Ce jeudi, le parvis du Grand Palais à Paris a été le théâtre d’une manifestation inhabituelle. Des agriculteurs membres du syndicat de la Confédération paysanne se sont rassemblés pour exprimer leur mécontentement face à la dérégulation des marchés céréaliers. Leur cible : une réunion européenne de grands acteurs du commerce des céréales qui se tenait à l’intérieur du monument.
Arborant une grande banderole jaune proclamant « Sauvez les paysan.n.es, mangez un trader », une centaine de manifestants ont déposé des bottes de paille devant l’entrée. Certains ont même réussi à s’introduire brièvement dans le bâtiment pour en ressortir avec des pancartes « Syngenta » et « InVivo », respectivement fabricant de pesticides et géant français du négoce de grains.
Un accord de libre-échange controversé
Cette action coup de poing intervient alors que s’ouvre en Uruguay le sommet du Mercosur. Lors de cette réunion, le bloc économique sud-américain pourrait signer avec l’Union européenne un accord de libre-échange vivement critiqué par les organisations agricoles françaises et de nombreux pays européens.
Laurence Marandola, porte-parole de la Confédération paysanne, a dénoncé sans détour « la spéculation sur les produits agricoles ». Selon elle, « à l’intérieur, il y a des gars en costard-cravate qui se gavent sur le dos des paysans ». Le syndicat, héritier des luttes altermondialistes, est le troisième plus représentatif en France.
Revendications et tensions
Au cœur des revendications des manifestants : l’exigence de « prix rémunérateurs plutôt que des traders ». Leur slogan « Traders tremblez, les paysans reprennent leur blé » résonnait devant le Grand Palais, sous le regard interloqué des participants à la réunion en costume coincés à l’extérieur.
L’arrivée de forces de l’ordre casquées une vingtaine de minutes après le début de l’action a donné lieu à quelques tensions et bousculades. Les policiers ont bloqué les manifestants pendant plus d’une heure avant de procéder à cinq interpellations, selon la Confédération paysanne.
Un avenir incertain
Cette manifestation met en lumière les inquiétudes profondes du monde agricole face à la libéralisation des échanges. Alors que le sort de l’accord entre l’UE et le Mercosur reste en suspens, la gronde des paysans européens ne faiblit pas.
D’après une source proche des négociations, les discussions s’annoncent longues et complexes, tant les intérêts divergent de part et d’autre de l’Atlantique. Les prochains mois seront décisifs pour savoir si un compromis est possible, ou si la fronde des agriculteurs fera dérailler ce projet d’accord commercial XXL.
Une chose est sûre : la mobilisation des syndicats agricoles, à l’image de l’action de la Confédération paysanne ce jeudi à Paris, ne risque pas de faiblir tant que leurs craintes et revendications ne seront pas entendues. L’avenir de milliers d’exploitations familiales en dépend.