Haïti traverse une nouvelle crise politique majeure. Selon des sources proches du dossier, le Conseil présidentiel de transition a pris la décision de limoger le Premier ministre Garry Conille, en poste depuis seulement cinq mois. Cette décision, qui sera officialisée lundi dans le journal officiel, marque un nouveau rebondissement dans l’instabilité chronique qui mine le pays des Caraïbes.
Un Premier ministre impuissant face à la violence des gangs
Nommé en juin dernier, Garry Conille avait pour mission de stabiliser Haïti, gangréné par la violence des gangs qui contrôlent désormais 80% de la capitale Port-au-Prince. Mais malgré ses efforts, la situation sécuritaire n’a cessé de se dégrader. En juillet, le Premier ministre a même dû être évacué d’urgence d’un quartier de la capitale où des membres de gang avaient ouvert le feu.
Selon des sources proches du dossier, le limogeage de Garry Conille fait suite à plusieurs semaines de conflit avec le Conseil présidentiel de transition. Ce dernier souhaitait changer les responsables de plusieurs ministères clés, contre l’avis du Premier ministre. Dans un mail obtenu par l’AFP, Garry Conille dénonce “l’illégalité” de la décision du Conseil.
Haïti, un pays en proie à une instabilité chronique
Cette crise politique n’est malheureusement pas une surprise pour Haïti. Depuis des décennies, le pays est gangrené par une instabilité chronique, marquée par de fréquents changements de gouvernement et une corruption endémique. En 2021, l’assassinat du président Jovenel Moïse avait plongé le pays dans le chaos.
Haïti est pris dans un cercle vicieux d’instabilité politique et de violence. Chaque nouvelle crise enfonce un peu plus le pays dans la pauvreté et le désespoir.
Un diplomate occidental en poste à Port-au-Prince
Des élections sans cesse repoussées
Après la démission du controversé Premier ministre Ariel Henry en avril, des autorités de transition ont été mises en place. Leur mission : rétablir la sécurité et organiser des élections, les dernières remontant à 2016. Mais la résurgence de la violence des gangs complique considérablement cette tâche.
En septembre, lors d’une visite en Haïti, le secrétaire d’État américain Antony Blinken avait appelé les autorités de transition à s’engager rapidement vers des élections. Mais avec le limogeage de Garry Conille, cet objectif semble s’éloigner un peu plus.
Une situation humanitaire catastrophique
Au-delà de la crise politique, c’est tout le pays qui sombre dans le chaos. La violence des gangs et une situation humanitaire désastreuse ont forcé plus de 700 000 personnes, dont la moitié sont des enfants, à fuir leur domicile pour trouver refuge ailleurs dans le pays, selon l’ONU.
En dépit du déploiement d’une mission multinationale de soutien à la police haïtienne, forte de 400 hommes et soutenue par l’ONU et les États-Unis, la situation ne cesse de s’aggraver. Jeudi, les Nations unies ont mis en garde contre une aggravation des niveaux de faim dans le pays.
La communauté internationale impuissante
Face à cette descente aux enfers, la communauté internationale semble bien impuissante. Malgré les appels répétés à l’aide du gouvernement haïtien, l’aide internationale peine à se concrétiser. Les pays donateurs rechignent à s’engager dans un pays où la corruption et l’instabilité politique règnent en maîtres.
Sans une aide massive et coordonnée de la communauté internationale, Haïti risque de sombrer définitivement dans le chaos. Mais cette aide ne pourra être efficace que si les autorités haïtiennes s’engagent résolument dans la voie de la stabilité et de la bonne gouvernance.
Un expert des questions haïtiennes
Un avenir plus qu’incertain
Avec le limogeage de Garry Conille, c’est un nouveau chapitre d’incertitude qui s’ouvre pour Haïti. Le pays semble pris dans une spirale infernale dont il peine à sortir. Sans une prise de conscience des élites politiques et un sursaut national, il est à craindre que le pays ne continue de s’enfoncer dans le chaos.
Les prochaines semaines seront cruciales pour l’avenir d’Haïti. Le Conseil présidentiel de transition devra rapidement nommer un nouveau Premier ministre et clarifier sa feuille de route. Mais au-delà des hommes, c’est tout un système politique gangrené par la corruption et les luttes de pouvoir qu’il faudra réformer en profondeur pour redonner espoir au peuple haïtien.