Imaginez une petite ville française, où les pavés murmurent des histoires oubliées. À Dreux, une rue porte désormais le nom de Livia Zinger, une adolescente juive de 14 ans dont la vie a été tragiquement fauchée par la barbarie nazie. Cet hommage, inauguré lors de la Journée nationale du souvenir de la déportation en avril 2025, n’est pas seulement une plaque sur un mur : c’est un cri silencieux pour que la mémoire perdure. Comment une jeune fille, pleine de rêves, est-elle devenue un symbole de résilience face à l’horreur ?
Livia Zinger : Une Vie Brisée par l’Histoire
Livia Zinger n’était pas une figure publique, ni une héroïne de guerre. Elle était une adolescente ordinaire, née le 2 août 1928, dans une famille juive hongroise installée à Dreux dans les années 1930. Pourtant, son histoire, redécouverte grâce à des recherches minutieuses, incarne le destin de milliers d’enfants victimes de la Shoah. Sa famille, les Zinger, était aimée dans leur quartier. Ils vivaient rue Claye, participant activement à la vie locale, notamment à travers la chorale du cercle laïque.
Le père, Désiré, était plombier. La mère, Olga, couturière. Livia, elle, suivait des cours de couture à l’École Pratique de Commerce et d’Industrie. Leur quotidien, simple et chaleureux, a basculé dans l’horreur avec l’occupation nazie. En 1943, la famille a été disloquée par les rafles. Cette tragédie, bien que personnelle, reflète un drame universel.
Une Famille Décimée par la Shoah
Le 20 février 1943, Désiré Zinger est arrêté. Emmené à Drancy, il est ensuite déporté vers Sobibor, un camp d’extermination en Pologne où il disparaît. Quelques mois plus tard, le 8 novembre, Olga est arrêtée à son domicile. Ce même jour, Livia, alors en classe, est arrachée à son école sous les yeux de ses camarades. Ce moment, gravé dans la mémoire collective de Dreux, marque la brutalité de l’antisémitisme nazi.
« Les Allemands sont venus la chercher devant ses camarades, traumatisés. Ce fut un choc pour toute la communauté. »
Témoignage recueilli localement
Mère et fille sont conduites à la prison de Chartres, puis à Drancy. Le 17 décembre 1943, elles sont gazées à Auschwitz. Leur disparition, comme celle de millions d’autres, laisse un vide que la ville de Dreux tente aujourd’hui de combler par cet hommage.
La Redécouverte d’une Mémoire
L’histoire des Zinger aurait pu sombrer dans l’oubli, comme tant d’autres. Mais en 2007, un historien renommé contacte un représentant de la communauté israélite de Dreux pour retrouver une photo de Livia, dans le cadre d’un projet sur les enfants déportés. Cette demande marque le début d’une enquête passionnée. Des articles d’époque, des témoignages et des archives locales révèlent l’attachement des habitants pour cette famille.
Un journal local de 1945, par exemple, mentionne l’inquiétude des Drouais face au silence des Zinger après la guerre. « Ils étaient admirés, respectés », raconte un témoin. Ces découvertes ont ravivé le désir de rendre justice à leur mémoire, aboutissant à l’inauguration de la rue Livia Zinger.
Les Zinger en bref :
- Arrivée à Dreux : Années 1930, depuis Budapest.
- Activités : Chorale laïque, métiers artisanaux.
- Tragédie : Déportation en 1943, décès à Sobibor et Auschwitz.
Un Hommage Chargé de Sens
L’inauguration de la rue Livia Zinger, en présence du maire Pierre-Frédéric Billet et de représentants de la communauté israélite, n’est pas un geste anodin. Elle s’inscrit dans un effort national pour préserver la mémoire des victimes de la Shoah. Mais à Dreux, cet acte prend une dimension intime : il s’agit de rendre hommage à une famille qui faisait partie du tissu social de la ville.
La plaque, dévoilée le 30 avril 2025, est plus qu’un symbole. Elle rappelle que derrière chaque nom gravé dans la pierre, il y a une histoire, des rires, des espoirs brisés. Pour les habitants, c’est aussi une invitation à réfléchir sur les dangers de l’intolérance et de la haine.
Pourquoi Nommer une Rue ?
Nommer une rue après une victime du nazisme n’est pas un acte courant. Pourtant, il porte une puissance symbolique immense. Voici pourquoi :
- Préserver la mémoire : Une rue est un lieu de passage, vu par tous, qui ancre l’histoire dans le quotidien.
- Éduquer les générations : Les passants, en lisant le nom de Livia Zinger, peuvent s’interroger sur son histoire.
- Combattre l’oubli : Face à la montée des discours haineux, ces hommages rappellent les conséquences de l’antisémitisme.
À Dreux, cette initiative s’accompagne d’un travail éducatif. Des établissements scolaires intègrent l’histoire des Zinger dans leurs programmes, sensibilisant les jeunes à la Shoah. Des voyages pédagogiques à Auschwitz, comme ceux organisés pour des collégiens français, renforcent cet engagement.
Livia Zinger : Un Symbole Universel
Livia Zinger n’est pas seulement une figure locale. Son histoire résonne avec celle de millions de victimes de la Shoah. En lui dédiant une rue, Dreux ne se contente pas de regarder le passé : la ville pose un acte de résistance contre l’oubli et l’indifférence. Elle rappelle que chaque vie compte, que chaque nom mérite d’être prononcé.
« Nommer une rue, c’est redonner une place dans la société à ceux qui en ont été arrachés. »
Représentant local
Ce geste s’inscrit dans une démarche plus large en France, où des plaques, des monuments et des musées perpétuent la mémoire des déportés. Mais à Dreux, l’intimité de l’histoire des Zinger donne à cet hommage une force particulière.
Le Rôle de la Communauté
La communauté israélite de Dreux a joué un rôle clé dans cet hommage. En collaborant avec les autorités locales, elle a permis de faire revivre l’histoire des Zinger. Ce travail collectif montre l’importance de l’engagement citoyen pour préserver la mémoire. Les archives, les témoignages oraux et les recherches historiques ont convergé pour offrir à Livia une place dans l’histoire.
Les habitants, eux aussi, se sont mobilisés. Certains ont partagé des souvenirs, des anecdotes sur la famille Zinger, renforçant le lien entre passé et présent. Cette dynamique communautaire est un modèle pour d’autres villes souhaitant honorer leurs disparus.
Un Devoir de Mémoire
En 2025, alors que le monde fait face à de nouveaux défis, l’histoire de Livia Zinger rappelle l’urgence de combattre l’intolérance. La Shoah n’est pas un événement isolé, mais un avertissement. Les rues comme celle de Dreux sont des balises, des rappels que la haine peut détruire des vies en un instant.
Événement | Date | Conséquence |
---|---|---|
Arrestation de Désiré | 20 février 1943 | Déportation à Sobibor |
Arrestation d’Olga et Livia | 8 novembre 1943 | Déportation à Auschwitz |
Inauguration de la rue | 30 avril 2025 | Hommage à la famille Zinger |
Ce tableau résume les étapes clés de l’histoire des Zinger. Chaque date est un jalon dans leur tragédie, mais aussi dans l’effort pour leur rendre justice.
Et Après ?
L’inauguration de la rue Livia Zinger n’est pas une fin, mais un début. Les écoles de Dreux envisagent des projets pédagogiques pour raconter son histoire. Des conférences, des expositions et des partenariats avec des associations pourraient voir le jour. L’objectif ? Faire de cette rue un lieu de réflexion, un espace où l’on n’oublie pas.
Pour les jeunes générations, Livia Zinger devient un symbole. Elle incarne les victimes anonymes, celles dont les noms ne figurent pas dans les livres d’histoire, mais dont les vies méritent d’être célébrées. En marchant dans cette rue, les passants porteront, consciemment ou non, un fragment de son histoire.
En conclusion, l’hommage rendu à Livia Zinger à Dreux est un acte de courage et de mémoire. Il nous rappelle que l’histoire n’est pas seulement dans les musées ou les manuels, mais dans les rues que nous empruntons chaque jour. En gravant son nom dans la pierre, Dreux ne fait pas que se souvenir : elle s’engage à ne jamais oublier.