En pleine guerre contre le Hamas à Gaza, Israël traverse une crise politique majeure. Un parti ultra-orthodoxe, Judaïsme unifié de la Torah, a claqué la porte de la coalition au pouvoir, mettant en péril la fragile majorité du Premier ministre Benjamin Netanyahu. Cette décision, motivée par un désaccord sur la conscription militaire, ravive un débat brûlant dans la société israélienne : pourquoi certains jeunes orthodoxes échappent-ils au service militaire alors que le pays est en guerre ? Ce conflit interne, mêlé aux défis d’un conflit extérieur, expose les fractures profondes d’une nation sous pression.
Une Coalition Fragilisée par un Départ Controversé
Le retrait du parti ultra-orthodoxe, annoncé en début de semaine, a secoué la scène politique israélienne. Avec seulement 61 sièges sur 120 au Parlement, la coalition de Netanyahu se retrouve sur un fil. Ce départ n’est pas anodin : il intervient dans un contexte de tensions croissantes autour de la question de la conscription, un sujet qui divise profondément la société israélienne.
Le parti Judaïsme unifié de la Torah a justifié sa décision par l’échec du gouvernement à garantir une exemption du service militaire pour les étudiants des yeshivas, ces écoles talmudiques où les jeunes ultra-orthodoxes étudient les textes religieux. Cette exemption, en place depuis des décennies, est de plus en plus contestée, notamment en temps de guerre, où les besoins en effectifs militaires sont criants.
« Ces politiciens s’efforcent d’empêcher les jeunes orthodoxes de rejoindre leurs pairs héroïques, qui défendent le peuple d’Israël. »
Naftali Bennett, ancien Premier ministre
Cette citation, publiée sur les réseaux sociaux, reflète l’indignation de nombreux Israéliens face à ce qu’ils perçoivent comme une injustice. Alors que l’armée israélienne déplore la perte de soldats à Gaza, l’idée qu’une partie de la population échappe à ses obligations militaires suscite une colère croissante.
La Conscription : Un Débat Historique Ravivé par la Guerre
La question de la conscription en Israël n’est pas nouvelle. Depuis la création de l’État en 1948, les étudiants des yeshivas bénéficient d’une exemption, une mesure initialement conçue pour préserver l’étude religieuse dans une société naissante. Mais ce privilège, autrefois accepté, est aujourd’hui vu comme une inégalité flagrante, surtout dans un pays où le service militaire est obligatoire pour la plupart des citoyens à partir de 18 ans.
Avec la guerre à Gaza, déclenchée par l’attaque du Hamas le 7 octobre 2023, la pression pour une réforme s’intensifie. L’offensive terrestre israélienne, lancée le 27 octobre 2023, a coûté la vie à 458 soldats, selon les chiffres officiels. Chaque perte renforce l’appel à une mobilisation plus équitable, y compris parmi les ultra-orthodoxes.
Chiffres clés du conflit :
- 1 219 morts en Israël lors de l’attaque du 7 octobre 2023, majoritairement des civils.
- 58 386 Palestiniens tués à Gaza depuis le début de la campagne militaire, selon le ministère de la Santé local.
- 458 soldats israéliens morts dans l’offensive terrestre à Gaza.
Ces chiffres, lourds et tragiques, mettent en lumière l’urgence d’une armée renforcée. Pourtant, le refus des ultra-orthodoxes de participer au service militaire alimente les tensions, divisant une société déjà sous pression.
Les Ultra-Orthodoxes : Une Communauté au Cœur de la Controverse
Les ultra-orthodoxes, ou Haredim, représentent environ 13 % de la population israélienne. Leur mode de vie, centré sur l’étude religieuse et la stricte observance des traditions juives, les distingue du reste de la société. Pour beaucoup d’entre eux, l’exemption du service militaire est une question de principe : l’étude des textes sacrés est vue comme une contribution essentielle à la survie spirituelle d’Israël.
Mais cette position est de moins en moins tolérée. Les critiques, comme le député d’opposition Avigdor Lieberman, accusent les partis ultra-orthodoxes de privilégier des intérêts communautaires au détriment de l’effort national. Lieberman a dénoncé une loi d’exemption qui, selon lui, trahit les soldats qui risquent leur vie à Gaza.
« Ils promeuvent une loi d’exemption au détriment des combattants sur le terrain, qui ont besoin de renforts. »
Avigdor Lieberman, député d’opposition
Ce sentiment est partagé par une large partie de la population, qui voit dans l’exemption une rupture du contrat social. En temps de paix, cette question était déjà sensible ; en temps de guerre, elle devient explosive.
Une Coalition au Bord de l’Implosion
Le départ de Judaïsme unifié de la Torah n’est pas le seul nuage à l’horizon pour Netanyahu. Une autre formation ultra-orthodoxe, le parti Shas, menace également de quitter la coalition. Si cela se concrétise, le gouvernement perdrait sa majorité parlementaire, ce qui pourrait déclencher des élections anticipées dans un contexte déjà tendu.
Le timing de cette crise est particulièrement problématique. L’annonce du départ du parti ultra-orthodoxe a coïncidé avec la mort de trois soldats israéliens à Gaza, amplifiant le sentiment d’injustice. Pour beaucoup, cette décision illustre un manque de solidarité nationale en temps de crise.
Parti | Position | Impact sur la coalition |
---|---|---|
Judaïsme unifié de la Torah | Quitte la coalition | Réduit la majorité à 61 sièges |
Shas | Menace de partir | Risque d’effondrement total |
Ce tableau résume la fragilité de la situation politique. Avec une majorité aussi étroite, chaque décision devient un pari risqué pour Netanyahu.
Vers une Réforme de la Conscription ?
Face à la crise, des discussions sur une réforme de la conscription s’accélèrent. Le gouvernement est sous pression pour trouver un compromis qui satisfasse à la fois les ultra-orthodoxes et les attentes d’une société en quête d’équité. Mais les positions semblent irréconciliables : d’un côté, les Haredim défendent leur exemption comme un pilier de leur identité ; de l’autre, la population exige une contribution égale de tous en temps de guerre.
Plusieurs propositions circulent, notamment des quotas minimums pour l’enrôlement des ultra-orthodoxes ou des alternatives comme un service civil. Cependant, chaque tentative de réforme se heurte à des résistances, tant de la part des partis religieux que des factions laïques qui exigent une égalité stricte.
Options envisagées pour la conscription :
- Quotas d’enrôlement pour les ultra-orthodoxes.
- Service civil alternatif pour les étudiants des yeshivas.
- Suppression totale des exemptions, avec sanctions pour non-conformité.
Ces options, bien que prometteuses sur le papier, risquent de prolonger les tensions. Une réforme mal calibrée pourrait non seulement faire tomber le gouvernement, mais aussi exacerber les divisions au sein de la société israélienne.
Un Contexte de Guerre qui Amplifie les Enjeux
La guerre à Gaza, déclenchée par l’attaque du Hamas en octobre 2023, a bouleversé le paysage politique et social israélien. Avec 1 219 morts côté israélien et 58 386 morts côté palestinien, selon les chiffres officiels, le conflit a atteint une ampleur tragique. Chaque jour, les pertes humaines rappellent l’urgence d’une mobilisation nationale unie.
Dans ce contexte, le débat sur la conscription dépasse la simple question de l’équité. Il touche à des enjeux d’identité, de solidarité et de survie. Les ultra-orthodoxes, souvent perçus comme déconnectés des réalités du terrain, sont sous le feu des critiques. Pourtant, leur départ de la coalition montre qu’ils sont prêts à défendre leurs convictions, quitte à plonger le pays dans une crise politique.
« C’est un gouvernement de la honte qui n’est pas digne de notre bon peuple. »
Naftali Bennett, ancien Premier ministre
Cette déclaration, cinglante, illustre le fossé grandissant entre les différentes composantes de la société israélienne. Alors que le pays fait face à une guerre extérieure, les divisions internes menacent de le fragiliser davantage.
Et Après ? Les Scénarios Possibles
La crise actuelle pourrait avoir des répercussions majeures. Si le parti Shas met sa menace à exécution et quitte la coalition, des élections anticipées semblent inévitables. Dans un pays déjà polarisé, un scrutin pourrait amplifier les tensions, surtout en pleine guerre.
À court terme, Netanyahu devra jongler entre les exigences des ultra-orthodoxes et les pressions de l’opinion publique. Une réforme de la conscription, même partielle, pourrait apaiser certaines tensions, mais elle risque aussi d’aliéner ses alliés religieux. À l’inverse, céder aux demandes des Haredim pourrait provoquer une révolte parmi les autres segments de la population.
Scénarios possibles :
- Réforme modérée de la conscription pour inclure les ultra-orthodoxes.
- Chute du gouvernement et élections anticipées.
- Maintien du statu quo, avec des tensions sociales accrues.
Quel que soit le scénario, la crise actuelle révèle les défis d’un pays confronté à des pressions internes et externes. La question de la conscription, bien plus qu’un débat technique, est un miroir des fractures d’une société en quête d’unité.
En conclusion, le départ du parti ultra-orthodoxe et les menaces de Shas placent Israël à un tournant décisif. La coalition de Netanyahu, déjà fragilisée, doit naviguer dans un champ de mines politique tout en répondant aux exigences d’une guerre coûteuse. La société israélienne, divisée entre tradition et modernité, devra trouver un moyen de concilier ses valeurs pour avancer. Une chose est sûre : les mois à venir seront cruciaux pour l’avenir du pays.