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Cour Suprême Autorise la Carte Électorale Pro-Républicaine au Texas

La Cour suprême vient d’autoriser le Texas à utiliser une carte électorale accusée de discriminer les minorités latino et afro-américaines pour favoriser les républicains en 2026. Victoire totale pour Trump et Abbott… mais les démocrates préparent déjà la riposte en Californie. Jusqu’où ira cette guerre des cartes ?

Imaginez que l’on redessine les frontières de votre quartier pour que votre vote pèse soudainement beaucoup moins. C’est exactement ce qui vient de se produire au Texas, avec l’aval de la plus haute juridiction américaine.

Une décision qui fait trembler la démocratie américaine

Jeudi, la Cour suprême des États-Unis a tranché : par six voix contre trois, elle autorise le Texas à utiliser sa nouvelle carte électorale pour les élections de mi-mandat de 2026. Une carte que de nombreux observateurs qualifient de gerrymandering agressif au profit des républicains.

Le vote a suivi la fracture idéologique habituelle : les six juges conservateurs contre les trois juges progressistes. La majorité a annulé une décision de première instance qui avait suspendu cette carte, estimant qu’elle avait été tracée « sur des bases raciales », pratique strictement interdite par la loi fédérale.

Que reprochait-on exactement à cette carte ?

Le Texas, État à la démographie en pleine mutation, compte aujourd’hui une population hispanique très importante et une communauté afro-américaine significative. Historiquement, ces deux groupes votent majoritairement démocrate.

La nouvelle carte adoptée en août par le Parlement texan, à majorité républicaine, a purement et simplement fragmenté plusieurs circonscriptions où Kamala Harris avait largement gagné en 2024. Ces zones ont été découpées puis rattachées à des secteurs très conservateurs, diluant ainsi le poids des minorités.

Résultat attendu selon les experts : les républicains pourraient gagner jusqu’à cinq sièges supplémentaires à la Chambre des représentants en 2026, renforçant leur majorité déjà étroite.

« Il existe des preuves significatives que le Texas a tracé la carte de 2025 sur des bases raciales »

Le tribunal de première instance, mi-novembre

La réponse cinglante de la majorité conservatrice

Pour les six juges conservateurs, le tribunal de première instance s’est « ingéré à tort » dans le processus électoral et a provoqué « beaucoup de confusion » à quelques mois du scrutin.

Ils rappellent également la jurisprudence de 2019 : le gerrymandering partisan (pour favoriser un parti) ne relève pas de la compétence des tribunaux fédéraux. Seule la discrimination raciale peut être sanctionnée.

Or, selon la majorité, les plaignants n’ont pas apporté la preuve irréfutable que la race avait été le critère dominant du redécoupage, et non l’affiliation politique.

La colère d’Elena Kagan et des progressistes

La juge Elena Kagan, porte-parole des trois dissidents, n’y est pas allée par quatre chemins.

« La Cour annonce aujourd’hui que le Texas pourra conduire les élections de l’année prochaine avec une carte dont le tribunal de première instance a déterminé qu’elle violait nos instructions fréquemment répétées sur l’utilisation de critères raciaux dans le découpage électoral »

Juge Elena Kagan

Pour elle, cette décision ouvre grande la porte à des pratiques que la Cour avait pourtant condamnées par le passé.

Les réactions immédiates côté républicain

Le gouverneur Greg Abbott n’a pas attendu une minute pour célébrer la victoire.

« Nous avons gagné ! Le Texas est officiellement – et légalement – plus rouge », a-t-il tweeté, jouant sur la couleur traditionnelle du Parti républicain.

La nouvelle ministre de la Justice, Pam Bondi, a renchéri en accusant les juges de première instance d’avoir agi de manière « partisane » et en rappelant que « les tribunaux fédéraux n’ont pas le droit d’interférer » dans les choix des États.

Et les démocrates ne restent pas les bras croisés

En novembre, les Californiens ont approuvé par référendum un redécoupage qui, selon les estimations, offrirait jusqu’à cinq sièges supplémentaires aux démocrates dans cet État bleu.

Les républicains californiens, soutenus par le ministère fédéral de la Justice, ont immédiatement saisi les tribunaux pour contester cette carte. La guerre symétrique est lancée.

À retenir :

  • Le gerrymandering partisan est légal aux États-Unis depuis 2019.
  • Le gerrymandering racial reste interdit.
  • La frontière entre les deux est de plus en plus floue.
  • Chaque parti utilise désormais cette arme dans les États qu’il contrôle.

Pourquoi cette affaire est historique

Cette décision arrive dans un contexte particulier : Donald Trump, revenu au pouvoir, avait personnellement fait pression sur les élus texans pour qu’ils adoptent cette carte avant 2026.

Avec une majorité fragile au Congrès, chaque siège compte. Les républicains savent que démographie joue contre eux à long terme au Texas : d’ici 2030, les Hispaniques devraient devenir le premier groupe ethnique de l’État.

Ce redécoupage apparaît donc comme une opération de survie politique à court terme, au prix d’une accusation de discrimination raciale à peine voilée.

Vers une remise en cause du Voting Rights Act ?

Depuis 2013 et l’arrêt Shelby County v. Holder, les États du Sud ne sont plus obligés de faire valider leurs cartes électorales par le ministère de la Justice au préalable.

Cette décision de 2025 renforce encore cette tendance : tant que l’on peut prétendre que le critère dominant était politique et non racial, presque tout semble permis.

De nombreux constitutionalistes s’alarment d’un retour en arrière sur les droits voting des minorités, conquis de haute lutte dans les années 1960.

Ce que cela change concrètement pour 2026

Les candidats républicains partiront avec un avantage structurel important au Texas. Les circonscriptions contestées restent en l’état.

Les associations de défense des droits civiques promettent de nouveaux recours, mais le calendrier joue contre elles : la Cour suprême a clairement fait comprendre qu’elle ne voulait plus de « confusion » à l’approche du scrutin.

En clair : la carte validée jeudi sera très probablement celle qui sera utilisée en novembre 2026.

Le décor est planté pour une bataille législative et judiciaire qui s’annonce parmi les plus acharnées de l’histoire récente américaine. Le Texas rouge pour encore quelques années… mais à quel prix démocratique ?

La démocratie américaine continue de se jouer autant dans les urnes… que sur les cartes électorales.

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