C’est un revirement à 180 degrés qui a secoué la scène politique française ces derniers jours. Alors que le Journal du Dimanche révélait un projet du gouvernement visant à suspendre l’application des mesures les plus répressives de la loi immigration, un vent de fronde s’est levé, contraignant l’exécutif à faire machine arrière en catastrophe. Face au tollé, le ministre de l’Intérieur Gérald Darmanin a dû s’engager publiquement à publier les décrets d’application de la loi dans les délais prévus, démentant toute intention de la mettre en suspens.
Révélations fracassantes du JDD
Tout a commencé le week-end dernier quand le Journal du Dimanche a dévoilé les intentions cachées du gouvernement concernant la controversée loi sur l’immigration adoptée en janvier dernier. Selon un document confidentiel consulté par le journal, l’exécutif prévoyait d’émettre un décret pour geler l’application du titre VII de la loi, qui porte sur la simplification du contentieux et l’éloignement des étrangers.
Il s’agit d’une des mesures les plus répressives de la loi sur l’immigration.
– Un haut-fonctionnaire cité par le JDD
Cette partie de la loi vise en effet à réduire drastiquement le nombre de recours possibles en matière d’expulsions du territoire. Sa suspension aurait donc constitué un signal fort envoyé par le gouvernement, soupçonné de vouloir ménager son aile gauche à l’approche des élections législatives de 2024.
Levée de boucliers immédiate
Mais c’était sans compter la réaction immédiate des tenants d’une ligne dure sur l’immigration. À droite comme à l’extrême-droite, les critiques ont fusé, accusant le gouvernement de lâcheté et de renier ses engagements. Sur les réseaux sociaux, le hashtag #SuspensionLoiImmigration s’est hissé en tête des tendances, cristallisant la colère des partisans d’une politique migratoire stricte.
Face à cette bronca, l’exécutif a d’abord tenté de démentir en bloc, affirmant que les révélations du JDD étaient “totalement fausses”. Mais devant l’ampleur de la contestation, un rétropédalage en règle s’imposait.
Darmanin promet la publication des décrets
C’est donc un Gérald Darmanin à la mine contrite qui a dû monter au créneau pour calmer le jeu. Dans un tweet publié ce mardi, le ministre de l’Intérieur s’est engagé à “publier les décrets dans les délais” prévus par la loi immigration. Une manière de couper court aux spéculations sur un éventuel enterrement du texte.
Publication ce matin de 6 nouveaux décrets d’application de la « Loi Immigration », qui s’ajoutent aux mesures de grande fermeté déjà en vigueur depuis son adoption le 28 janvier dernier.
– Gérald Darmanin, sur Twitter le 16 juillet
Le locataire de la place Beauvau a même mis en avant les premiers effets de la loi, se félicitant de l’expulsion de “2500 étrangers délinquants” au premier semestre 2024.
Un rétropédalage en rase campagne
Il n’en reste pas moins que ce recul précipité du gouvernement a tout d’une reculade en rase campagne. Pris en étau entre la fronde des « durs » de la majorité et la nécessité de ménager son aile gauche, l’exécutif donne une nouvelle fois le sentiment de naviguer à vue sur le sensible dossier de l’immigration.
- Un projet de suspension dévoilé par la presse
- Une levée de boucliers immédiate à droite
- Un rétropédalage en catastrophe du gouvernement
Cette séquence chaotique intervient qui plus est quelques jours seulement après l’annonce par Gabriel Attal d’une suspension de la réforme de l’assurance chômage. Autant de signaux contradictoires envoyés à l’approche d’échéances électorales cruciales, qui ne manqueront pas d’alimenter les procès en incohérence dressés contre le gouvernement.
Reste à savoir si l’engagement solennel de Gérald Darmanin à appliquer la loi immigration suffira à éteindre la polémique. Réponse dans les prochaines semaines, avec la publication très attendue – et scrutée – des fameux décrets d’application. L’exécutif n’a plus droit à l’erreur sur ce dossier inflammable.