La psychiatrie publique traverse une crise sans précédent, et le CHU de Nantes n’y échappe pas. Depuis cette semaine, 30 lits du service psychiatrie ont dû fermer, faute de soignants en nombre suffisant pour s’occuper des patients. Une situation inédite et préoccupante, symbole d’un système de santé mentale à bout de souffle.
Une vague d’arrêts maladie révélatrice d’un profond malaise
Depuis plusieurs mois, les conditions de travail ne cessent de se détériorer au sein du service psychiatrie du CHU nantais. Le manque de personnel est criant, obligeant les soignants encore en poste à assurer des plannings de plus en plus chargés, au détriment de leur propre santé. Résultat : les arrêts maladie se multiplient, avec plus d’une cinquantaine d’absences de longue durée actuellement.
C’est honteux, aussi bien pour les patients que pour les professionnels. Cela fait des mois que nous alertons sur l’épuisement des équipes, en vain.
Élise Lebail, infirmière et déléguée CGT au CHU de Nantes
Pour les soignants restants, la coupe est pleine. Beaucoup craquent et s’écroulent, n’en pouvant plus de faire face à une charge de travail démesurée et des plannings intenables. Le sens même de leur métier est remis en question, alors que la qualité des soins pâtit forcément de cette situation extrême.
Des lits fermés, des patients fragilisés
Face à la pénurie de personnel, la direction du CHU n’a eu d’autre choix que de fermer une unité de 30 lits cette semaine. Les patients ont été redéployés vers d’autres services quand c’était possible, mais certains ont dû quitter l’hôpital de manière anticipée :
- Des patients “stabilisés” poussés vers la sortie
- Des prises en charge déprogrammées faute de place
- Des soins dégradés et des soignants à bout
Une situation inacceptable pour les syndicats qui dénoncent “les injonctions paradoxales de la direction”. Car pendant qu’on ferme des lits, les besoins en santé mentale explosent, aggravés par la crise sanitaire. En moins d’un an, ce sont près de 60 lits de psychiatrie publique qui ont disparu en Loire-Atlantique.
La psychiatrie publique sonne l’alarme
Ce qui se passe à Nantes est symptomatique de la crise profonde que traverse la psychiatrie publique partout en France. Manque de moyens, perte d’attractivité, lits supprimés… Le tableau est partout le même, et particulièrement inquiétant. Les professionnels tirent la sonnette d’alarme depuis des années, sans être entendus.
Pourtant, les besoins en santé mentale n’ont jamais été aussi criants, entre crise sanitaire, précarité grandissante et mal-être généralisé. Mais dans ces conditions, l’hôpital public peine à y répondre. Un constat amer pour les soignants qui se sentent abandonnés et ne peuvent plus exercer leur métier dans de bonnes conditions.
Il y a urgence à revaloriser l’attractivité de la psychiatrie publique et lui donner les moyens de fonctionner. C’est tout un pan de notre système de santé et de solidarité qui vacille dangereusement. Le ras-le-bol des soignants du CHU de Nantes doit servir de piqure de rappel. Continuer ainsi n’est plus possible, il en va de notre responsabilité collective.