C’est un pavé dans la mare en cette fin juin 2024. Alors que le spectre d’un second tour opposant le Rassemblement National à La France Insoumise grandit de jour en jour, une voix inattendue s’élève pour appeler à la mobilisation contre l’extrême droite. Dans une tribune au vitriol publiée dans Challenges, l’ancien directeur général du FMI Dominique Strauss-Kahn sort de sa réserve pour adjurer les électeurs de gauche de faire barrage au RN, quitte à voter pour Jean-Luc Mélenchon, son “meilleur ennemi”.
DSK rompt un long silence
Depuis l’affaire du Sofitel en 2011 qui a mis un terme brutal à sa carrière politique, l’ancien ministre de l’Économie et des Finances avait déserté la scène médiatique. Reconverti dans le conseil aux entreprises, celui qui fut longtemps pressenti pour briguer l’Élysée en 2012 observait avec distance la vie politique française. Mais la possibilité de voir Marine Le Pen ou Jordan Bardella s’installer à l’Élysée dans un an l’a visiblement sorti de sa torpeur.
L’ancien homme fort du PS lance un cri d’alarme
Dans une longue tribune publiée dans le magazine économique Challenges, Dominique Strauss-Kahn dresse un tableau sans concession du paysage politique français à l’aube des présidentielles de 2025. Il y dénonce “l’effondrement des partis traditionnels” et “la polarisation de la vie politique entre deux extrêmes”. Mais c’est surtout pour mettre en garde contre le danger imminent d’une victoire du Rassemblement National que l’ancien patron du FMI prend la plume.
« Au second tour, en cas de duel entre un RN et un PS, un écologiste, un PC, un Renaissance ou un LR, les démocrates sauront sans hésiter comment voter : éliminer le candidat d’extrême droite. »
– Dominique Strauss-Kahn, Challenges, 25 juin 2024
“Voter LFI, le choix du moindre mal”
Mais c’est surtout l’hypothèse d’un second tour opposant le RN à LFI qui préoccupe l’ancien ministre socialiste. DSK reconnait que beaucoup “seront rebutés par les outrances insupportables, les positions indéfendables ou les déclarations méprisables de Jean-Luc Mélenchon”. Mais selon lui, face au danger de l’extrême droite, il n’y a pas à tergiverser :
« Mais il ne faudra pas hésiter non plus. Il faut savoir choisir son meilleur ennemi pour éviter le pire. »
– Dominique Strauss-Kahn, Challenges, 25 juin 2024
DSK met en garde contre le danger d’une victoire du RN, qui selon lui “ne quitte jamais le pouvoir pacifiquement lorsqu’elle l’a conquis”. Il dénonce un parti “xénophobe” qui menacerait selon lui l’État de droit et les libertés fondamentales. Un diagnostic sévère qui le conduit à appeler clairement à voter LFI dans l’hypothèse d’un duel Mélenchon / Le Pen ou Bardella au second tour en 2025.
Un appel qui divise à gauche
Cette prise de position fracassante de l’ancien poids lourd du PS ne manquera pas de faire réagir, alors que la gauche apparait plus divisée que jamais. Si beaucoup saluent le courage de DSK d’appeler clairement à faire barrage au RN, certains dénoncent un “vote utile” qui reviendrait à “cautionner les dérives de LFI”. D’autres s’interrogent sur le soutien d’un homme dont l’image reste entachée par les affaires.
Quoi qu’il en soit, dans un paysage politique en plein bouleversement, l’appel de Dominique Strauss-Kahn résonne comme un électrochoc. Il replace la question du “front républicain” au cœur du débat, à moins d’un an du premier tour. Chacun devra en conscience “choisir son meilleur ennemi pour éviter le pire”. Un choix cornélien qui pourrait bien être l’un des enjeux majeurs de la présidentielle à venir.
