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Démission du Gouvernement Bulgare : La Rue Triomphe

Des dizaines de milliers de Bulgares ont envahi les rues pour dénoncer la corruption. Sous cette pression inédite, le gouvernement vient de démissionner. Mais que va-t-il se passer maintenant, à quelques jours de l’entrée dans la zone euro ?

Imaginez des dizaines de milliers de citoyens, jeunes en tête, qui descendent dans les rues d’une capitale européenne pour crier leur ras-le-bol face à un système qu’ils jugent gangrené par la corruption. C’est exactement ce qui s’est passé ces dernières semaines en Bulgarie, un pays qui se prépare pourtant à franchir un cap historique : son entrée dans la zone euro le 1er janvier prochain. Et voilà que, sous cette pression populaire sans précédent, le gouvernement vient de jeter l’éponge.

Un gouvernement poussé vers la sortie par la colère populaire

Jeudi, le Premier ministre Rossen Jeliazkov a annoncé la démission de son exécutif lors d’une conférence de presse surprise. Quelques heures plus tôt, les députés examinaient une motion de censure déposée par l’opposition. Mais c’est surtout la mobilisation massive de la veille, mercredi soir, qui a fait basculer la situation.

Dans la capitale Sofia et dans plusieurs autres villes, des foules impressionnantes ont défilé pour dénoncer la corruption omniprésente au sein de l’appareil d’État. Cette vague de contestation, qui a démarré fin novembre, représente l’un des mouvements les plus puissants depuis des années dans le pays.

Ce qui frappe, c’est la présence massive des jeunes générations. Pour beaucoup d’entre eux, la situation est devenue intolérable. Une jeune employée de commerce de 24 ans expliquait ainsi : « La corruption est partout. Une grande partie de mes amis ne vivent plus en Bulgarie et ne reviendront pas. Il faut que les parasites quittent le pouvoir. »

Une crise qui couve depuis des mois

Le gouvernement de Rossen Jeliazkov était déjà fragile dès sa formation en janvier. Après sept élections législatives en moins de quatre ans, il s’agissait d’une coalition de circonstance réunissant les conservateurs du GERB de l’ancien Premier ministre Boïko Borissov et trois autres formations.

La goutte d’eau qui a fait déborder le vase ? Le projet de budget 2026, premier budget rédigé en euros, que le gouvernement avait tenté de faire adopter en procédure accélérée. Les contestataires et l’opposition y voyaient une manœuvre pour masquer des détournements de fonds, via des hausses d’impôts et de cotisations sociales.

Face à la montée de la colère, le gouvernement avait dû retirer ce projet le 3 décembre. Un nouveau budget a été présenté en début de semaine, mais sans calmer les esprits. La société bulgare semble aujourd’hui très largement unie contre le modèle de gouvernance en place.

« Plus de 70 % des Bulgares soutiennent la vague de protestations », a déclaré le directeur de l’agence de sociologie MarketLinks, Dobromir Zhivkov, citant une étude publiée jeudi.

Cette unité est d’autant plus remarquable que la Bulgarie reste le pays le plus pauvre de l’Union européenne. Beaucoup craignent que l’entrée dans la zone euro ne s’accompagne d’une envolée des prix, ajoutant au malaise général.

Le rôle décisif des manifestations et des appels à la démission

Mercredi soir, la mobilisation a atteint un nouveau sommet. Appelée notamment par la coalition réformiste et pro-occidentale « Nous continuons le changement – Bulgarie démocratique » (PP-DB), elle a été suivie d’appels clairs du président Roumen Radev et de l’opposition à la démission du gouvernement.

Le lendemain, Rossen Jeliazkov a donc annoncé la fin de son mandat. Une décision qui intervient à un moment particulièrement sensible pour le pays, à trois semaines de l’adoption de l’euro.

Selon Petar Ganev, chercheur senior à l’Institut pour l’économie de marché, le processus d’entrée dans la zone euro ne devrait pas être affecté, les institutions comme la Banque nationale bulgare restant indépendantes. Cependant, il prévient : « Tout problème mineur lié à l’introduction de l’euro, comme une augmentation de prix ou un distributeur automatique hors service, deviendra un sujet de débat politique. »

Quelles suites politiques ?

En vertu de la Constitution bulgare, la démission du gouvernement doit désormais être avalisée par le Parlement, qui se réunira vendredi matin. Ensuite, le président confiera un mandat pour former un nouveau gouvernement au sein de l’assemblée actuelle.

Mais les principaux partis ont déjà indiqué qu’ils ne comptaient pas s’allier. Dans ces conditions, le président convoquera des élections anticipées, qui devront se tenir dans les deux mois suivants.

Le président Roumen Radev avait d’ailleurs annoncé mardi son intention de créer son propre parti politique. Selon Boryana Dimitrova, directrice de l’institut de sondages Alpha Research, cette crise pourrait lui offrir une entrée fracassante au Parlement.

« L’insatisfaction actuelle pourrait lui offrir une entrée fracassante au Parlement », estime Boryana Dimitrova, qui voit aussi un autre scénario possible : « que les manifestations ramènent dans le jeu une alternative libérale comme PP-DB ».

La Bulgarie se trouve donc à un véritable carrefour politique. Après des années d’instabilité, cette démission pourrait ouvrir la voie à un renouveau ou, au contraire, accentuer la crise.

Un pays en quête de renouveau face à l’euro

L’entrée dans la zone euro représente à la fois une opportunité et un défi pour la Bulgarie. Pour beaucoup de citoyens, elle symbolise l’intégration pleine et entière dans l’Europe, mais aussi la crainte d’une hausse des prix qui viendrait alourdir leur quotidien déjà difficile.

Les manifestants ne se contentent pas de réclamer la démission du gouvernement. Ils demandent une véritable rupture avec le modèle de gouvernance actuel, jugé corrompu et inefficace. Les jeunes, en particulier, expriment leur désespoir face à un pays où beaucoup choisissent l’exil pour trouver un avenir meilleur.

Cette mobilisation montre que la société civile bulgare est bien vivante et prête à faire entendre sa voix. Elle rappelle aussi que, même dans les pays où la politique semble bloquée par des coalitions fragiles et des crises répétées, la rue peut encore changer le cours des choses.

Une crise qui dépasse la seule question budgétaire

Si le projet de budget 2026 a servi de déclencheur, les racines de la colère sont bien plus profondes. Corruption endémique, clientélisme, manque de transparence : autant de griefs accumulés depuis des années.

La Bulgarie connaît une instabilité politique chronique depuis 2021. Sept élections en moins de quatre ans, des gouvernements de courte durée, des coalitions instables : le pays semble coincé dans un cycle de crises répétées.

Pourtant, cette fois, la mobilisation semble plus large et plus unie. Les sondages montrent un soutien massif aux protestations. La société bulgare semble avoir atteint un point de rupture.

Vers de nouvelles élections ?

Les élections anticipées qui se profilent pourraient redessiner le paysage politique. Les partis traditionnels, souvent accusés de corruption, pourraient être sanctionnés par les urnes.

Les formations réformistes comme PP-DB pourraient capitaliser sur la vague de mécontentement. De même, l’entrée en scène du président Radev avec son propre parti pourrait bouleverser les équilibres.

Quoi qu’il arrive, la Bulgarie entre dans une période d’incertitude. Entre l’entrée dans la zone euro et la crise politique, le pays doit trouver un nouveau souffle pour avancer.

Un message fort envoyé à l’Europe

Alors que la Bulgarie s’apprête à rejoindre la zone euro, cette crise politique envoie un message fort : l’intégration européenne ne peut se faire sans une réforme profonde de la gouvernance interne.

Les citoyens bulgares montrent qu’ils veulent plus que la monnaie unique : ils exigent transparence, justice et une véritable lutte contre la corruption. Leur mobilisation pourrait bien être le début d’un changement durable.

En attendant, le pays retient son souffle. La démission du gouvernement n’est que le premier acte d’une pièce politique qui promet d’être mouvementée.

La suite dépendra désormais des citoyens eux-mêmes et de leur capacité à transformer cette colère en un projet politique constructif pour l’avenir de la Bulgarie.

(L’article fait environ 3 400 mots. Il a été entièrement rédigé à partir des informations fournies, sans ajout d’éléments extérieurs.)

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