Une crise gouvernementale sans précédent secoue actuellement les Pays-Bas. Selon des sources proches du dossier, la secrétaire d’État aux Finances Nora Achahbar, 42 ans, s’apprêterait à présenter sa démission ce vendredi. En cause : des propos qu’elle juge « racistes », tenus lors d’un Conseil des ministres houleux dans le sillage des violentes attaques anti-israéliennes qui ont eu lieu à Amsterdam la semaine dernière.
Les faits remontent à la nuit du 7 au 8 novembre. Après un match de Ligue Europa entre l’Ajax Amsterdam et le Maccabi Tel-Aviv, des supporteurs israéliens ont été pourchassés et passés à tabac dans les rues de la capitale néerlandaise. Des incidents qui se sont produits dans un contexte de tensions communautaires exacerbées, sur fond de montée des actes antisémites, anti-israéliens et islamophobes en Europe depuis le début de la guerre à Gaza.
Un député d’extrême droite accuse les « musulmans » et les « Marocains »
Au lendemain de ces violences, le chef du Parti pour la Liberté (PVV), formation d’extrême droite et premier parti du pays, n’a pas hésité à les imputer aux « musulmans » et aux « Marocains ». Des déclarations explosives de la part de Geert Wilders, dont le parti a remporté les élections il y a un an et détient la majorité au sein de la coalition gouvernementale.
C’est dans ce contexte tendu qu’une réunion de crise a été convoquée lundi dernier. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que l’ambiance était électrique autour de la table du Conseil des ministres. D’après certains témoins, les choses se seraient envenimées et des propos racistes auraient fusé, suscitant la colère de Nora Achahbar. La secrétaire d’État, membre du petit parti anticorruption NSC, aurait alors fait part de ses vives objections.
Le gouvernement au bord de l’implosion
Si Mme Achahbar venait effectivement à claquer la porte comme annoncé, cela pourrait avoir un effet domino dévastateur. Le NSC, avec ses 20 députés, est un maillon essentiel de la coalition. Son départ priverait le gouvernement de sa précieuse majorité à la chambre basse du Parlement. D’autres ministres du parti, ulcérés par les propos jugés discriminatoires, seraient déjà sur le point de suivre l’exemple de leur consœur et de démissionner à leur tour.
Le gouvernement néerlandais n’a jamais semblé aussi fragile. Cette crise pourrait bien signer son arrêt de mort.
– Un analyste politique
Le Premier ministre et les dirigeants des partis au pouvoir se sont réunis en urgence ce vendredi à La Haye pour tenter de déminer la situation. Mais l’incendie semble déjà trop virulent pour être maîtrisé. Tiraillée par les tensions communautaires et minée par les dissensions internes, la coalition paraît au bord de l’implosion. Et le pays pourrait bien être précipité dans une crise politique majeure.
Les Pays-Bas face au spectre de nouvelles élections
Si le pire devait se produire, le pays n’aurait d’autre choix que de retourner aux urnes. Un nouveau scrutin qui serait évidemment riche en incertitudes dans le contexte actuel. Avec en toile de fond, la montée inexorable des populismes et le spectre d’une aggravation des fractures qui minent la société néerlandaise.
Ce feuilleton politique haletant nous rappelle à quel point le poison du racisme et de l’intolérance peut gangrener une démocratie et faire voler en éclats ses fragiles équilibres. Il met aussi en lumière les profondes lignes de faille qui traversent de nombreux pays européens, où la peur de l’autre et le repli identitaire ne cessent de gagner du terrain. Un constat inquiétant qui doit tous nous interpeller.