Comment une nation peut-elle prospérer sous la menace de tensions commerciales internationales ? La Corée du Sud, géant économique de l’Asie, a surpris au deuxième trimestre 2025 avec une croissance inattendue, portée par une consommation intérieure revitalisée et des exportations dynamiques. Pourtant, l’horizon s’assombrit avec des défis géopolitiques et commerciaux, notamment avec les États-Unis. Cet article explore les forces qui propulsent l’économie sud-coréenne, les obstacles qui se dressent sur son chemin, et les perspectives pour les mois à venir.
Une Croissance Résiliente Malgré les Turbulences
Entre avril et juin 2025, l’économie sud-coréenne a enregistré une progression de 0,6 % par rapport au trimestre précédent, dépassant légèrement les prévisions de la Banque de Corée (BOK), qui tablait sur 0,5 %. Sur un an, la croissance atteint 0,5 %, un chiffre encourageant après une contraction de 0,2 % au premier trimestre, marquée par une instabilité politique majeure. Cette embellie repose sur deux piliers : une consommation intérieure en hausse et des exportations particulièrement robustes.
Les exportations, moteur historique de l’économie sud-coréenne, ont bondi de 4,2 %, enregistrant leur meilleure performance en près de cinq ans. Ce dynamisme est largement attribuable à l’industrie des semi-conducteurs, dont la Corée du Sud est un leader mondial, et à une demande mondiale soutenue pour ses produits technologiques. Parallèlement, la consommation des ménages a progressé de 0,5 %, un rebond significatif après des mois de morosité.
Un Contexte Politique Apaisé
La stabilité retrouvée après des mois de chaos politique a joué un rôle clé dans cette reprise. Fin 2024, le pays a traversé une crise sans précédent avec la tentative avortée de l’ancien président Yoon Suk Yeol d’instaurer la loi martiale. Cette période, marquée par des manifestations massives et une incertitude généralisée, avait plombé le moral des consommateurs et freiné l’activité économique. La destitution de Yoon en avril 2025, suivie de l’élection de Lee Jae Myung en juin, a marqué un tournant.
La victoire de Lee Jae Myung a clos un chapitre tumultueux, redonnant confiance aux ménages et stimulant la consommation.
Lee Jae Myung, figure centriste, a su apaiser les tensions et restaurer un climat de confiance. Son arrivée au pouvoir a coïncidé avec une série de mesures économiques audacieuses, notamment un plan de relance ambitieux qui a redynamisé les dépenses des ménages.
Un Plan de Relance Audacieux
Depuis son investiture, le président Lee a mis en place des initiatives visant à stimuler l’économie. Parmi elles, la distribution de bons d’achat d’une valeur de 150 000 wons (environ 93 euros) par habitant a rencontré un vif succès. Cette mesure, visant à encourager la consommation, a directement contribué à la hausse de 0,5 % des dépenses des ménages au deuxième trimestre.
En parallèle, les dépenses publiques ont été renforcées, avec des investissements dans les infrastructures et des soutiens ciblés aux secteurs clés comme la technologie et l’automobile. Ces efforts portent leurs fruits, comme en témoigne la prévision optimiste d’Hyosung Kwon, analyste chez Bloomberg Economics :
Nous anticipons une croissance plus soutenue au troisième trimestre 2025, portée par les mesures budgétaires et une confiance retrouvée des consommateurs.
Hyosung Kwon, Bloomberg Economics
Ces initiatives ne sont pas sans rappeler les stratégies adoptées par d’autres nations asiatiques, comme le Japon, pour relancer leur économie après des périodes de crise. Cependant, malgré ces avancées, des défis majeurs se profilent à l’horizon.
Tensions Commerciales avec les États-Unis
Si la Corée du Sud affiche une résilience remarquable, elle n’est pas à l’abri des turbulences internationales. Les relations commerciales avec les États-Unis, sous la présidence de Donald Trump, se sont tendues. Ce dernier a menacé d’imposer des droits de douane de 25 % dès le 1er août 2025 si aucun accord commercial n’est conclu d’ici là. Cette menace pèse lourd sur une économie qui dépend fortement de ses exportations, notamment dans les secteurs de l’acier et de l’automobile, déjà ciblés par des surtaxes.
Pour l’instant, l’impact des tensions commerciales reste limité. Selon Lee Dong-won, responsable à la Banque de Corée, les entreprises sud-coréennes ont su s’adapter rapidement, profitant d’une suspension temporaire des mesures tarifaires réciproques. Cependant, l’absence de progrès dans les négociations commerciales avec Washington inquiète. Le ministre sud-coréen du Commerce, Yeo Han-koo, a qualifié la situation de « grave », soulignant l’urgence de trouver un terrain d’entente.
Pourquoi les tensions commerciales sont-elles si préoccupantes ?
- Exportations vulnérables : Les semi-conducteurs et l’automobile, piliers de l’économie sud-coréenne, sont directement menacés par les droits de douane.
- Concurrence accrue : D’autres pays, comme le Japon et le Vietnam, ont déjà conclu des accords avec les États-Unis, renforçant leur position.
- Impact sur la croissance : Une guerre commerciale pourrait freiner la dynamique actuelle et peser sur le PIB.
Une Course Contre la Montre
Les négociations avec les États-Unis patinent. Une rencontre prévue entre Yeo Han-koo et son homologue américain, Scott Bessent, a été annulée pour des raisons d’agenda, ajoutant à l’incertitude. En parallèle, d’autres nations progressent dans leurs discussions avec Washington. Le Japon a récemment annoncé un accord commercial qualifié d’« énorme » par Donald Trump, tandis que l’Union européenne et la Chine sont en pourparlers avancés.
Pour éviter une escalade, Séoul explore des solutions. Parmi les propositions sur la table, l’achat de volumes accrus de gaz naturel liquéfié (GNL) américain et un soutien à l’industrie de la construction navale aux États-Unis. Ces gestes, bien que coûteux, pourraient apaiser les tensions et ouvrir la voie à un accord.
Perspectives pour l’Avenir
Malgré les incertitudes, les analystes restent optimistes pour le troisième trimestre 2025. La combinaison des mesures de relance, d’une consommation intérieure renforcée et d’une industrie exportatrice performante devrait soutenir la croissance. Cependant, la menace des droits de douane américains plane comme une ombre sur ces prévisions.
Voici les principaux facteurs qui façonneront l’avenir économique de la Corée du Sud :
- Politique intérieure : La stabilité politique sous Lee Jae Myung sera cruciale pour maintenir la confiance des consommateurs.
- Compétitivité mondiale : Les industries des semi-conducteurs et de l’automobile devront continuer à innover pour rester leaders.
- Diplomatie commerciale : Un accord avec les États-Unis pourrait redéfinir les perspectives économiques du pays.
La Corée du Sud se trouve à un carrefour. Sa capacité à naviguer entre opportunités internes et défis externes déterminera sa trajectoire pour les années à venir. Si le pays parvient à conclure un accord commercial avec les États-Unis tout en maintenant sa dynamique intérieure, il pourrait consolider sa place parmi les grandes puissances économiques mondiales.
Un Équilibre Délicat à Maintenir
L’économie sud-coréenne illustre parfaitement la complexité des dynamiques économiques modernes. D’un côté, la résilience et l’innovation du pays lui permettent de surmonter des crises internes et de tirer parti de la demande mondiale. De l’autre, les pressions externes, notamment les tensions commerciales, rappellent que même les économies les plus robustes ne sont pas à l’abri des aléas géopolitiques.
Pour les observateurs, le cas sud-coréen est une leçon : la croissance économique ne peut être durable sans une diplomatie habile et une vision stratégique. Alors que Séoul se prépare à affronter des vents contraires, le monde regarde avec attention. Parviendra-t-elle à transformer ces défis en opportunités ? L’avenir le dira.
La Corée du Sud, avec son mélange unique de tradition et d’innovation, reste un acteur incontournable sur la scène mondiale. Mais dans un monde en mutation rapide, chaque décision compte.