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Corée du Sud : La Malédiction des Présidents

De la destitution à l'emprisonnement, en passant par l'assassinat et le suicide, les présidents sud-coréens semblent frappés par une malédiction. Plongez dans les coulisses d'un pouvoir qui...

Qui a dit que le pouvoir était un long fleuve tranquille ? Certainement pas les présidents sud-coréens. Destitution, emprisonnement, suicide, assassinat… Leur destin semble scellé par une malédiction qui n’épargne presque personne. Retour sur ces trajectoires politiques aussi fulgurantes que tragiques.

Un fauteuil présidentiel semé d’embûches

Accéder à la plus haute fonction de l’État sud-coréen relève du parcours du combattant. Et le rester encore plus. Sur les douze présidents que le pays a connus depuis son indépendance en 1948, rares sont ceux qui ont pu exercer sereinement leur mandat jusqu’à son terme.

Le premier président, Syngman Rhee, fut contraint à la démission dès 1960 après des élections truquées. Son successeur, Yoon Bo-sun, ne restera qu’un an au pouvoir avant d’être renversé par un coup d’État militaire. Le général putschiste, Park Chung-hee, dirigera le pays d’une main de fer pendant 18 ans, avant de connaître une fin tragique…

Assassinat, soulèvement, coup d’État… Les années sombres

Octobre 1979. Lors d’un banquet arrosé, le dictateur Park Chung-hee est abattu par le directeur des services secrets coréens. Selon une source proche du dossier, l’officier aurait agi par rancœur personnelle envers celui qui dirigeait le pays depuis 1961. Onze ans plus tôt, Park avait déjà échappé de peu à une tentative d’assassinat perpétrée par un commando nord-coréen infiltré à Séoul.

Après la mort de Park, le pays sombre dans le chaos. Chun Doo-hwan, un général de l’armée, en profite pour fomenter un coup d’État et s’emparer du pouvoir. Son régime sera marqué par une sanglante répression d’un soulèvement populaire en 1980, qui lui vaudra le surnom de « Boucher de Gwangju ». Contraint de quitter le pouvoir en 1987, il échappera de peu à la peine capitale, sa condamnation à mort étant commuée en prison à vie.

Corruption, abus de pouvoir… Les affaires qui secouent les années 2000

Le retour de la démocratie n’a pas pour autant mis fin aux turpitudes des locataires de la Maison Bleue, le palais présidentiel de Séoul. Roh Moo-hyun, président de 2003 à 2008, se suicidera un an après la fin de son mandat, alors qu’il était visé par une enquête pour corruption.

« C’est une tragédie pour la démocratie coréenne et pour sa famille. »

– Moon Jae-in, ancien président sud-coréen, à propos du suicide de Roh Moo-hyun

Son successeur, Lee Myung-bak, croupira lui près de cinq ans en prison pour avoir touché des pots-de-vin de Samsung. Quant à Park Geun-hye, première femme présidente du pays et fille de l’ancien dictateur Park Chung-hee, elle sera destituée en 2016 dans un retentissant scandale d’abus de pouvoir et de corruption.

L’actuel président sud-coréen, Yoon Suk-yeol, est lui aussi dans la tourmente. Élu en 2022 en surfant sur un discours anti-corruption, il est aujourd’hui menacé de destitution pour conflit d’intérêts. Un scénario qui rappelle étrangement celui de sa prédécesseure…

Une démocratie encore fragile

Cette valse de scandales et de destins brisés en dit long sur la fragilité de la jeune démocratie sud-coréenne. Après des décennies de dictature militaire, le pays peine encore à tourner la page d’un passé autoritaire qui a laissé des traces.

La soif de pouvoir, la corruption endémique et le poids des réseaux d’influence semblent gangrener durablement la vie politique nationale. Un héritage empoisonné qui mine la confiance des citoyens envers leurs élites et fragilise les institutions.

Seuls quelques rares présidents ont jusqu’ici réussi à échapper à la malédiction, à l’image de Kim Dae-jung, prix Nobel de la paix pour son rôle dans le rapprochement avec la Corée du Nord. Mais même lui avait dû surmonter de lourdes épreuves, comme lorsqu’il fut condamné à mort par le dictateur Chun Doo-hwan en 1980 avant d’être gracié.

La route vers une démocratie apaisée et transparente est encore longue pour la Corée du Sud. Mais les aspirations de la société civile et de la jeune génération, avides de changement, laissent espérer des lendemains meilleurs. Pour conjurer le mauvais sort qui semble s’acharner sur les présidents, le pays devra s’attaquer en profondeur aux maux qui rongent son système politique. Un défi de taille pour les futurs locataires de la Maison Bleue.

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