Imaginez-vous réveillé au milieu de la nuit par des flammes qui dévorent votre maison. Des hommes armés crient dans une langue que vous comprenez à peine. En quelques minutes, tout ce que vous avez construit disparaît. C’est la réalité vécue par des milliers de familles dans l’est de la République démocratique du Congo depuis plusieurs mois.
Un rapport de l’ONU qui ne laisse aucun doute
Un document explosif, rédigé par des experts indépendants mandatés par le Conseil de sécurité, vient de tomber. Et le constat est accablant : l’armée rwandaise et le groupe armé M23 sont directement responsables de graves violations des droits humains dans les provinces du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
Ce rapport, qui doit être officiellement publié dans les prochains jours, décrit une situation bien plus sombre que ce que les communiqués officiels laissent entendre. Même après la signature, le 29 novembre à Washington, d’un accord censé ramener la paix.
Des exécutions sommaires et des villages rayés de la carte
Les experts parlent d’un ciblage délibéré. Les habitations appartenant à des personnes soupçonnées d’être liées aux FDLR – ces Forces démocratiques de libération du Rwanda – sont systématiquement incendiées. Mais dans les faits, ce sont surtout des civils issus de la communauté hutu qui paient le prix fort.
Les témoignages recueillis font froid dans le dos : des familles entières exécutées parce qu’elles vivaient dans le mauvais village au mauvais moment. Des arrestations arbitraires. Des détentions sans aucune forme de procès.
« Les forces rwandaises et le M23 ont systématiquement détruit et incendié des habitations civiles […] un ciblage délibéré et systématique »
Rapport des experts de l’ONU
Combien de soldats rwandais sont encore sur le sol congolais ?
La réponse est stupéfiante. Entre 6 000 et 7 000 militaires rwandais seraient toujours déployés dans l’est de la RDC. C’est l’équivalent de deux brigades complètes et de deux bataillons de forces spéciales. Des unités d’élite, entraînées, lourdement armées.
Ces chiffres contredisent totalement les déclarations officielles de Kigali, qui continue de nier toute présence militaire sur le territoire congolais. Pourtant, les preuves accumulées par les experts – images satellite, interceptions radio, témoignages croisés – ne laissent guère de place au doute.
Le M23, bras armé ou simple allié ?
Le mouvement du 23-Mars n’agit pas seul. Le rapport est clair : les opérations militaires contre les FDLR sont menées conjointement avec les forces rwandaises. Coordination des mouvements, partage de renseignement, soutien logistique massif.
Et les résultats sont là : depuis la prise de Goma fin janvier, le M23 a étendu son contrôle sur de vastes territoires. Une progression fulgurante qui n’aurait jamais été possible sans l’appui direct de l’armée régulière rwandaise.
Le recrutement forcé : une pratique généralisée
Dans toutes les zones sous son contrôle, le M23 procède à des recrutements forcés. Des jeunes, parfois à peine adolescents, sont enlevés et contraints de rejoindre les rangs. Refuser équivaut souvent à une condamnation à mort.
Le rapport indique que le M23 est responsable de près de la moitié des exécutions sommaires recensées dans le pays entre avril et octobre. Un chiffre qui donne la mesure de l’ampleur des violences.
L’accord de Washington : une paix déjà morte-née ?
Le 29 novembre, Kinshasa et Kigali ont signé un accord sous l’égide des États-Unis. Objectif affiché : désescalade, retrait des troupes, neutralisation des groupes armés. Mais sur le terrain, rien n’a changé.
Pire : le rapport révèle que le gouvernement congolais continue de coopérer avec les FDLR, malgré ses engagements à les combattre. Un jeu trouble où chaque camp utilise les groupes armés comme des pions sur un échiquier macabre.
Trente ans de conflit : pourquoi ça ne s’arrête jamais
L’est de la RDC est en guerre depuis plus de trois décennies. Une région riche en minerais stratégiques – coltan, cobalt, or – qui attise toutes les convoitises. Une frontière poreuse avec le Rwanda. Des rancœurs historiques jamais apurées depuis le génocide de 1994.
Les FDLR, héritiers des anciens génocidaires, servent de prétexte à Kigali pour justifier ses interventions. Mais derrière le discours sécuritaire se cache aussi une lutte pour le contrôle des ressources et des territoires.
Les populations prises en étau
Au milieu de tout cela, les civils paient le prix le plus lourd. Déplacements massifs, camps de fortune, famine, maladies. Le parc national des Virunga, classé au patrimoine mondial, est devenu un théâtre d’opérations militaires.
Les images satellite montrent des villages entiers rasés. Des champs abandonnés. Des routes désertées. Une catastrophe humanitaire qui se déroule sous nos yeux, mais qui reste largement ignorée des opinions publiques internationales.
Que peut encore faire la communauté internationale ?
Les sanctions existent déjà contre certains chefs du M23. Mais elles semblent inefficaces. Le Rwanda, partenaire privilégié de nombreux pays occidentaux, bénéficie d’une forme d’impunité diplomatique.
Le rapport des experts de l’ONU pourrait changer la donne. S’il est suivi d’actes concrets – embargo sur les armes, sanctions ciblées, pression réelle sur Kigali – il pourrait marquer un tournant. Sinon, il rejoindra la longue liste des rapports accablants qui n’ont jamais rien changé.
Une chose est sûre : dans l’est de la RDC, la paix reste un mirage. Et chaque jour qui passe voit de nouvelles victimes s’ajouter à une liste déjà bien trop longue.
À retenir : Malgré un accord de paix signé à Washington, des milliers de soldats rwandais sont toujours présents en RDC, impliqués dans des opérations aux côtés du M23 qui provoquent destructions massives et déplacements de populations. Le rapport de l’ONU parle d’un ciblage systématique des civils.
La situation est complexe, les responsabilités partagées, mais les faits rapportés par les experts indépendants sont difficiles à contester. Reste à savoir si cette fois, la communauté internationale aura le courage d’agir.









