Alors que le régime de Bachar al-Assad vient de s’effondrer en Syrie, une nouvelle menace plane sur le Royaume-Uni. Les services de renseignement britanniques sont en alerte et surveillent de très près un risque imminent : le retour potentiel sur le sol britannique de djihadistes de l’État islamique actuellement détenus dans les prisons kurdes du nord-est de la Syrie.
Angela Eagle, secrétaire d’État à la sécurité des frontières et à l’asile, a déclaré mardi à la BBC : « Soyez assurés que les services de renseignement suivent de très près ce qui se passe et que nous sommes en contact avec tous nos alliés pour voir comment les choses évoluent ». Elle a souligné que « tout potentiel retour de jihadistes est un sujet de grande préoccupation » pour les autorités.
Une dizaine de combattants britanniques détenus en Syrie
D’après des sources sécuritaires citées par le Daily Telegraph, une douzaine de « combattants endurcis de l’État islamique » originaires du Royaume-Uni seraient actuellement emprisonnés dans le nord-est de la Syrie, dans des camps sous contrôle des forces kurdes. La chute soudaine du président syrien fait craindre un chaos dans lequel ces djihadistes pourraient s’évader et tenter de regagner le territoire britannique.
Le spectre d’une résurgence de l’État islamique
Le groupe État islamique, qui avait un temps proclamé un « califat » à cheval entre la Syrie et l’Irak, a été défait militairement en 2019. Mais des cellules de l’organisation subsistent dans la région et profitent de chaque déstabilisation pour tenter de se renforcer. En janvier 2022, des djihadistes avaient ainsi attaqué la prison de Ghwayran où sont détenus des milliers de leurs compagnons d’armes. Les forces kurdes avaient eu grand mal à reprendre le contrôle de la situation.
L’effondrement soudain du régime syrien fait craindre que l’histoire ne se répète, à plus grande échelle cette fois.
Une source diplomatique occidentale en Syrie
Le Royaume-Uni en première ligne
Avec le départ de centaines de ses ressortissants pour rejoindre les rangs de l’État islamique il y a quelques années, le Royaume-Uni est particulièrement exposé au risque de voir revenir ces djihadistes aguerris. D’après des experts, leur retour pourrait relancer la menace terroriste dans le pays.
Face à ce danger, les services de renseignement britanniques sont sur le qui-vive. Ils travaillent en étroite collaboration avec leurs partenaires, notamment américains et français, pour tenter d’anticiper les mouvements des djihadistes détenus en Syrie. Mais la tâche s’annonce ardue dans le chaos qui règne actuellement dans le pays.
Un casse-tête juridique et sécuritaire
Au-delà de la surveillance, se pose aussi la question de la prise en charge de ces individus s’ils parvenaient effectivement à rentrer au Royaume-Uni. La plupart ont été déchus de leur nationalité britannique, ce qui complique leur éventuel retour. Mais Londres pourrait avoir du mal à leur refuser l’entrée s’ils se présentent aux frontières.
Ceux qui reviendraient devraient immédiatement être interpellés et présentés à la justice, un processus nécessaire mais qui comporte aussi des risques comme l’a montré l’attaque perpétrée en 2020 à Londres par un ex-prisonnier condamné pour terrorisme et libéré sous conditions.
Une menace diffuse et de long terme
Même s’ils ne sont pas très nombreux, le retour de ces djihadistes aguerris pourrait avoir un impact durable sur la sécurité du Royaume-Uni. Au-delà du risque d’attentats, ils pourraient chercher à reconstituer des réseaux, radicaliser de nouvelles recrues et perpétuer l’idéologie mortifère du groupe État islamique.
C’est un défi sécuritaire majeur qui risque de mobiliser les services antiterroristes britanniques pour de nombreuses années, une « guerre de l’ombre » dans laquelle le renseignement jouera un rôle crucial pour détecter les menaces et tenter de les déjouer.
Une problématique qui dépasse le Royaume-Uni
La situation au Royaume-Uni illustre une problématique qui concerne en réalité toute l’Europe. Des centaines de ressortissants européens avaient rejoint les rangs de l’État islamique et beaucoup sont aujourd’hui détenus en Syrie. Leur éventuel retour fait craindre une résurgence généralisée de la menace djihadiste sur le continent.
Face à ce défi commun, une coopération renforcée des services de renseignement et de sécurité européens apparaît plus que jamais nécessaire. Certains prônent également une prise en charge coordonnée au niveau européen des « revenants », avec des programmes communs de surveillance, de judiciarisation et de déradicalisation. Mais les obstacles politiques et juridiques sont nombreux.
En attendant, comme l’a souligné Angela Eagle, chaque pays est en alerte et « surveille de très près » l’évolution de la situation, dans l’espoir d’éviter de voir la menace djihadiste resurgir avec force à la faveur du chaos syrien.