Dans les ruelles ensoleillées de Marseille, où l’odeur de la bouillabaisse se mêle aux embruns méditerranéens, une nouvelle polémique fait vibrer la cité phocéenne. La construction d’une mosquée dans le 13e arrondissement, annoncée par le maire Benoît Payan, a déclenché une tempête politique. Au cœur de ce tumulte, le sénateur Stéphane Ravier, figure de l’extrême droite, s’insurge contre ce qu’il perçoit comme une menace pour l’identité marseillaise. Face à lui, la majorité municipale, soutenue par des voix comme celle de Samia Ghali, défend un projet qu’elle juge essentiel pour répondre aux besoins des fidèles. À l’approche des municipales de 2026, ce débat dépasse largement les murs d’un conseil municipal : il touche à des questions brûlantes d’identité, de laïcité et de politique locale.
Une Mosquée au Cœur des Tensions
Le 11 juillet 2025, lors d’un conseil municipal houleux, Stéphane Ravier a pris la parole pour dénoncer le projet de construction d’une nouvelle mosquée à Frais-Vallon, dans le 13e arrondissement. Selon lui, ce projet s’inscrit dans une logique d’islamisation de Marseille, une accusation qu’il porte avec force depuis des années. Dans une intervention remarquée, il a interpellé la majorité municipale, qualifiée d’islamo-gauchiste, sur les implications culturelles et sociales de cette initiative. Sa prise de position, relayée sur les réseaux sociaux, a suscité des réactions passionnées, tant parmi ses partisans que ses détracteurs.
En réponse, le maire Benoît Payan a assumé pleinement sa décision. Lors d’une visite à la mosquée des Cèdres pour le ramadan, il avait déjà annoncé la cession d’un terrain municipal pour permettre l’agrandissement d’un lieu de culte. « Marseille sans les musulmans ne serait pas Marseille », a-t-il déclaré, soulignant l’importance de répondre aux besoins des fidèles pour éviter les prières de rue, souvent décriées. Cette prise de position, perçue comme un geste d’ouverture, a toutefois attisé les critiques de ceux qui y voient une forme de clientélisme électoral.
« Vous m’avez demandé un terrain, et j’ai dit oui. Marseille sans les musulmans ne serait pas Marseille. »
Benoît Payan, maire de Marseille
Samia Ghali et la Réplique Cinglante
Dans ce débat déjà électrique, l’intervention de Samia Ghali, figure politique influente à Marseille, a jeté de l’huile sur le feu. Répondant à Stéphane Ravier, elle a lancé une phrase qui a fait mouche : « Vous n’êtes pas au bout de vos peines, Monsieur Ravier… vous verrez. » Cette réplique, empreinte de défi, laisse planer une ambiguïté : s’agit-il d’une promesse de nouveaux projets similaires ou d’une mise en garde politique ? Quoi qu’il en soit, elle illustre les tensions qui traversent la scène politique marseillaise, où chaque mot est pesé et chaque déclaration scrutée.
Samia Ghali, connue pour son franc-parler et son ancrage dans les quartiers populaires, incarne une vision de Marseille comme un carrefour de cultures. Son commentaire, bien que provocateur, reflète une réalité : la ville, forte de sa diversité, est un terrain fertile pour les débats sur l’intégration et la coexistence. Mais pour Ravier, cette phrase est une confirmation de ses craintes, qu’il résume dans une formule choc : « En 2026, les Marseillais devront choisir entre les minarets et les clochers. »
Un Projet Controversé : Les Détails
Le projet en question concerne la cession d’un terrain municipal à une association cultuelle pour la construction ou l’agrandissement d’une mosquée dans le 13e arrondissement. Selon les informations disponibles, l’association a réussi à réunir 350 000 euros grâce à des dons pour acquérir ce terrain. Cette initiative, votée en juillet 2023 par le conseil municipal (malgré l’opposition des élus d’extrême droite), s’inscrit dans une volonté de répondre à la demande croissante de lieux de culte adaptés. Marseille compte déjà de nombreuses mosquées, souvent petites et improvisées, parfois dans des conditions indignes. La municipalité argue que des infrastructures modernes permettraient de mieux encadrer les pratiques religieuses et de réduire les prières de rue.
Cependant, les opposants, menés par Stéphane Ravier, soulèvent plusieurs objections. Ils questionnent la transparence de la cession du terrain, certains insinuant qu’elle pourrait être effectuée à un prix dérisoire, voire gratuitement. De plus, ils pointent du doigt les antécédents de certaines associations impliquées, évoquant des liens supposés avec des mouvements radicalisés. Ces accusations, bien que non étayées par des preuves publiques, alimentent un climat de suspicion.
Aspect du projet | Détails |
---|---|
Localisation | Frais-Vallon, 13e arrondissement |
Objectif | Construction ou agrandissement d’une mosquée |
Financement | 350 000 € via dons associatifs |
Vote municipal | Juillet 2023, approuvé sauf opposition RN/Reconquête |
La Laïcité au Cœur du Débat
Ce projet de mosquée soulève une question centrale : comment concilier la laïcité, principe fondamental de la République française, avec les besoins des communautés religieuses ? La loi de 1905, qui garantit la séparation de l’Église et de l’État, interdit aux collectivités publiques de subventionner directement des lieux de culte. Cependant, la cession de terrains à des associations cultuelles, souvent via des baux emphytéotiques, est une pratique courante, validée par le Conseil d’État. À Marseille, cette pratique n’est pas nouvelle : des terrains ont déjà été cédés pour des mosquées, mais aussi pour une synagogue ou la restauration de lieux chrétiens, comme Notre-Dame de la Garde.
Benoît Payan insiste sur l’équité de sa politique : « J’ai soutenu l’agrandissement d’une synagogue et la rénovation d’églises, pourquoi ne pas le faire pour une mosquée ? » Cette rhétorique, qui met en avant une approche équilibrée, ne convainc pas tout le monde. Pour Ravier et ses soutiens, ces initiatives favorisent une communauté au détriment d’une vision laïque et unitaire de la société. Ils accusent la municipalité de céder à des pressions communautaristes, dans un contexte où l’immigration est un sujet sensible.
« En 2026, les Marseillais devront choisir entre les minarets et les clochers. »
Stéphane Ravier, sénateur des Bouches-du-Rhône
Un Contexte Politique Explosif
À moins d’un an des élections municipales de 2026, cette controverse s’inscrit dans une bataille politique plus large. Marseille, ville historiquement marquée par la droite, a basculé à gauche en 2020 avec l’élection de Benoît Payan. Cette victoire, inattendue après des décennies de domination des Républicains, a redessiné le paysage politique local. Cependant, l’extrême droite, représentée par le Rassemblement national (RN) et des figures comme Stéphane Ravier, reste une force non négligeable. Lors des municipales de 2020, Ravier, alors au RN, avait obtenu environ 20 % des voix, un score significatif dans une ville aussi diverse.
Aujourd’hui, Ravier, qui a quitté le RN puis Reconquête pour fonder son mouvement Marseille d’abord, mise sur l’union des droites pour reconquérir la mairie. Il appelle à dépasser les rancœurs personnelles, notamment avec Franck Allisio, candidat officiel du RN. Un sondage récent crédite Allisio de 19 % des intentions de vote et Ravier de 15 %, un potentiel cumulé qui pourrait menacer la gauche. Cependant, les tensions entre les deux hommes compliquent cette alliance, rendant l’issue incertaine.
Les enjeux des municipales 2026 :
- Union des droites : un défi face aux divisions internes.
- Positionnement de la gauche : Payan mise sur la diversité comme atout.
- Laïcité et identité : des thèmes centraux dans la campagne.
Marseille, Ville de Contrastes
Marseille, avec ses 850 000 habitants, est un creuset de cultures, où cohabitent des communautés d’origines diverses : arménienne, comorienne, maghrébine, italienne, et bien d’autres. Cette diversité, célébrée par certains comme une richesse, est perçue par d’autres comme une source de tensions. La ville compte environ 70 mosquées, souvent petites et inadaptées, ce qui pousse les fidèles à prier dans la rue lors des grandes fêtes religieuses. Ces images, relayées par les médias, alimentent les critiques de ceux qui, comme Ravier, dénoncent une « politique de marquage territorial ».
Pourtant, les défenseurs du projet, dont Payan, rappellent que la construction de lieux de culte modernes est une réponse pragmatique à ces défis. Ils soulignent également que Marseille a toujours été une ville d’accueil, marquée par des vagues d’immigration successives. « La ville n’est pas née musulmane, mais elle s’est construite avec toutes ses composantes », affirme un proche de la municipalité. Cette vision, qui met en avant l’inclusion, se heurte à une opposition farouche, qui voit dans ces projets une menace pour l’identité provençale.
Les Antécédents de la Controverse
Ce n’est pas la première fois que la construction d’une mosquée fait débat à Marseille. Déjà en 2010, le projet de la « Grande Mosquée » dans le 15e arrondissement avait suscité une vive opposition, notamment de la part du Front national, alors représenté par Stéphane Ravier. Ce projet, qui prévoyait un lieu de culte pouvant accueillir 7 000 personnes, avait finalement été abandonné en 2017 après des problèmes financiers et des recours judiciaires. À l’époque, Ravier s’était réjoui de cette annulation, y voyant une victoire contre ce qu’il qualifiait de « séparatisme ».
Depuis, les tensions autour des lieux de culte musulmans n’ont pas faibli. En 2016, Ravier avait appelé à un « gel » de la construction de mosquées, arguant que certaines associations cultuelles étaient liées à des mouvements radicaux. Ces accusations, souvent relayées sans preuves concrètes, ont contribué à polariser le débat. Aujourd’hui, le projet de Frais-Vallon ravive ces anciennes querelles, avec une intensité accrue à l’approche des échéances électorales.
Vers un Choc Électoral en 2026 ?
À l’horizon 2026, la question des mosquées pourrait devenir un enjeu central des municipales. Stéphane Ravier, avec son mouvement Marseille d’abord, cherche à capitaliser sur les craintes d’une partie de l’électorat, notamment dans les quartiers où l’extrême droite a progressé. Sa rhétorique, centrée sur l’opposition entre « minarets et clochers », vise à mobiliser les électeurs autour de la question identitaire. De son côté, Benoît Payan mise sur une vision inclusive, mettant en avant la diversité comme une force pour Marseille.
Le rôle de figures comme Samia Ghali sera crucial. Connue pour son influence dans les quartiers nord, elle pourrait jouer les arbitres dans ce duel. Sa phrase provocatrice à l’encontre de Ravier laisse entendre qu’elle ne compte pas rester en retrait. Mais au-delà des joutes verbales, c’est l’avenir de Marseille qui se joue : une ville ouverte et plurielle, ou une ville repliée sur une identité plus exclusive ?
Marseille, carrefour de cultures, est à la croisée des chemins. Les municipales de 2026 seront-elles un tournant ?
Conclusion : Un Débat qui Dépasse les Frontières
La controverse autour de la mosquée de Frais-Vallon n’est pas qu’une querelle locale. Elle reflète des enjeux nationaux, voire européens, autour de l’immigration, de la laïcité et de l’intégration. À Marseille, ville-monde où se croisent des destins venus des quatre coins du globe, chaque décision politique prend une résonance particulière. Le bras de fer entre Stéphane Ravier et Benoît Payan, amplifié par les interventions de figures comme Samia Ghali, préfigure une campagne électorale où les passions seront à vif.
En attendant 2026, les Marseillais observent, débattent, et parfois s’opposent. La ville, avec ses clochers, ses minarets, et son histoire riche, reste un laboratoire unique où se dessine l’avenir d’une société plurielle. Reste à savoir si les habitants choisiront l’ouverture ou la crispation, la coexistence ou la division. Une chose est sûre : ce débat, loin d’être clos, continuera d’alimenter les discussions dans les cafés du Vieux-Port et au-delà.