Le Kenya fait face à une pression internationale croissante suite à une vague inquiétante d’arrestations arbitraires et de disparitions forcées signalées ces derniers mois dans le pays. Neuf nations occidentales, par la voix de leurs hauts diplomates en poste à Nairobi, ont publié jeudi un communiqué conjoint appelant le gouvernement kényan à ouvrir des enquêtes approfondies sur ces incidents préoccupants.
Cette démarche intervient alors que le Kenya s’apprête à siéger au Conseil des droits de l’homme (CDH) de l’ONU à partir de janvier 2025, une position qui implique un engagement ferme en faveur de la défense des droits humains. Les diplomates occidentaux soulignent que « des enquêtes rapides et transparentes permettront au Kenya de démontrer au monde son engagement à défendre les droits » dans le cadre de son futur mandat au sein du CDH.
Une vague de répression qui inquiète
Ces appels interviennent dans un contexte de tensions sociales et politiques au Kenya. Le pays a été secoué en juin et juillet par d’importantes manifestations contre un projet de loi de finances prévoyant de nouvelles hausses d’impôts, très impopulaires après des années d’inflation élevée et de scandales de corruption. Selon des ONG de défense des droits humains, la répression violente de ces manifestations par les forces de l’ordre aurait fait au moins 60 morts, tandis que des dizaines d’autres personnes sont portées disparues.
Des sources proches des milieux militants rapportent également une série d’arrestations ciblant des figures de la société civile et des activistes de premier plan ces dernières semaines. Le célèbre militant kényan Boniface Mwangi aurait ainsi passé une nuit en prison après avoir été interpellé chez lui, avant d’être relâché sans qu’aucune charge ne soit retenue contre lui. Fin septembre, c’est l’activiste David Morara Kebaso, très suivi sur les réseaux sociaux pour ses dénonciations de la corruption, qui aurait été interpellé en pleine rue par des hommes masqués, selon des médias locaux.
Un défi pour la crédibilité du Kenya
Face à ces incidents, les diplomates occidentaux prennent note de l’engagement du président William Ruto à ce que de tels événements ne se reproduisent pas sous sa direction et que les responsables soient traduits en justice. Mais ils soulignent que des actes concrets sont maintenant nécessaires pour restaurer la confiance, alors que le Kenya s’apprête à endosser un rôle majeur sur la scène internationale en matière de droits humains.
L’élection du Kenya au Conseil des droits de l’homme de l’ONU pour la période 2025-2027 avait déjà suscité des réserves de la part de certaines organisations, malgré le processus de répartition régionale des sièges qui ne laissait pas de place à une véritable compétition pour le groupe Afrique. Avec ces nouvelles affaires, c’est la capacité du gouvernement kényan à incarner de manière crédible les valeurs de défense des droits humains qui est directement questionnée.
Le Kenya aura fort à faire pour convaincre la communauté internationale de la sincérité de son engagement en faveur des droits humains. Le pays joue son image et sa réputation sur la scène diplomatique.
Un analyste politique sous couvert d’anonymat
Le Kenya face à ses responsabilités
Pour regagner la confiance, des observateurs estiment que le gouvernement kényan doit maintenant aller au-delà des promesses et passer à l’action en diligentant rapidement des enquêtes indépendantes et transparentes sur tous les cas signalés de violations des droits humains.
Des mesures concrètes sont aussi attendues pour s’attaquer aux racines de la colère sociale et restaurer la confiance des citoyens envers les institutions : lutte résolue contre la corruption, réponses aux préoccupations sur le coût de la vie, dialogue apaisé avec la société civile. Autant de défis majeurs pour le président William Ruto s’il veut réellement ouvrir une nouvelle page et permettre au Kenya d’assumer avec crédibilité son rôle au Conseil des droits de l’homme de l’ONU.
Le monde entier aura assurément les yeux rivés sur les prochaines actions et décisions des autorités kényanes. L’enjeu n’est autre que la place du Kenya au sein des nations engagées en faveur des droits humains et de l’État de droit.