En 2024, la France a connu une légère augmentation du nombre de médecins en activité régulière, avec 1672 praticiens supplémentaires par rapport à l’année précédente. Cette hausse de 0,8% pourrait sembler encourageante, mais elle ne doit pas masquer les profondes inégalités territoriales qui persistent dans l’accès aux soins. L’Atlas de la démographie médicale, publié chaque année par l’Ordre des médecins, met en lumière ces disparités et soulève des questions cruciales pour l’avenir de notre système de santé.
Un frémissement de la démographie médicale
Après une décennie de baisse, le nombre de médecins en activité régulière semble enfin se stabiliser. Avec 199 089 praticiens au 1er janvier 2024, l’effectif retrouve un niveau comparable à celui de 2014. Le docteur Jean-Marcel Mourgues, vice-président du conseil national de l’Ordre des médecins, évoque un « frémissement » et une tendance « sur un plateau en légère ascension ». Autre signal positif : l’âge moyen des médecins continue de baisser, passant de 48,6 ans en 2023 à 48,1 ans en 2024.
Cette évolution s’explique notamment par l’augmentation progressive du numerus clausus depuis la fin des années 1990. Cette politique d’encadrement du nombre d’étudiants en médecine, mise en place dans les années 1970, avait atteint son niveau le plus bas dans les années 1990 avec seulement 3500 étudiants formés chaque année. Aujourd’hui, ce sont près de 11 000 futurs médecins qui rejoignent les bancs de la faculté, et ce chiffre devrait atteindre 12 000 en 2025.
Des inégalités territoriales qui se creusent
Malgré ces signes encourageants, force est de constater que les inégalités territoriales en matière d’accès aux soins ne cessent de s’aggraver. Comme le souligne le docteur Mourgues, « les départements qui ont des hôpitaux universitaires, à de rares exceptions près, ont tendance à augmenter et rajeunir leur population médicale », tandis que « les départements plutôt en périphérie de région, avec souvent un profil rural et une population âgée » voient leur situation se dégrader.
Ainsi, les départements situés au centre de la métropole, autour du bassin parisien, sont parmi les moins bien dotés. L’Indre compte seulement 145,9 médecins pour 100 000 habitants, l’Eure 147,4 et le Cher 152,2. À l’inverse, Paris affiche une densité médicale de 697,4 médecins pour 100 000 habitants, les Hautes-Alpes 432,4 et le Rhône 414.
Les inégalités territoriales se creusent toujours davantage.
– Docteur Jean-Marcel Mourgues, vice-président du conseil national de l’Ordre des médecins
Des enjeux cruciaux pour l’avenir
Face à ces disparités, il est urgent d’agir pour garantir un accès équitable aux soins sur l’ensemble du territoire. Cela passe notamment par une meilleure répartition des médecins, en incitant les jeunes praticiens à s’installer dans les zones sous-dotées. Des mesures comme les aides à l’installation, les contrats d’engagement de service public ou encore le développement de la télémédecine peuvent y contribuer.
Mais au-delà de la question du nombre de médecins, c’est tout notre système de santé qui doit être repensé pour répondre aux défis du vieillissement de la population et de l’augmentation des maladies chroniques. Cela implique de renforcer la prévention, de développer la coordination entre les différents acteurs de santé et de promouvoir de nouveaux modes d’exercice, comme les maisons de santé pluriprofessionnelles.
Les chiffres de la démographie médicale pour 2024 sont un signal d’alerte. Ils nous rappellent l’urgence d’agir pour construire un système de santé plus juste, plus efficace et plus résilient. C’est un enjeu majeur pour les années à venir, qui engage notre responsabilité collective.