Le monde de la finance est en ébullition suite à la publication du dernier classement des banques systémiques mondiales par le Conseil de stabilité financière. Ce club très sélect, qui regroupe les établissements bancaires considérés comme trop importants pour faire faillite, a vu son ordre chamboulé cette année, avec notamment l’ascension remarquée du Crédit Agricole.
Le Crédit Agricole gravit les échelons
La banque française a en effet gagné une place dans la hiérarchie, passant de la catégorie 1 à la catégorie 2. Ce changement n’est pas anodin, puisqu’il implique des exigences renforcées en termes de fonds propres et de capacité d’absorption des pertes. Le Crédit Agricole devra ainsi mettre davantage d’argent de côté pour pouvoir faire face à d’éventuelles crises financières.
Selon une source proche du dossier, cette montée en grade reflète la solidité croissante du groupe bancaire tricolore et sa résilience face aux turbulences des marchés. Elle témoigne aussi de son poids grandissant dans le paysage financier international.
Bank of America rétrogradée
À l’inverse, la banque américaine Bank of America a été rétrogradée de la catégorie 3 à la catégorie 2. Si cette décision peut sembler négative de prime abord, elle signifie en réalité un assouplissement des contraintes réglementaires pour l’établissement, qui aura moins de capital à immobiliser en réserve.
JP Morgan Chase toujours en tête
Sans surprise, c’est une autre banque américaine, JP Morgan Chase, qui conserve la première place de ce classement. Seule occupante de la catégorie 4, la plus exigeante, elle doit constituer un matelas de sécurité financier plus épais que ses concurrentes pour parer à tout risque systémique.
Derrière elle, on retrouve dans la catégorie 3 des mastodontes tels que Citigroup et HSBC. La catégorie 2 rassemble quant à elle des acteurs de premier plan comme Barclays, BNP Paribas, Goldman Sachs ou encore Bank of China, désormais rejoints par le Crédit Agricole et Bank of America.
Un cercle stable malgré les remous
Malgré le bouleversement des équilibres au sein du classement, le nombre de banques considérées comme systémiques reste stable, à 29. Un chiffre qui n’a pas bougé depuis l’an dernier, malgré la crise qui a frappé le Credit Suisse et conduit à son rachat en urgence par UBS en mars 2023.
Suite à cette opération, UBS avait d’ailleurs vu son statut réhaussé en catégorie 2 dans la mise à jour d’octobre 2023, aux côtés notamment de Barclays, BNP Paribas et Goldman Sachs. Un club qui accueille aujourd’hui le Crédit Agricole.
Des exigences pour prévenir une nouvelle crise
Ce classement des banques systémiques, établi chaque année depuis 2012 par le Conseil de stabilité financière à la demande du G20, vise à tirer les leçons de la crise financière de 2008. Il s’agit d’identifier les établissements dont la faillite aurait des répercussions catastrophiques sur l’ensemble du système, pour leur imposer des règles prudentielles plus strictes.
L’objectif est de rendre le système financier mondial plus résilient et d’éviter qu’une crise bancaire ne se transforme en crise systémique
Un membre du Conseil de stabilité financière
En fonction de leur importance systémique, évaluée selon des critères tels que leur taille, leur interconnexion avec les autres acteurs financiers ou encore la complexité de leurs activités, les banques sont réparties en cinq catégories. À chaque niveau correspondent des exigences croissantes en matière de coussin de fonds propres et de capacité à absorber les pertes.
Vers une finance plus sûre ?
Si ces mesures contraignantes sont parfois critiquées par les banques, qui y voient une entrave à leur rentabilité, elles sont jugées indispensables par les régulateurs pour prévenir de nouveaux chocs financiers majeurs. Leur efficacité reste cependant à démontrer, tant les crises passées ont montré la difficulté d’anticiper et de maîtriser les risques systémiques.
La montée du Crédit Agricole dans la hiérarchie des banques systémiques mondiales illustre en tout cas le poids croissant des acteurs européens dans la finance internationale. Une tendance qui devrait se confirmer dans les années à venir, au gré des consolidations et des réorganisations du secteur.
Reste à savoir si ce nouveau classement suffira à rassurer les marchés et les épargnants sur la solidité du système bancaire mondial. Une chose est sûre : les régulateurs ne relâcheront pas leur vigilance de sitôt, tant les leçons de la crise de 2008 restent fraîches dans les mémoires.