La vice-présidente philippine Sara Duterte se trouve une nouvelle fois dans la tourmente alors qu’une seconde plainte en destitution à son encontre a été déposée ce mercredi. Cette plainte, émanant d’une coalition rassemblant des militants, des enseignants et d’anciens membres du Congrès, accuse Mme Duterte d’avoir trahi la confiance du public en raison du détournement présumé de millions de dollars de fonds publics alors qu’elle occupait le poste de ministre de l’Éducation.
Il s’agit là de la deuxième procédure de destitution initiée contre la vice-présidente cette semaine, après qu’une autre coalition d’activistes ait déposé plainte lundi, l’accusant de corruption et de mauvaise conduite. Ces développements interviennent dans un contexte de vives tensions entre Sara Duterte et le président philippin Ferdinand Marcos, issus des deux familles politiques les plus influentes du pays.
Un soutien incertain au Congrès
Si les accusations portées sont graves, il n’est pour l’heure pas certain que l’une ou l’autre des procédures de destitution obtienne le soutien nécessaire au Congrès pour aboutir. En effet, la Constitution philippine exige qu’un tiers des législateurs appuient la plainte pour qu’elle puisse passer à un procès au Sénat.
De plus, une procédure de destitution ne peut être engagée contre la même personne plus d’une fois par an. La Chambre des représentants, où les plaintes ont été déposées, devra donc soit en choisir une, soit les consolider avant de les soumettre au vote.
Une alliance politique brisée
Ces développements interviennent dans un contexte de rupture spectaculaire de l’alliance entre Sara Duterte et le président Marcos. Élus triomphalement en 2022, les deux dirigeants issus des familles politiques les plus puissantes des Philippines voient leurs relations se dégrader à mesure qu’approchent les élections de mi-mandat prévues l’année prochaine.
Sara Duterte, qui a quitté son poste de ministre de l’Éducation en juin sur fond de tensions croissantes, reste néanmoins constitutionnellement la successeure de Marcos s’il venait à ne pas terminer son mandat de six ans. Une position qui pourrait expliquer l’acharnement de ses opposants à obtenir sa destitution.
Des accusations de complot
Outre les plaintes en destitution, Sara Duterte fait également face à des accusations de complot visant le président Marcos. Lors d’une conférence de presse fin novembre, des propos de la vice-présidente lui ont valu d’être désignée comme le « cerveau » d’un complot visant à éliminer le chef de l’État.
Des accusations que Mme Duterte a qualifiées de « farce », affirmant que ses propos controversés reflétaient simplement sa « consternation » concernant « l’échec (du gouvernement de M. Marcos) à servir les Philippins alors qu’il persécute magistralement ses ennemis politiques ».
Un avenir politique incertain
Alors que les plaintes en destitution suivent leur cours, l’avenir politique de Sara Duterte, 46 ans, apparaît plus incertain que jamais. Fille de l’ancien président Rodrigo Duterte, qui a dirigé le pays de 2016 à 2022, la vice-présidente semblait promise à un destin national.
Mais les tensions croissantes avec le clan Marcos et les accusations de corruption et de complot pourraient sérieusement entacher son image et compromettre ses ambitions. Les prochains mois s’annoncent décisifs pour celle qui incarnait jusqu’à présent la relève politique aux Philippines.
Les yeux sont désormais rivés sur le Congrès, qui devra statuer sur les plaintes déposées, mais aussi sur la justice, saisie des accusations de complot. Dans un pays où la politique se conjugue souvent avec les affaires de clan, cette nouvelle crise au sommet de l’État ne manquera pas de rebattre les cartes à l’approche d’échéances électorales cruciales.