. Mi-avril, il avait prévenu qu’il excluait de livrer son prédécesseur à la CPI le cas échéant. Une prise de position attendue, les Philippines s’étant retirées de cette juridiction en 2019 sous l’impulsion de Duterte.
Cette guerre sanglante contre la drogue reste un dossier brûlant aux Philippines. Si Duterte garde des soutiens pour sa politique radicale, les voix s’élèvent pour dénoncer les dérives et réclamer justice pour les victimes. L’enquête du Sénat, la pression de la CPI et l’attitude du nouveau gouvernement seront déterminantes pour faire la lumière sur cette sombre page de l’histoire philippine.