Comment un député brésilien, exilé volontaire aux États-Unis, peut-il déclencher une crise diplomatique majeure entre deux puissances économiques ? C’est l’histoire d’Eduardo Bolsonaro, fils de l’ancien président Jair Bolsonaro, qui, depuis mars 2025, mène une campagne acharnée depuis le sol américain pour défendre son père, accusé de tentative de coup d’État. Son arme ? Une surtaxe douanière imposée par l’administration Trump, qui secoue les relations économiques entre le Brésil et les États-Unis. Cette affaire, où se mêlent loyauté familiale, ambitions politiques et tensions internationales, captive autant qu’elle divise.
Un Exil Stratégique au Cœur de la Crise
Eduardo Bolsonaro, député fédéral brésilien de 41 ans, n’a jamais caché son dévouement envers son père, Jair Bolsonaro, président du Brésil de 2019 à 2022. Face aux poursuites judiciaires qui menacent l’ancien chef d’État, accusé d’avoir fomenté une tentative de coup d’État, Eduardo a choisi une voie radicale : l’exil aux États-Unis. Installé depuis mars 2025, il a mis son mandat parlementaire en pause pour se consacrer à une mission : obtenir un soutien international pour son père. Ce choix, audacieux et controversé, a transformé le jeune député en figure centrale d’une crise qui dépasse les frontières brésiliennes.
Son installation aux États-Unis n’est pas anodine. Eduardo s’est rapproché de figures influentes de l’extrême droite internationale, notamment dans l’entourage de Donald Trump. Aux côtés de Paulo Figueiredo, petit-fils d’un ancien général de la dictature militaire brésilienne, il a orchestré un lobbying intense. Leur objectif ? Convaincre l’administration américaine que Jair Bolsonaro est victime d’une persécution judiciaire orchestrée par le juge de la Cour suprême brésilienne, Alexandre de Moraes. Ce dernier, figure centrale du système judiciaire brésilien, est devenu la cible privilégiée d’Eduardo.
Une Surtaxe Douanière aux Conséquences Explosives
Le point d’orgue de cette campagne a été l’imposition, en août 2025, de surtaxes douanières de 50 % sur une large part des exportations brésiliennes vers les États-Unis. Cette mesure, décidée par l’administration Trump, a été perçue comme une réponse directe aux pressions d’Eduardo et de ses alliés. Pour eux, il s’agit d’un levier économique pour faire plier le gouvernement brésilien, dirigé par le président de gauche Luiz Inacio Lula da Silva. Ce dernier n’a pas mâché ses mots, qualifiant Eduardo de “traître” pour avoir contribué à pénaliser l’économie de son propre pays.
“C’est un tournant historique”, a proclamé Eduardo Bolsonaro, célébrant l’impact des sanctions douanières.
Cette surtaxe a des répercussions concrètes. Les exportations brésiliennes, notamment dans les secteurs de l’agriculture et de l’industrie, subissent des pertes estimées à plusieurs milliards de dollars. Les tensions économiques s’ajoutent à un climat politique déjà tendu au Brésil, où la polarisation entre les partisans de Bolsonaro et ceux de Lula atteint des sommets. Eduardo, lui, voit dans cette零件, une stratégie pour faire pression sur le juge Moraes et obtenir une amnistie pour son père.
Alexandre de Moraes : l’Ennemi Juridique
Le juge Alexandre de Moraes est au cœur de cette bataille. Chargé de l’enquête sur la tentative de coup d’État de Jair Bolsonaro, il représente, pour Eduardo, une “tyrannie judiciaire”. Moraes, connu pour sa fermeté, a non seulement ordonné l’assignation à résidence de l’ancien président, mais il enquête également sur Eduardo pour tentative d’intimidation des juges. En réponse, les États-Unis ont imposé des sanctions financières personnelles contre Moraes, une mesure rare et symbolique qui a renforcé la détermination d’Eduardo.
Sur les réseaux sociaux, Eduardo ne mâche pas ses mots. Il qualifie Moraes de “psychopathe hors de contrôle” et rejette toute possibilité de négociation. Sa stratégie est claire : pousser pour une loi d’amnistie au Parlement brésilien, qui pourrait annuler les poursuites contre son père, actuellement inéligible jusqu’en 2030. Cette position radicale divise même au sein de la droite brésilienne, certains y voyant une provocation inutile.
Les enjeux de l’amnistie :
- Libérer Jair Bolsonaro des poursuites judiciaires.
- Permettre son retour en politique avant 2030.
- Risquer une polarisation accrue au Brésil.
Un Provocateur au Charisme Controversé
Eduardo Bolsonaro est une figure clivante. Pour ses partisans, il est un “héros” défendant son père contre une justice qu’ils jugent biaisée. Pour ses détracteurs, c’est un provocateur cherchant à attirer l’attention à tout prix. Un ancien conseiller de Jair Bolsonaro, sous couvert d’anonymat, le décrit ainsi :
“L’important pour lui, c’est d’attirer l’attention, de faire du bruit.”
À 41 ans, cet avocat de formation, entré au Parlement à 30 ans avec un record de 1,8 million de voix en 2018, ne manque pas de charisme. Grand, athlétique, doté d’un regard perçant, il incarne une nouvelle génération de la droite brésilienne. Mais ses déclarations incendiaires, comme sa menace de “fermer la Cour suprême” avec “un soldat et un caporal”, lui ont valu des accusations d’extrémisme.
Les Liens avec l’Extrême Droite Internationale
Depuis son exil, Eduardo Bolsonaro a tissé des liens étroits avec l’extrême droite internationale, en particulier avec l’entourage de Donald Trump. Sa présence à Mar-a-Lago lors de la réélection de Trump en 2024 témoigne de son influence croissante. Ces connexions lui ont permis de peser sur les décisions américaines, comme les sanctions contre Moraes et les surtaxes douanières. Mais cette stratégie a un coût : elle aliène une partie de la droite brésilienne, notamment les milieux d’affaires, qui craignent les retombées économiques.
Son passé aux États-Unis, où il a participé à un programme d’échange dans le Maine, a renforcé son aisance dans ce pays. Jair Bolsonaro avait même envisagé de le nommer ambassadeur, vantant son “expérience internationale” acquise en… préparant des hamburgers. Cette anecdote, souvent moquée, illustre pourtant la détermination d’Eduardo à s’imposer sur la scène mondiale.
Une Stratégie à Haut Risque
La stratégie d’Eduardo repose sur un pari risqué : tout gagner ou tout perdre. Comme il l’a lui-même déclaré :
“C’est victoire à 100 % ou défaite à 100 %.”
En cas de retour au Brésil, il risque l’arrestation dans le cadre de l’enquête de Moraes. Pourtant, il continue de défier ses adversaires, y compris des alliés potentiels comme le gouverneur de São Paulo, Tarcisio de Freitas, qu’il accuse de manquer de loyauté. Cette posture intransigeante pourrait compromettre ses ambitions futures, notamment une éventuelle candidature à la présidence en 2026, qu’il envisage si son père le lui demande.
Un Avenir Incertain
L’avenir d’Eduardo Bolsonaro reste incertain. Selon le politologue Leandro Gabiati, son lobbying aux États-Unis lui a valu “le désaveu des milieux d’affaires et d’une partie de la droite”. Si son combat pour l’amnistie de son père échoue, il pourrait se retrouver isolé politiquement. Cependant, sa base de partisans reste fidèle, voyant en lui un symbole de résistance face à un système judiciaire qu’ils jugent partial.
Enjeux | Conséquences |
---|---|
Surtaxes douanières | Pertes économiques pour le Brésil |
Sanctions contre Moraes | Tensions judiciaires accrues |
Loi d’amnistie | Possible retour de Bolsonaro |
La saga d’Eduardo Bolsonaro illustre les tensions profondes qui traversent le Brésil contemporain. Entre loyauté familiale, ambitions politiques et stratégies internationales, son parcours incarne les luttes de pouvoir d’une nation divisée. Reste à savoir si son pari audacieux portera ses fruits ou s’il mènera à son isolement.