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Dublin Suspend Projet Antisémite Parc Herzog

Le petit parc Herzog de Dublin, dédié à l’ancien président israélien né à Belfast, allait être débaptisé. Accusé d’antisémitisme par la communauté juive et Israël, le projet vient d’être suspendu en urgence. Mais pourquoi une telle colère, et que révèle cette affaire sur les tensions actuelles ?

Imaginez un petit parc tranquille au cœur de Dublin, juste à côté de la seule école juive du pays. Un lieu discret, presque intime, qui porte depuis des années le nom d’un homme né à Belfast et élevé dans cette même ville : Chaim Herzog, sixième président d’Israël. Et puis, du jour au lendemain, une proposition surgit : débaptisons ce parc. La polémique explose, les gouvernements s’en mêlent, et l’affaire prend une dimension internationale.

Une suspension aussi soudaine que révélatrice

Ce dimanche, le directeur exécutif du conseil municipal de Dublin, Richard Shakespeare, a annoncé qu’il retirait le projet de l’ordre du jour. Officiellement, il invoque des « raisons procédurales ». En réalité, la pression est devenue insoutenable.

Quelques heures plus tôt, le Premier ministre irlandais Micheál Martin avait publiquement demandé l’abandon définitif de cette initiative, la qualifiant d’« ouvertement clivante et mauvaise ». Pour lui, changer le nom du parc reviendrait à « effacer la contribution riche et particulière de la communauté juive » en Irlande.

Qui était vraiment Chaim Herzog ?

Chaim Herzog n’est pas n’importe quel président israélien. Né en 1918 à Belfast (alors partie du Royaume-Uni), il grandit à Dublin où son père, le rabbin Isaac Herzog, occupe le poste de Grand Rabbin d’Irlande. La famille marque profondément l’histoire juive irlandaise.

Après des études à Londres et un engagement dans l’armée britannique pendant la Seconde Guerre mondiale (il participe même à la libération du camp de Bergen-Belsen), Chaim Herzog émigre en Palestine en 1947. Il deviendra général, diplomate, puis président de l’État d’Israël de 1983 à 1993.

Son fils, Isaac Herzog, est aujourd’hui l’actuel président israélien. Le bureau de ce dernier a qualifié samedi toute tentative de débaptiser le parc de « honteuse et scandaleuse ».

Une communauté juive irlandaise sous le choc

En Irlande, la communauté juive compte environ 3 000 personnes – une minorité minuscule mais historiquement bien intégrée. Son représentant, Maurice Cohen, n’a pas mâché ses mots : pour lui, cette proposition est perçue comme « un acte grossier d’antisémitisme ».

Le parc Herzog se trouve à quelques mètres seulement de l’école juive de Dublin. Pour beaucoup de parents, l’idée de retirer ce nom revient à nier symboliquement la présence et l’histoire juive sur l’île.

« Ce n’est pas seulement un parc, c’est un morceau de notre mémoire collective »

Un membre anonyme de la communauté juive irlandaise

Israël monte au créneau avec virulence

Le ministre israélien des Affaires étrangères, Gideon Saar, n’y est pas allé par quatre chemins : il a accusé Dublin d’être devenue « la capitale mondiale de l’antisémitisme ».

Cette phrase choc intervient dans un contexte tendu. L’Irlande fait partie des pays européens les plus critiques à l’égard de la politique israélienne dans la bande de Gaza depuis l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023 et la réponse militaire qui a suivi.

Dublin a reconnu officiellement l’État de Palestine en mai 2024, une décision saluée dans le monde arabe mais très mal vécue en Israël. Des manifestations pro-palestiniennes massives ont régulièrement lieu dans les rues irlandaises, parfois accompagnées de slogans controversés.

Pourquoi une telle proposition a-t-elle vu le jour ?

L’identité exacte des élus à l’origine du projet n’a pas été rendue publique dans les communiqués officiels, mais plusieurs sources locales pointent des conseillers municipaux issus de partis de gauche radicale ou indépendants très engagés sur la cause palestinienne.

Dans le climat actuel, certains ont vu dans le nom « Herzog » un symbole de l’État israélien contemporain, alors que Chaim Herzog est mort en 1997 et que son mandat présidentiel s’est achevé dix ans plus tôt.

Cette confusion entre un hommage historique et un soutien politique actuel a alimenté la polémique. Pour les opposants au projet, débaptiser le parc revenait à punir rétrospectivement un homme pour des choix politiques faits bien après son départ d’Irlande.

Les arguments des deux camps en présence

Pour mieux comprendre, voici un tableau récapitulatif des positions exprimées publiquement :

En faveur du maintien du nom En faveur du changement de nom
Hommage à un Irlandais devenu président Solidarité avec le peuple palestinien
Reconnaissance de l’histoire juive irlandaise Refus de glorifier des dirigeants israéliens
Proximité de l’école juive Désir de débaptiser les lieux publics
Soutien du gouvernement irlandais Position de certains élus de gauche

Ce tableau, bien que simplifié, montre à quel point le débat dépasse la simple question toponymique pour toucher aux fractures géopolitiques contemporaines.

Un précédent qui fait réfléchir

Cette affaire n’est pas isolée. Partout dans le monde, des rues, places et bâtiments portant des noms historiques font l’objet de réexamens au nom de nouvelles sensibilités morales ou politiques.

Mais le cas du parc Herzog est particulier : l’homme honoré est né sur le sol irlandais (même si c’était en Irlande du Nord, alors britannique), a grandi à Dublin et fait partie intégrante de l’histoire juive locale avant même la création de l’État d’Israël.

Retirer son nom reviendrait, pour beaucoup, à effacer une page d’histoire irlandaise autant qu’israélienne.

Et maintenant ?

Le projet est renvoyé devant la commission compétente. Rien n’indique qu’il refera surface prochainement. Richard Shakespeare a été clair : il ne souhaite pas que cette question reste à l’agenda dans le climat actuel.

Certaines voix à Dublin espèrent même que cette suspension marque la fin définitive de l’épisode. D’autres, au contraire, promettent de remettre le sujet sur la table dès que l’émotion sera retombée.

Une chose est sûre : ce petit parc de quelques arbres et bancs est devenu, le temps d’un week-end, le symbole des tensions qui traversent l’Europe entière entre solidarité palestinienne et lutte contre l’antisémitisme.

Et vous, qu’en pensez-vous ? Un simple nom de parc peut-il vraiment diviser à ce point ? La réponse, semble-t-il, est oui.

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