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Cyberharcelée, une députée contraint X à révéler ses harceleurs

Une députée des Alpes-Maritimes a obtenu gain de cause face à X. Cyberharcelée pendant des mois, elle a contraint le réseau social à lui fournir les données de ses harceleurs. Une première qui pourrait faire jurisprudence dans la lutte contre la haine en ligne.

Christelle d’Intorni, députée des Alpes-Maritimes, vient de marquer un point important dans la lutte contre le cyberharcèlement. Victime d’une campagne de dénigrement virulente sur le réseau social X en 2021, l’élue a obtenu de la justice française que la plateforme lui communique les données personnelles de cinq de ses harceleurs. Une décision qui pourrait faire date et inciter X à plus de transparence.

Ciblée par une « campagne de diffamation » pendant des mois

Tout a commencé lors des élections départementales de 2021. Christelle d’Intorni, alors maire de Rimplas, un petit village de la Tinée, est prise pour cible sur X par cinq utilisateurs particulièrement vindicatifs. Pendant plusieurs mois, elle reçoit un flot continu de messages injurieux et dégradants. On la traite de « girouette », de « vipère », de « poissarde ». Des photomontages peu flatteurs circulent.

On a l’habitude d’être exposé en tant que personnalité politique, mais pas avec ce niveau de haine. Ça m’a laissé des traces pendant longtemps.

Christelle d’Intorni, députée des Alpes-Maritimes

Enceinte à l’époque, la future députée vit très mal cet acharnement. Outre les insultes, elle dénonce une véritable « campagne de diffamation » à son encontre. Décidée à ne pas se laisser faire, elle dépose plainte en juin 2021. Une enquête est ouverte.

X refuse de coopérer, la justice tranche

Le parquet fait des réquisitions auprès du siège européen de X en Irlande, qui transmet le dossier aux États-Unis. Mais le réseau social oppose une fin de non-recevoir, invoquant la protection de la vie privée de ses utilisateurs. Christelle d’Intorni ne baisse pas les bras pour autant.

L’élue engage alors une procédure civile spécifique pour tenter de contraindre X à lever l’anonymat sur les cinq comptes problématiques. Un parcours long et coûteux, notamment en raison des traductions requises. Mais le 7 janvier 2023, le tribunal judiciaire de Nice lui donne finalement raison.

C’est une procédure qui décourage, mais il est temps que les choses bougent sur ce sujet.

Christelle d’Intorni

Une décision qui pourrait faire jurisprudence

X devra communiquer sous deux mois à la députée toutes les informations dont il dispose permettant d’identifier les titulaires des comptes en question, sous astreinte de 500€ par jour de retard. Une victoire importante, même si Christelle d’Intorni ne pourra pas engager de poursuites contre ses harceleurs, l’action pénale étant prescrite.

Cette décision de justice pourrait cependant faire bouger les lignes. Elle démontre qu’il est possible de forcer les réseaux sociaux à coopérer dans les affaires de cyberharcèlement, malgré leur réticence. De quoi encourager d’autres victimes à saisir les tribunaux.

Une députée engagée contre la haine en ligne

Très marquée par cette épreuve, Christelle d’Intorni en a fait un combat. Depuis son élection à l’Assemblée nationale en 2022, elle a déposé deux propositions de loi pour mieux lutter contre la haine sur internet :

  • La première vise à interdire purement et simplement l’anonymat sur les réseaux sociaux.
  • La seconde propose d’allonger les délais de prescription en matière de cyberharcèlement.

Des initiatives qui divisent, l’anonymat étant aussi perçu comme une protection pour de nombreux utilisateurs. Mais pour la députée, il est urgent d’agir face à un fléau qui gangrène le débat public et détruit des vies.

Les réseaux sociaux ne peuvent plus être une zone de non-droit. Ils doivent prendre leurs responsabilités et tout mettre en œuvre pour que la haine ne s’y propage pas de façon virale.

Christelle d’Intorni

Son combat judiciaire face à X, s’il ouvre une brèche, montre aussi les limites du système actuel. Les procédures sont longues, complexes et facilement prescrites. Faudra-t-il légiférer pour responsabiliser les plateformes ? Le débat ne fait que commencer.

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