Dans un contexte de turbulences pour l’industrie des cryptomonnaies, Consensys, l’un des pionniers de l’écosystème Ethereum, vient d’annoncer le licenciement de 20% de ses effectifs. Le fondateur et PDG Joe Lubin pointe du doigt les conditions macroéconomiques difficiles mais surtout l’incertitude réglementaire persistante et ce qu’il qualifie d'”abus de pouvoir” de la part de la Securities and Exchange Commission (SEC) américaine.
Cette décision intervient alors que Consensys est engagé dans une bataille juridique avec le gendarme boursier. En juin dernier, la SEC avait en effet accusé l’entreprise d’avoir agi comme un courtier en valeurs mobilières non enregistré via son populaire portefeuille MetaMask. D’autres services de staking Ethereum, servant de plateformes tierces pour le wallet, avaient aussi été visés.
De multiples actions de la SEC, dont la nôtre, représentent des emplois significatifs et des investissements productifs perdus à cause de l’abus de pouvoir de la SEC et de l’incapacité du Congrès à rectifier le tir. De telles attaques du gouvernement américain finiront par coûter des dizaines de millions de dollars à de nombreuses entreprises.
Joe Lubin, fondateur et PDG de Consensys
Un secteur sous pression
Consensys est loin d’être un cas isolé dans le secteur des cryptomonnaies. Ces dernières années, de nombreuses entreprises ont dû se séparer d’une partie de leurs équipes, pénalisées par la hausse des taux d’intérêt qui pèse sur leur trésorerie. Une période qui coïncide aussi avec un durcissement de ton de la SEC envers les acteurs de l’industrie, se traduisant par une explosion des frais d’avocats.
Face à ce qu’elles considèrent comme un acharnement, certaines sociétés ont choisi de répliquer sur le terrain judiciaire. Outre Consensys qui a contre-attaqué début 2023 en poursuivant la SEC pour abus de pouvoir, on peut citer les exemples de Coinbase, Grayscale, Kraken ou encore Uniswap qui ont tous engagé ou menacé d’engager des poursuites contre le régulateur.
MetaMask dans le viseur
Pour Consensys, c’est avant tout son produit phare MetaMask qui cristallise les tensions avec la SEC. Le wallet, qui revendique plus de 30 millions d’utilisateurs actifs mensuels, est accusé d’avoir permis des transactions sur des titres non enregistrés via ses fonctionnalités de staking.
La société nie farouchement ces allégations, arguant que MetaMask est un simple outil logiciel et que la responsabilité des transactions incombe aux utilisateurs. Elle dénonce une tentative de la SEC de s’arroger un pouvoir qu’elle n’a pas sur Ethereum et son écosystème décentralisé.
L’avenir en question
Si le bras de fer judiciaire promet de s’inscrire dans la durée, les licenciements annoncés témoignent de l’impact concret et immédiat de ce climat d’incertitude pour les entreprises du secteur. Avec des lignes rouges encore floues et changeantes, difficile pour elles de se projeter et d’attirer les investisseurs.
Beaucoup espèrent un éclaircissement rapide du cadre réglementaire pour sortir de cette zone grise mais les signaux envoyés par la SEC et le Congrès américain ne vont pas franchement dans ce sens. En attendant, comme le montre le cas Consensys, ce sont les équipes qui trinquent en première ligne, victimes collatérales d’une industrie crypto encore en quête de stabilité et de légitimité.