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Depuis une Tente à Gaza, une Mère Coache l’Équipe Nationale Palestinienne

À des milliers de kilomètres, dans une tente bombardée de Gaza, une mère suit chaque match de l’équipe nationale palestinienne et dicte la stratégie à son fils, le sélectionneur. Quand le réseau passe, elle ne parle que de football… jusqu’où ira cette histoire incroyable ?

Imaginez recevoir vos consignes tactiques pour un match décisif depuis une tente de fortune, au milieu des ruines, sous les coupures d’électricité et les alertes aériennes. C’est pourtant la réalité quotidienne d’Ehab Abou Jazar, sélectionneur de l’équipe nationale palestinienne de football.

Une mère devenue co-entraîneuse à distance

À Doha, Ehab Abou Jazar, 45 ans, prépare ses joueurs pour la Coupe arabe. À Gaza, sa mère, que tout le monde appelle Oum Ehab, vit dans une tente après la destruction de la maison familiale. Entre eux : des milliers de kilomètres, une connexion téléphonique aléatoire.

Mais dès que le réseau fonctionne, la conversation ne porte que sur le football.

« Elle ne me parle jamais des bombardements ou de la peur. Elle me demande seulement qui sera titulaire, qui est blessé, quel sera le schéma tactique et comment va le moral des garçons », raconte l’ancien arrière gauche avec un sourire ému.

Pour suivre les matchs, la famille met de côté l’essence du générateur des jours à l’avance. Rien ne doit entraver ce moment de fierté collective.

Un championnat arrêté, des rêves intacts

Depuis l’attaque du 7 octobre 2023 et l’offensive israélienne qui a suivi, plus aucun match officiel n’a eu lieu à Gaza ni en Cisjordanie. Les clubs sont à l’arrêt, les stades endommagés ou réquisitionnés. Pourtant, l’équipe nationale continue de porter haut les couleurs palestiniennes à l’étranger.

La plupart des joueurs actuels n’ont jamais foulé le sol de Gaza. Ils sont nés en diaspora ou dans les camps de réfugiés. Mais ils se battent pour ceux qui restent.

« Nous disons toujours que nous sommes une petite famille palestinienne qui représente tout un peuple », explique Ehab Abou Jazar. Cette phrase prend tout son sens quand on sait que le sélectionneur passe ses nuits à vérifier que ses proches sont vivants.

La résilience comme héritage génétique

Le mot régilience revient sans cesse dans la bouche du coach. Il l’a appris très tôt.

« Nous avons la résilience dans les gènes. Si nous abandonnons, nous disparaissons en tant que peuple. »

Cette conviction, il cherche à la transmettre à ses joueurs. Même quand les nouvelles de Gaza sont terribles. Même quand il apprend que la tente familiale a encore été déplacée plus au sud.

La fragile trêve entrée en vigueur le 10 octobre, sous pression internationale, a redonné un peu d’espoir. Mais deux années de conflit ont laissé des traces indélébiles.

Un simple match nul pour écrire l’histoire

Au moment où ces lignes sont écrites, l’équipe palestinienne dispute son dernier match décisif contre la Syrie dans la Coupe arabe de la FIFA. Un match nul suffit pour atteindre les quarts de finale – une première historique.

96e nation au classement FIFA, la Palestine n’a jamais participé à une Coupe du monde. L’élimination face à Oman cet été a été douloureuse. Mais aujourd’hui, chaque joueur sait qu’il porte bien plus qu’un maillot.

« Quand nous jouons, nous offrons un peu d’air à tout un peuple épuisé », confie le sélectionneur. Quelques minutes de joie dans une vie rythmée par les sirènes et les pénuries.

Le football comme acte de résistance

Dans les tentes de Rafah ou de Khan Younès, les transistors et les vieux téléviseurs se branchent dès que l’électricité revient. Les enfants oublient un instant la faim pour encourager les leurs.

Oum Ehab, elle, ne rate rien. Elle analyse, commente, corrige. Parfois, elle appelle après le match pour féliciter ou pour gronder gentiment quand une occasion a été vendangée.

« Elle vit le football comme si elle était sur le banc de touche », s’amuse son fils. Et dans un sens, elle y est.

Plus qu’un sélectionneur, un passeur d’espoir

Ehab Abou Jazar a raccroché les crampons en 2017. Il a pris les rênes de la sélection en 2024, en plein chaos. Il aurait pu refuser. Beaucoup l’auraient compris.

Mais sa mère n’a jamais envisagé qu’il abandonne.

Au téléphone, elle répète inlassablement la même phrase : « Le peuple a besoin de te voir gagner, même de loin. »

Alors il continue. Il motive, il console, il remotive. Il transforme l’angoisse en énergie positive. Et quand un joueur craque en apprenant qu’un proche a été blessé, il lui raconte l’histoire de cette mère qui, sous une tente, arrive encore à sourire en parlant de football.

Jusqu’au dernier souffle

« Tout ceci nous pousse à nous battre sur le terrain jusqu’à notre dernier souffle », assure le coach.

Parce que chaque victoire, même petite, est une réponse au monde. Une preuve que les Palestiniens peuvent exceller, créer, rêver, même quand on veut les réduire au silence.

Et tant que la voix d’Oum Ehab franchira les checkpoints numériques pour parvenir jusqu’à Doha, l’équipe nationale palestinienne ne sera jamais seule.

Un téléphone, une mère indestructible, vingt-deux joueurs et un peuple entier derrière eux. Parfois, le football raconte les plus belles histoires de résistance.

Quand une mère réfugiée dans une tente devient la plus grande source d’inspiration d’une équipe nationale, le sport dépasse tous les terrains.

L’histoire d’Ehab et d’Oum Ehab n’est pas seulement une anecdote touchante. C’est un symbole. Celui d’un peuple qui refuse de plier, même quand tout semble perdu.

Et tant que le ballon roulera, même à des milliers de kilomètres de chez lui, la Palestine continuera de marquer des buts. Dans les cœurs, d’abord. Sur le terrain, ensuite.

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